Bethlehem. Groupe mythique maniant comme personne la plus impure des noirceurs. Créé
en 1991 par Jürgen Bartsch (basse, ex-claviériste et guitariste, ex-Deinonychus,
ex-Morbid Vision), le groupe s’est retrouvé en pause en 2015 avant de revenir la même
année. Un line-up très changeant, mais aujourd’hui stabilisé autour de cette même volonté
de mêler des éléments de beaucoup de styles. Au chant on retrouve Onielar (Darkened
Nocturn Slaughtercult) tandis que la guitare est tenue par Karzov (Bog Morok,
Cerebrium, Morguenstern, Shexna) et le poste de batteur revient à Florian “Torturer”
Klein (Cadaver Disposal, Goat Torment, IT, Mor Dagor). Velnias (Darkened Nocturn
Slaughtercult) se joint aux Allemands en tant que second guitariste sur scène, mais
aujourd’hui c’est "Lebe Dich Leer" que le quartet nous présente. Laissez les ténèbres vous
envahir.
L’album démarre par une plongée dans l’ombre avec "Verdaut In Klaffenden Mäulern", un titre
qui annonce d’emblée l’univers du groupe pour les non-initiés. Un black metal aux accents
mystiques, dérangeants, et la voix de banshee d’Onielar, en allemand dans le texte. La
rythmique devient lourde, la guitare lead plus perçante, l’ambiance se calme, repart… Le
groupe ne nous laisse aucun répit. "Niemals Mehr Leben" débute par une guitare calme mais
effrayante, et rapidement c’est un son tranchant qui prend la suite, en exploitant pleinement
le potentiel des guitares huit cordes. Et c’est bel et bien la fureur des Allemands qui mène ce
morceau, qui explose de temps à autres, toujours accompagné de ces hurlements à glacer
le sang. On continue avec "Ich weiß Ich Bin Keins" et son introduction à la basse qui amène
sur les murmures de la chanteuse, qui sont presque plus effrayants la deuxième fois que
l’on écoute ce morceau. Mêlant son clair et rythmiques saturées, Bethlehem crée un
contraste impressionnant et très prenant que l’on est pas près d’oublier.
Vous pensiez connaître la folie ? Eh bien "Wo Alte Spinnen Brüten" va vous prouver que non.
Si le son lourd qui intervient en premier lieu fait penser à un doom / death, c’est bel et bien la
recette sombre du groupe qui prend la suite, mêlant avec un naturel impressionnant toutes
leurs influences, comme sur "Dämonisch Im Ersten Blitz". N’hésitant pas à abuser de
changements de rythme, de pauses en tout genre et de tonalités différentes, ce morceau
est celui qui traduit le mieux la démence du groupe, et que l’on retrouve évidemment dans la
voix de la meneuse. Les influences doom de la formation ressortent à nouveau sur "An
Gestrandeten Sinnen", doublées de la puissance impie du black metal, qui prend une saveur
toute particulière. La lenteur leur permet de jouer le refrain sans saturation, soutenu par des
samples atmosphériques qui nous font découvrir un tout autre aspect de cette noirceur
assumée.
Si c’est la violence et la rapidité que vous aimez, alors "Ode An Die Obszöne Scheußlichkeit"
vous ravira, puisque c’est sur ces deux concepts que le morceau repose. Et n’ayez pas peur
de la rupture, puisqu’elle n’amène qu’à plus de rage. On reprend sur l’introduction calme et
inquiétante de "Aberwitzige Infraschall-Ritualistik", qui nous projette finalement sur un mur de
son. Impossible de ne pas accrocher à ces riffs saccadés et cette double pédale
impétueuse. Dernier titre de l’album, "Bartzitter Flumgerenne" est l’incarnation même de la
frénésie du groupe, puisqu’en moins de trois minutes, on passe d’un riff ultra rapide à une
guitare douce, et ainsi de suite. Le titre est le plus court, mais surtout pas le moins intense,
le final le prouvera.
Avec "Lebe Dich Leer", Bethlehem signe ici un chef d’oeuvre à la fois inspiré et peu
accessible. Mêlant avec une folie incomparable des styles complémentaires, les Allemands
nous avaient habitués à une fureur noire et cet album ne fait pas exception à la règle. Les
amateurs de black metal y trouveront autant leur compte que ceux qui préfèrent le doom ou
le death progressif. Pour les avoir vus sur scène il y a peu, je peux vous assurer que l’on ne
ressort pas indemne d’une telle performance...
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