Le groupe
Biographie :

Bliss Of Flesh se situe au croisement des chapelles death et black metal. Destruction et désespoir hantent une musique dont l’interprétation magistrale révèle une décennie de pratique intensive. Après avoir exploré les bas-fonds de l'underground metal, commis quelques splits remarqués avec Bloodhammer ou Annihilation et enchaîné les tournées européennes, le groupe rejoint le label allemand Twilight Vertrieb pour son premier album, "Emaciated Deity". Les lignes mélodiques dissonantes et lugubres, la puissance du son, entre sophistication et agressivité jouissive, la volonté d’en découdre : l’influence de Behemoth ou Belphegor est palpable, le rendu extrême et diabolique. C'est sur le label Non Serviam Records que sort le deuxième album, "Beati Pauperes Spiritu", à l'automne 2013. "Empyrean" sort à l'été 2017 chez Listenable Records. "Tyrant" sort en Octobre 2020.

Discographie :

2001 : "Frozen Ashes Of Labdacides" (Démo)
2005 : "Lethal Ceremonies" (Démo)
2006 : "Todtentanz" (EP)
2007 : Split CD avec Bloodhammer
2009 : "Emaciated Deity"
2013 : "Beati Pauperes Spiritu"
2017 : "Empyrean"
2020 : "Tyrant"


Les chroniques


"Tyrant"
Note : 17/20

Après avoir conclu sa trilogie sur la "Divine Comédie" de Dante, les Français de Bliss Of Flesh reviennent avec "Tyrant" basé cette fois sur le "Discours de la servitude volontaire" d'Etienne de la Boétie. Il y soutenait que la tyrannie ne pouvait se mettre en place et perdurer que parce que c'est inconsciemment ce que recherchaient les peuples. La liberté a un prix et nécessite de nombreux efforts, dialogues et compromis qu'il est plus facile de décharger sur une figure autoritaire.

Mais si cela ne fait pas de mal de réfléchir un peu, revenons-en tout de même à la musique puisque c'est ce qui nous intéresse en premier lieu en ces pages numériques, surtout qu'en musique aussi Bliss Of Flesh sait y faire. Si le groupe est toujours resté dans une style que l'on pourrait vaguement étiqueter black / death il en a fortement développé la profondeur en y amenant des sonorités supplémentaires et en appuyant les ambiances par de multiples moyens tels des choeurs quasiment liturgiques par moments sur son précédent méfait "Empyrean". C'est "Serve" qui nous sert de comité d'accueil et qui montre sans équivoque que le groupe n'a pas envie de se calmer. Des blasts furieux nous tombent dessus d'entrée de jeu sans la moindre intro et le groupe ne perd pas de temps en palabres. Le contraste créé entre les riffs très vicieux et sales d'un côté et les mélodies assez dramatiques et mélancoliques de l'autre contribuent à poser une ambiance prenante une fois de plus. Bliss Of Flesh puise évidemment ses racines dans le black et le death mais explose les codes de ces deux styles très balisés pour créer un univers personnel et émotionnellement fort. Les mélodies sont superbes et en un seul morceau le groupe passe de la violence brute à des mélodies en son clair surmontées d'un violon et de choeurs qui lui donnent des allures dramatiques une fois de plus. Une inspiration musique classique se fait entendre dans certaines mélodies ou arrangements et certains passages m'ont fait ressentir quelque chose de similaire à ce que fait Vladimir Cochet dans Mirrorthrone, ce qui est probablement dû au choc des univers classique / metal extrême et à la violence déchaînée dont ce dernier fait preuve lui aussi.

Si je pointe certaines références, c'est surtout pour essayer de donner une idée de la bête car ceux qui suivent Bliss Of Flesh savent très bien que le groupe a largement digéré ses influences et qu'il a depuis longtemps tracé son propre chemin. Notons d'ailleurs que ce nouvel album ne fait pas semblant de taper dans le concept puisqu'il est conçu comme un seul bloc de quarante-cinq minutes découpé en plusieurs pistes, vous aurez donc compris que tous les morceaux s'enchaînent sans le moindre blanc et qu'il faut donc l'écouter d'une traite. Cette fois, j'ai l'impression que la violence revient un peu sur le devant de la scène avec des sonorités black metal présentes en grande majorité, concept oblige. Comme je le disais, les mélodies sont toujours bien là et une fois de plus poignantes et chargées émotionnellement. Quant aux passages brutaux, ils sont redevenus bien teigneux là où le groupe posait quelque chose d'un peu plus lourd et un peu moins frontal sur ses deux précédents albums. "Tyrant" se fait donc assez intense et il n'y a bien que l'instrumental acoustique "Hexis" pour calmer un peu les ardeurs d'un Bliss Of Flesh cette fois bien belliqueux. "Panem" propose lui aussi quelque chose de plus lourd mais les riffs restent bien méchants et les gros coups de double grosse caisse font bien mal. Malgré le fait que ce nouvel album soit fait d'un bloc, il reste suffisamment riche et varié pour que les quarante-cinq minutes passent toutes seules. Pas une seule fois le sentiment de répétition ne se fait sentir, encore moins l'ennui et Bliss Of Flesh nous balance avec "Tyrant" un excellent album une fois de plus. Tout y est : l'agressivité, la mélodie, les ambiances fortes, la violence brute, le mid-tempo brise-nuque... Le son qui, lui, a été concoté au studio Vamacara, lui va d'ailleurs comme un gant et évite les pièges des productions fades habituelles.

Voilà un groupe qui trouve toujours un moyen de nous surprendre tout en restant dans la voie qu'il s'est lui-même tracée ! Bliss Of Flesh maîtrise son art et réalise pour l'instant un parcours sans faute , "Tyrant" mérite donc clairement que vous lui accordiez de votre temps et prouve une fois de plus que la scène extrême française n'a plus rien à envier à qui que ce soit.


Murderworks
Novembre 2020




"Empyrean"
Note : 17/20

Bliss Of Glesh est de retour avec "Empyrean" qui succède au très bon "Beati Pauperes Spiritu" sorti en 2013. Pas trop de soucis à se faire pour un groupe qui jusqu'à maintenant n'a jamais déçu et a réussi à progresser à chaque nouvel album.

C'est évidemment encore une fois le cas avec "Empyrean", on monte encore d'un cran et le metal extrême de Bliss Of Flesh à cheval entre le black et le death se révèle toujours aussi efficace et habité. Ce sont les sept minutes d'"Ascension" qui ouvrent le bal sur ce nouvel album et le moins que l'on puisse dire c'est que c'est une entrée en matière efficace ! On commence sur des riffs puissants et lourds soutenus par de gros coups de double et un son à décorner les bœufs avant que les blasts ne fassent leur apparition avec en fond une mélodie et des chœurs aussi mélancoliques que dissonants. Ceux qui connaissent déjà les deux précédents albums savent que le groupe a dès ses débuts bâti un univers qui lui est propre et c'est toujours dans son monde qu'il évolue aujourd'hui, Bliss Of Flesh se fout de ce qui se fait à côté et, sans expérimenter non plus à tout va, propose un black / death qui fait sa route dans son coin. Si la mélodie se fait une bonne place, la violence n'a pas disparu pour autant, en témoigne "Penitent" qui rue dans les brancards et défonce tout sur son passage. Globalement, ce nouvel album suit la voie tracée par son prédécesseur avec une présence plus prononcée des chœurs très religieux dans l'esprit. Les excellents soli de guitare auxquels le groupe nous a habitués sont encore de la partie cette fois et ça fait toujours plaisir à entendre, surtout que la plupart des groupes de cette scène ne prennent pas forcément la peine d'en placer.

Pas de changements drastiques de formule donc mais une étape supplémentaire franchie, Bliss Of Flesh développe tranquillement sa personnalité et progresse à chaque album. "Empyrean" reprend donc les choses là où "Beati Pauperes Spiritu" les avait laissées et enrichit encore l'univers que le groupe s'est constitué depuis "Emaciated Deity". Un black / death personnel, brutal et mélodique habité par une ambiance solennelle. Une fois de plus, le groupe propose un metal extrême aussi efficace et direct que riche et profond, le genre d'album fourbe que vous croyez avoir saisi rapidement et qui continue à vous dévoiler de nouvelles choses à chaque écoute. Un équilibre loin d'être évident à atteindre mais que Bliss Of Flesh arrive naturellement à instaurer sur chacun de ses albums, la preuve que les influences du groupe sont vastes et que si son propos n'est pas de réinventer la roue, il ne s'impose aucune barrière pour autant. La qualité est au rendez vous et il ne faut pas bien longtemps à "Empyrean" pour vous retourner le crâne et vous maltraiter les tympans, la machine de guerre est bien huilée et les ambiances ajoutent une puissance évocatrice qui rend les morceaux encore plus percutants. L'authenticité de la chose est incontestable, le groupe est loin de faire de l'esbroufe contrairement à certains groupes de black qui en font des tonnes. Bliss Of Flesh ne fait pas de vagues inutiles, le groupe nous balance sa musique et n'y laisse rien au hasard.

Pour faire simple, si la musique du groupe vous parlait jusqu'à maintenant, il n'y a aucune raison pour que cet album change la donne, "Empyrean" est largement au niveau de ses prédécesseurs et les dépasse même d'une bonne tête. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore Bliss Of Flesh, je n'ai qu'une question à poser : vous attendez quoi ?


Murderworks
Janvier 2018




"Beati Pauperes Spiritu"
Note : 16/20

Après une bonne surprise en 2009 avec "Emaciated Deity", on commençait à se demander ce que devenait Bliss of flesh, on a la réponse avec enfin un deuxième album nommé "Beati Pauperes Spiritu". Restait à savoir ce que ça allait donner après un changement de guitariste et une absence aussi longue ! L'écoute de ce nouvel album confirme que le groupe n'a rien perdu de son inspiration et qu'on a droit à une légère évolution en bonus, pas de quoi dépayser les amateurs d'"Emaciated Deity" mais suffisamment pour se reprendre une baffe.

Parce qu'en effet, le style mis en place par Bliss Of Flesh sur son premier album est toujours là, ce mélange de black / death, d'ambiances froides et malsaines et de blasts rageurs est encore d'actualité. C'est la méthode qui a quelque peu changé cette fois, le groupe ayant préféré la jouer un peu plus fine pour cette fois. La brutalité s'exprime ici d'une façon moins frontale, moins directe, laissant par la même occasion un peu plus de place à la mélodie. Pour le reste on est en terrain connu, Bliss Of Flesh a toujours ce talent de vous écraser la tronche à coups de masses et de vous filer des frissons derrière avec une mélodie bien froide ou un solo mélodique de derrière les fagots ! On note même quelques notes de violoncelle judicieusement placées dans "On The Paths To Expiation" et au début de "Forgotten Epitaphs", qui constitue d'ailleurs le tour de force de l'album avec ses 8 minutes dévastatrices et mélodiques ! La maîtrise mélodique, les soli inspirés, l'apport du violoncelle, tout ça fait que la musique de Bliss Of Flesh a une âme et que si certains éléments peuvent rappeler d'autres groupes il reste bien difficile finalement de les comparer franchement à d'autres membres de la scène extrême.

Je dis ça mais la musique du groupe avait déjà une patte bien affirmée sur le premier album, patte qu'on retrouve sur ce nouvel opus comme je le disais avec quelques apports. Bliss Of Flesh a l'art de mixer l'agressivité du death, la froideur du black avec des éléments plus "accrocheurs" et mélodiques. Le tout donne quelque chose qui pourrait rappeler Belphegor dans l'esprit, et uniquement dans l'esprit puisque à l'écoute la comparaison est déjà moins pertinente. Mais c'est le fait que les deux groupes arrivent à nous embarquer vite fait avec des morceaux agressivement mélodiques qui me pousse à rapprocher la démarche. Toutefois le rapprochement s'arrête là, la musique de Bliss Of Flesh est bien plus riche, travaillée et profonde que celle de Belphegor (même si j'apprécie beaucoup ces derniers aussi). Les deux groupes mixent tout les deux aussi bien la violence et la mélodie, mais la musique de Bliss Of Flesh est moins unidimensionnelle et offre une palette d'ambiances bien plus large. Et ça passe aussi par le chant de Nicurat qui multiplie les voix avec une facilité déconcertante, voix black, growls profonds, chant crié un peu plus clair, on ne sait jamais à quelle sauce on va être mangé ! Niveau prod', on trouve enfin un groupe de metal extrême qui sait rentrer dans le lard sans se retrouver avec un son en plastique, le groupe est passé par le Midnight Studio pour l'enregistrement et par le Drudenhaus Studio pour le mixage, et ça donne quelque chose de brut, d'organique avec une petite couche de gras qui va bien. C'est rassurant de voir que d'autres comprennent qu'un son en plastique amoindri méchamment la puissance de frappe, et que mettre des blasts pour faire du bourrin avec une batterie qui sonne comme un baril de lessive c'est juste ridicule.

Nouvel album qui montre donc une évolution vers quelque chose d'un poil plus aéré, mais toujours brutal, malsain et mélodique. Un mélange efficace qui avait déjà fait ses preuves sur "Emaciated Deity" et qui confirme le gros potentiel du groupe. Pour ceux qui ne jure que par la scène internationale il serait peut être temps de se pencher sur les groupes français, Bliss Of Flesh fait indéniablement partie de ceux qui pourraient vous mettre une bonne grosse baffe !


Murderworks
Décembre 2013




"Emaciated Deity"
Note : 15/20

Il y a des jours où on se dit qu'il n'y a plus beaucoup de risques qu'on soit surpris dans un style souvent volontairement balisé comme le black metal. En farfouillant dans les multiples groupes, il est quand même relativement fréquent de tomber sur de pâles copies de Darkthrone. Et pourtant il y a quelques irréductibles (Gaulois en plus pour le coup) qui résistent et qui savent offrir une musique personnelle et de qualité. Bliss Of Flesh en fait partie et nous délivre ici une galette Synthol, à savoir donc qu'elle fait du bien là où ça fait mal. "Emaciated Deity" est donc le premier véritable album de Bliss Of Flesh après un EP et deux splits et on sent que l'on n'a pas affaire à des débutants.

Premier constat c'est très bien fait, tout est en place, le son est bon à la fois clair et précis en gardant un minimum de puissance nécessaire au décrassage de cages à miel. Parce que oui ça ramone quand même pas mal, c'est pas du metal de fillettes qui nous est offert ici, ça tape fort et ça tape dur. Le mélange du black avec quelques gros riffs tout droit sortis du death fait des étincelles et va à coup sûr en laisser quelques uns sur le carreau. Mais le groupe ne nous offre pas que ça bien au contraire, il parsème tout l'album de passages mélodiques toujours très justes et placés là où il faut quand il faut. Et attention, pas de sucreries ici, les mélodies en question quand elles ne transpirent pas la mélancolie sont bien dissonantes comme il faut. Le tout offre une mixture qui donne l'avantage à l'efficacité sans pour autant être simpliste, idéal pour s'en prendre plein les esgourdes.

Précisons aussi qu'a l'origine le vocaliste était le très bon Terrorizt et qu'il a été remplacé par Necurat (ex-Latrodectus). Et force est de constater que le groupe n'y a pas perdu au change, le bougre s'en sort très bien et varie les timbres de voix en passant de la voix black au growl limite death, sans oublier quelques passages scandés et d'autres encore qui ne sont pas sans rappeler l'ami Attila. Une belle performance qui permet de ne pas plomber les compos par un chant monocorde comme cela arrive souvent dans ce style de metal. Les autres membres du groupe ne sont d'ailleurs pas en reste, la batterie est bien mise en avant et varie elle aussi les plaisirs, malgré un rendu peut être un peu trop synthétique qui m'a presque fait croire au début à une boite à rythmes, surtout pendant les roulements. Les guitares apportent aussi leurs lot de surprises, comme l'intrusion de temps en temps de mini soli mélodiques ou ces fameux gros riffs de bûcherons évoqués plus haut.

Avec le recul on se rend compte que l'album tient bien la distance et qu'il se réécoute très souvent sans problèmes, on ne s'en lasse pas et ça aussi c'est suffisament rare pour être souligné. Un très bon premier album donc pour Bliss Of Flesh qui ouvre de belles perspectives pour la suite en espérant que le groupe puisse défendre l'engin en live comme il se doit et poursuivre sa route. Il est certain que si ces gars continuent sur ce chemin la suite des hostilités risque de faire très mal. Pour tous les amateurs du style, les morceaux sur leur MySpace donnent une bonne idée générale de l'album. Je ne peux donc que vous conseiller d'aller y jeter une oreille (voir les deux c'est en stéréo).


Murderworks
Juillet 2009


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/blissofflesh