Le groupe
Biographie :

Le one-man band Ars Moriendi est né en 2001 sur les cendres de Solipsis, un projet black / death atmosphérique. C'est en Septembre 2008 que sort officiellement le premier album d'Ars Moriendi, "L'Oppression Du Rien". Suivent "Du Tréfonds D'un Être" en Août 2011 chez Archaic Sound, "La Singulière Noirceur D'un Astre" en Mars 2014, "Sepelitur Alleluia" en Octobre 2016, "La Solitude Du Pieux Scélérat" en Mai 2019, "Le Silence Déraisonnable Du Ciel" en Septembre 2021, "Tormentum Inanis MMXXII" en Décembre 2022, et "Lorsque Les Coeurs S'assèchent" en Août 2023.

Discographie :

2008 : "L'Oppression Du Rien"
2011 : "Du Tréfonds D'un Être"
2014 : "La Singulière Noirceur D'un Astre"
2016 : "Sepelitur Alleluia"
2019 : "La Solitude Du Pieux Scélérat"
2021 : "Le Silence Déraisonnable Du Ciel"
2022 : "Tormentum Inanis MMXXII"
2023 : "Lorsque Les Coeurs S'assèchent"


Les chroniques


"Lorsque Les Coeurs S'assèchent"
Note : 16/20

Si l'on ne compte pas le réenregistrement de "L'Oppression Du Rien" sorti l'année dernière sous le nom " Tormentum Inanis MMXXII", c'est son septième album que le projet Ars Moriendi mené par Arsonist nous amène cette fois avec "Lorsque Les Coeurs S'assèchent". Et si la musique de ce one man-band est généralement étiqueté faute de mieux comme black metal atmosphérique et progressif, on se rend vite compte à son écoute que c'est assez réducteur.

Ars Moriendi a toujours développé un univers très singulier, utilisant le black metal comme une base mais emmenant cette musique bien loin de ses origines et lui attribuant une personnalité on ne peut plus marquée. Cela passe par des morceaux longs qui vont fréquemment chatouiller les dix ou douze minutes, des ambiances fortes qui prennent le temps de se développer, une puissance évocatrice et une dimension dramatique assez poussées. Bref, Ars Moriendi ne fait rien comme les autres et cela contribue évidemment à rendre ses albums plus exigeants et plus difficiles à approcher que l'album de black metal moyen. C'est d'ailleurs en acoustique que le morceau-titre ouvre l'album avec des mélodies mélancoliques, torturées et soutenues par un chant clair qui m'a rappelé les atmosphère cotonneuses développées par Tiamat sur "A Deeper Kind Of Slumber", c'est dire si le black metal classique est loin ! Un black metal qui finit tout de même par revenir avec les blasts de rigueur et des riffs forcément plus froids et plus noirs, la mélancolie laissant temporairement place à quelque chose de plus dur et de plus désespéré. Une fois de plus, Ars Moriendi nous fait entendre sa maîtrise des contrastes et brise les barrières et les codes pour exprimer ce qui lui pèse sur l'estomac. Sa musique est faite de nuances et si l'agressivité et la violence inhérentes au black metal sont bien présentes, elles sont mises au service de l'ensemble et servent à exprimer des émotions bien précises. Ars Moriendi ne s'embarrasse pas d'artifices et propose pourtant une musique bien plus riche et profondes que celle de ses collègues de scène, ce qui ne plaira évidemment pas aux puristes une fois de plus.

Mêmes contrastes sur "Quand Tout Est Bruit, Fureur Et Haine" qui fait entendre une finesse et une sensibilité qui peut vaguement évoquer Alceste en première partie de morceau, avant là aussi d'invoquer la violence et la froideur du black metal par la suite. Les sonorités presque trip hop qui débarquent au milieu de "Voyage Céleste" mélangées à ce son chant clair grave et presque suave accentue encore le lien avec le Tiamat entendu sur "A Deeper Kind Of Slumber". Le contraste avec la violence que déploie d'entrée de jeu "Le Ver Dans Le Fruit" est d'autant plus marqué ! Un morceau qui renoue quant à lui avec les grandes heures du black metal atmosphérique des années 90 avec plus de claviers pour des ambiances dramatiques et épiques du plus bel effet. "Nous Sommes Passés" pousse l'utilisation des sonorités électroniques encore plus loin et développe un certain groove froid assez surprenant mais réussi. Le morceau reste froid malgré ça et dégage une ambiance désabusée et donne l'impression de contempler sa propre fin. "Le Blasphémateur" qui clôt l'album avec ses douze minutes fait une sorte de synthèse que tout ce qu'a expérimenté ce nouvel album et passe d'une ambiance à l'autre avec une certaine maîtrise. La finesse ne trouve pas seulement dans les mélodies, on la sent dans l'écriture aussi et le travail qu'à demandé tout ça saute aux oreilles. Quelques rayons de lumière arrivent donc à percer au milieu de ces mélodies empreintes de noirceur, de mélancolie et qui font régulièrement chuter la température. Sur un plan plus technique, on sent un net progrès en termes de production par rapport aux précédents albums, "Lorsque Les Coeurs S'assèchent" bénéficiant d'un son plus propre et plus puissant tout en restant suffisamment fin et dynamique pour entendre tous les instruments.

L'approche ouverte et portée sur les émotions d'Ars Moriendi ne plaira clairement pas à tout le monde, et certainement pas aux puristes du black metal. Pour les autres, il y a sur "Lorsque Les Coeurs S'assèchent" de quoi se laisser embarquer dans un voyage introspectif aux allures de montagnes russes qui laissent donc beaucoup de place aux émotions.


Murderworks
Octobre 2023




"La Solitude Du Pieux Scélérat"
Note : 15/20

Seul maître à bord d’Ars Moriendi, Arsonist nous livre ici son cinquième album, "La Solitude Du Pieux Scélérat". Pour situer, disons que sa musique est à cheval entre le dark metal et le black atmosphérique, donc pas vraiment destinée aux bourrins de première.

  Les morceaux sont pour la plupart très longs, avoisinant souvent les huit ou dix minutes, ce qui est peu surprenant pour un groupe mettant l’accent sur les ambiances. Ce sont donc les treize minutes du morceau éponyme qui nous accueillent et il prend le temps de s’installer avec une longue intro avant de débouler sur un black metal aux claviers assez présents et plutôt mélodique dans l’ensemble. L’agression brute et la haine débridée n’ont pas leur place chez Ars Moriendi et si les blasts sont bien présents, ils ne servent qu’à appuyer les ambiances les plus violentes. Quelques passages acoustiques et atmosphériques viennent donner un petit côté médiéval pas déplaisant qui nous rappelle ce que certains groupes de black faisaient encore dans les années 90 et qui a tendance à se perdre de nos jours au milieu des groupes orthodoxes ou brutaux. "Rien Qu'un Songe" prend un malin plaisir à contredire ce que je viens d'écrire en balançant des riffs très death metal et malsains en entame. Bon, le dark /black reprend bien vite ses droits et les ambiances plus mélancoliques reviennent à la charge pour remettre un peu de mélodie là-dedans. Du chant féminin et masculin clair viennent aussi faire quelques apparitions, mélangés à des passages presque narrés ou déclamés en français appuyant encore le côté mélancolique et introspectif de la musique d'Ars Moriendi. Globalement, ce dark / black est évidemment assez froid dans ses ambiances, la mélancolie est omniprésente et le chant est plus arraché et guttural que hurlé renforçant l'impression que l'on a face à nous une âme plus torturée que haineuse. Pour ce qui est de la production, le son est assez sec et garde un minimum de crasse et de tranchant sur les guitares tout en laissant une bonne place à une basse bien ronde pour un son global ne collant pas vraiment avec les standards du genre mais plutôt adapté à "La Solitude Du Pieux Scélérat".

Le fait de ne pas entrer dans les carcans du genre pourrait d'ailleurs être appliqué à la musique d'Ars Moriendi en général puisque Arsonist n'en fait qu'à sa tête et livre la musique qu'il a en lui sans chercher à respecter quelque tradition que ce soit. Les puristes feront la gueule, ceux cherchant un groupe ou un musicien honnête proposant une musique personnelle seront ravis. Ars Moriendi a certes ses influences mais elles sont parfaitement digérées et difficiles à discerner, les six morceaux ont une personnalité bien marquée faisant de ce nouvel album une preuve supplémentaire de la sincérité de la démarche d'Arsonist. En tout cas, ces cinquante-deux minutes sont très variées et malgré la longueur des morceaux, Ars Moriendi trouve toujours le moyen de nous tenir avec ses ambiances puissantes et les émotions qui suintent de chaque mélodie. Une approche du black metal qui est, pour le coup, pas orthodoxe du tout et qui permet au groupe de se démarquer facilement et de proposer des albums qui n'entrent dans aucune case, Pas vraiment le meilleur moyen de vendre des palettes de CDs ou de vinyls certes, mais une démarche artistique on ne peut plus respectable. Encore une fois, les puristes risquent de déchanter mais je doute de toute façon qu'Arsonist s'adresse à eux. La pochette a d'ailleurs le mérite d'annoncer assez clairement ce qui vous attend sur ce nouvel album, un froid mordant, une mélancolie omniprésente, l'introspection d'une âme torturée et solitaire. Cette chronique décevra sûrement ceux qui s'attendaient à du name-dropping pour situer la bête mais comme je le disais plus haut, la musique d'Ars Moriendi est assez personnelle pour ne pas pouvoir pointer d'influences particulières.

Un nouvel album qui confirme qu'Ars Moriendi se fout d'entrer dans une quelconque case et préfère créer quelque chose de personnel. "La Solitude Du Pieux Scélérat" s'adresse à ceux qui aiment leur dark / black mélodique et mélancolique avec un côté aventureux.


Murderworks
Juillet 2019




"Sepelitur Alleluia"
Note : 10/20

Une fois n'est pas coutume, voilà une formation française née en 2001 dont je découvre seulement l'existence ! Et pourtant, ce one-man band a déjà sorti 3 albums et pas moins de 6 démos... Aujourd'hui, Ars Moriendi nous propose son nouvel album intitulé "Sepelitur Alleluia" bénéficiant d'un artwork black metal très teinté 90's. Pour autant, je ne suis pas certain de savoir à quoi m'attendre, mais l'expérience du groupe aidant, je m'avoue assez curieux du résultat. Alors, ai-je là un petit bijou insoupçonné entre les mains ? Ars Moriendi va-t-il devenir mon nouveau groupe référence au sein de la scène française actuelle ? Réponse dans ces quelques lignes bien entendu...

Tout commence avec "Sepeliture" et son intro à tendance ecclésiastique agrémentée de chœurs et d'orgue. L'arrivée du chant clair masculin, murmuré, n'est par contre pas du meilleur effet... Le titre enchaîne ensuite sur un black metal assez énergique mis en valeur par un chant black metal rauque et malsain. Le son, quant à lui, est plutôt honnête, très axé sur ce qui se faisait à la fin des années 90 ou au début des années 2000. Malheureusement, la guitare est pour moi un peu trop en retrait, laissant certes le champ libre à la basse et à la batterie, mais cela fait quelque peu perdre le fil du morceau alternant passages mid-tempo et d'autres plus rapides. L'impression d'énergie du début va quant à elle s'atténuer au fil du morceau long de presque 12 minutes... Les changements de rythme et d'atmosphère sont fréquents mais il manque je trouve un fil conducteur pour nous emmener au cœur de l'univers torturé d'Ars Moriendi. En fait, le titre dans son ensemble semble assez hétérogène, impression renforcée par le son et le déséquilibre entre les différents instruments. On a ainsi affaire à une espèce hybride de heavy black metal qui se cherche, ce qui est par moments assez dérangeant...

Le morceau suivant s'intitule "Ecce Homo" et vient confirmer mon sentiment premier. Le début est assez énergique, mais la suite est plus bancale avec un duo de voix black et death quelque peu suranné et une basse progressive omniprésente qui fait que l'ensemble a tendance à m'évoquer les premiers albums de Furia ou même Garwall. Ainsi, la technique est au rendez-vous, mais tout cela manque cruellement d'homogénéité, à l'image de l'arrivée du passage atmosphérique et jazzy très orienté trip-hop qui se pose là un peu comme un cheveu sur la soupe. Et pourtant, c'est probablement le passage qui fonctionne le mieux de tout le morceau, c'est dire ! Sûrement le moment le plus mature, qui plus est, construit intelligemment, même si l'arrivée des cuivres était attendue de manière assez évidente. A l'image de son nom, "A La Vermine" se veut plus sale et noir, mais les travers d'Ars Moriendi reviennent vite au galop avec un riff principal un peu éculé et une basse qui semble encore faire bande à part avec son jeu résolument progressif qui se marie difficilement avec le chant en français bien crade rappelant parfois Famine de Peste Noire. Et même si certains riffs essayent d'apporter une touche de modernité, cela s'intègre de manière plutôt étrange dans l'ensemble qui manque donc pour moi de cohérence.

Place maintenant à "Je Vois Des Morts" qui me fera systématiquement penser au film Le Sixième Sens avec sa fameuse réplique "Je vois des gens qui sont morts". Difficile alors de rester sérieux à l'écoute du titre... Et pourtant, l'intro atmosphérique est plutôt intéressante, de même que la montée en puissance et l'arrivée de la guitare solo du meilleur effet. Malheureusement, le morceau en lui-même s'avère plutôt poussif et le refrain en français dans le texte s'avère assez indigeste et rapidement rébarbatif. Autant le chant black du début était plutôt agréable, autant ce côté vomi / parlé n'est pas du meilleur effet car très cliché par trop d'aspects ! Mais étonnamment, la facette trip-hop et jazzy va faire son retour pour notre plus grand bonheur, ce qui est un comble, n'est-ce pas ? On va terminer l'écoute de ce "Sepelitur Alleluia" avec le dernier titre, "Fléau Français", dont la longueur dépasse les 18 minutes... Après une nouvelle intro atmosphérique, on enchaîne sur un morceau une nouvelle fois à tendance progressive et mid-tempo. On est décidément bien loin du black metal 90's imaginé lors de la découverte de l'artwork... Malgré une exécution de qualité, c'est la construction du morceau en lui-même qui pose souvent problème, et une fois encore, c'est l'arrivée du passage le moins metal qui va sauver le titre du naufrage, ce qui soulève à mon humble avis nombre d'interrogations !

Ars Moriendi nous offre donc là un album plutôt inégal, autant du point de vue du son que du point de vue des morceaux en eux-mêmes, et ce tant au niveau de la construction que du style. En effet, on a l'impression que le one-man band se cherche, entre black metal, metal progressif et trip-hop... Je ne remets pas en doute la qualité technique de l'album, avec surtout des lignes de basse de grande qualité et une guitare solo plutôt efficace. Mais on l'impression parfois que chaque instrument joue dans son coin, chaque partition ne s'intégrant pas forcément à celle des autres... Ainsi, face à un certain manque de maturité dans la construction des morceaux, c'est dans les passages atmosphériques et résolument orientés trip-hop qu'Ars Moriendi fait le plus preuve de cohérence. De là imaginer que la formation n'a peut-être pas encore trouvé sa voie...


Carcharoth
Novembre 2016


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/arsmorie