Le groupe
Biographie :

Ferriterium est un one-man band de black metal formé en 2011 à l'initiative de Raido, guitariste de Karne, Malevolentia et fondateur de Heimsgard. Après un premier album, "L'Heure Du Grand Passage", sorti en Mars 2016 chez Gaulhammer Production, "Le Dernier Livre" sort en Avril 2019 chez Epictural Production, suivi de "Calvaire" en Janvier 2021.

Discographie :

2016 : "L'Heure Du Grand Passage"
2019 : "Le Dernier Livre"
2021 : "Calvaire"


Les chroniques


"Calvaire"
Note : 17/20

Ferriterium nous propose un digne successeur à son précédent opus "Le Dernier Livre", et celui-ci s’intitule tout simplement "Calvaire". Composé de 4 titres qui avoisinent tous plus ou moins les 10 minutes, cet album, comme l’œuvre précédente, est un réservoir d’ondes négatives, de désespoir et de noirceur. Il est vrai que, lorsque l’on parle de black metal, énoncer un tel constat relève du pléonasme mais avec la multitude de productions guignolesques qui sortent actuellement et qui viennent ternir l’imagerie puissante de ce style né dans le sang et le feu, il est de bon ton d’annoncer la couleur lorsque l’on estime qu’un disque est bon. Justement, qu’est ce qui fait un bon disque de black metal en 2021 ? C’est une vaste question ça, hein ? Eh bien selon moi un bon disque doit répondre à un critère de base qui est celui de la sincérité. Un groupe qui délivre un black sincère ça s’entend, qu’il officie dans le necrosound ou le post-black léché, l’intention qui se cache derrière la musique transparait en son sein. "Calvaire" porte avec lui l’essence du black, à savoir cette profondeur sonore mêlé à un chaos maîtrisé et un discours investi.

Dès les premières notes, la production impeccable fournit un plaisir d’écoute immédiat, et même si cet équilibre des éléments facilite la compréhension de chaque instrument, chant y compris, il persiste cette densité propre au genre, qui laisse entendre, par la superposition des éléments, une myriade de sons, d’illusions auditives qui impliquent directement l’auditeur dans l’écoute. L’apostasie s’engage avec une virulence telle que les images qui en découlent s’imposent comme une évidence : lieux saints, feu, noirceur, cendres, les paroles blasphématoires et assumées par un chant rageur et hargneux qui ne laisse jamais sa haine de côté tout au long du disque offrent à l’auditeur de quoi façonner sa propre interprétation obscure. Ferriterium n’hésite pas à articuler sa musique autours de peu de riffs, les guitares et la basse ne produisent que peu de changements et cela a comme effet de générer un état de transe, ajouté à la puissance portée par les instruments, tel un tourbillon de tourments. Les mélodies en trémolos sont vives et incisives, avec ces notes qui parfois se détachent du schéma mélodique pour ajouter du malaise. L’apostasie illustre parfaitement le sens de la mise en scène sonore, telle une histoire, la musique nous porte loin du monde matériel, grâce à un agencement structurel qui laisse à chaque partie le temps de se développer et de porter son message jusqu’au bout.

"La Proie Du Cloitre", deuxième track, possède une touche scandinave qui nous renvoie dans les années 90. Les harmonies dégagées par les guitares maintiennent la dramaturgie installée par le track précédent. Le drumming de Julien Helwin, élancé, moins centré sur le blast, avance inexorablement, ajoutant une fougue entrainante. Persistant dans cette sensation de fatalité, de destin inexorable, après quelques arpèges discrets qui ajoutent de la profondeur, le morceau se termine en apogée.

"L’Opéra De Géhenne" nous joue des tours en proposant une introduction qui induit une direction, alors que le groupe décide de prendre subitement le contrepied et sombrer à nouveau dans la violence musicale. Des passages plus plombés et mid-tempo viennent alourdir l’ensemble, ce qui crée un contraste saisissant avec les passages rapides. Il persiste également, comme sur les précédents titres, une forme de noblesse dans les ajustements mélodiques, chaque élément, intention de jeu se justifie, le disque regorge de mélodies riches et variées. Les différentes couches de guitares se complètent et modèlent des structures envoutantes. Les parties instrumentales permettent au chant de revenir dans la bataille de plus belle. Ce troisième track est peut-être celui qui se rapproche des éléments modernes actuels dans le black, de par l’ajout de beaucoup de moments émotionnels.

L’album se conclut sur "L’Apogée Du Martyr", mid-tempo assez lourd au départ, qui crée un effet de chape de plomb grâce à de nombreux moments atmosphériques, quelques petits côtés heavy aussi, et surtout grâce à ce chant plus possédé qu’à l’accoutumé. Ce dernier morceau est le plus élaboré, il comporte beaucoup plus de parties que les trois autres, lui conférant de ce fait une dimension progressive, pour un final en apothéose.

"Calvaire" est un disque qui conjugue à merveille les éléments du passé au travers d’une vision du black metal résolument actuelle. Riche de mélodies pessimistes, cet album dégage malgré tout une rage sans précédent, plongeant ainsi l’auditeur dans un univers désolé et désespéré porté par des mélodies mornes et désemparées. Un black metal pur, authentique et de grande classe. Le travail d’arrangement est admirable et permet à chaque titre de se développer pour mieux embarquer l’auditeur dans ce dédale de sensations macabres. Ferriterium excelle dans l’art de la mise en scène et possède aussi la capacité de conjuguer intelligemment de multiples éléments pour créer un black metal compact, efficace et nuancé. Encore une réussite !


Trrha'l
Juin 2021




"Le Dernier Livre"
Note : 17,5/20

Ce mois-ci, nous pouvons prétendre être gâtés car les sorties de black français s’enchaînent à un rythme effréné et sont toutes réellement de qualité. Après Saturnus Terrorism et son album "Pamphlet", le split Griffon / Darkenhöld qui sort le 31 Mai et dont quelques extraits prometteurs sont en écoute sur YouTeub (chro’ réalisée le 27 Mai, sans doute que le split sera sorti lorsque vous lirez ces lignes), une autre pépite est à l’honneur, "Le Dernier Livre" de Ferriterium.

Tout comme un bouquin, chaque track de ce skeud se décline en plusieurs chapitres, de 1 à 6. Le chant français est clairement distinct et nous pouvons donc écouter les paroles et nous délecter de ces textes pessimistes et truffés d’éléments symboliques. On constate donc une évolution notable par rapport au précédent opus dont les paroles sont en anglais, et ce, en dépit du fait que celui-ci s’intitule "L’heure Du Grand Passage". Pour ce grand cru 2019, nos blackeux frenchies ont donc quelque peu modifié leur approche du metal noir. L’évolution la plus flagrante se situe dans le chant, beaucoup moins trollesque que sur la précédente réalisation. Celui-ci se veut dorénavant plus viril, guerrier, hargneux, avec un petit côté psycho dépressif en prime. Très investi dans son art, le groupe a également gagné en technicité et en précision, on sent le besoin de réaliser un disque plus ambitieux que le précédent. Le drumming est carré et expressif, et forme avec la basse un socle rythmique solide. Très mélodique, ce disque reste néanmoins assez direct, avec de nombreuses parties en blast beat, sublimées par des riffs de guitare en trémolo typiques du style, qui façonnent un paysage sonore tout en profondeur. Certains moments atteignent une rare intensité comme la fin du "Chapitre 4". Grâce au visuel de la pochette, on se façonne des images d’inspiration médiévale, consolidées musicalement par des mélodies ingénieuses, très lyriques. Les titres prennent le temps de se développer, comme le "Chapitre 3" qui débute avec une intro punk, avant de s’engager dans un black melo', entre Sacramentum et Misþyrming, se situant de cette manière dans une démarche entre tradition et innovation. Il faut savoir que Ferriterium est le projet de deux membres de Karne, et de ce fait, les deux combos sont stylistiquement assez proches. "Le Dernier Livre" est comparable à "Symposium Of Torment" de Karne, autant dans la musique que le visuel. J’ai même l’impression qu’il y a plus de similitude entre ces deux disques qu’entre les deux productions de Ferriterium.

Quoi qu’il en soit, nous avons à faire à un très bon skeud de black mélodique. Le son est correct, les compositions sont efficaces, matures, et les musiciens maîtrisent parfaitement leurs instruments. Je considère la trajectoire entreprise par Ferriterium comme un croisement de ses influences passées avec un mode compositionnel qui se rapproche donc de Karne. "Le Dernier Livre" est un disque riche, truffé de petites subtilités, de parties frénétiques qui dégagent une atmosphère prenante, sombre et majestueuse. Quelques parties mid-tempo parviennent également à faire respirer la musique sans couper l’élan entrepris. Encore une perle noire récoltée en France, les nordiques n’ont qu’à bien se tenir !


Trrha'l
Mai 2019

Conclusion
Le site officiel : www.saturnusterrorism.bandcamp.com