Chaque fois que je suis tombé sur du Fetid Zombie, ma réaction était la même, du genre "Non mais c’est quoi ce bordel ?". Mark Riddick, l’illustrateur de pochette mondialement reconnu et chef de ce projet musical atypique, est un fan de metal et semble vouloir, à chaque sortie de son groupe, rendre hommage à toutes les facettes de son style préféré. Ainsi, un album du zombie qui pue va vous faire traverser différents genres, du heavy en mode vierge de fer, à des tourneries death old school en passant par des riffs thrash comme on en avait sur "Ride The Lightning", bref, le gars se fait plaisir et ça s’entend. Le truc avec l’ami Mark, c’est qu’il fait tout de manière instinctive, ses compositions semblent être le fruit de collages, alors du coup, le résultat est parfois hasardeux, mais aussi génial à d’autres moments. Il y a un côté épique et mélodique omniprésent, des passages longs et plus techniques ou des passages très macabres, bref, c’est le laboratoire des décibels. En 7 albums (avec celui-ci) et des tonnes de splits, ce projet musical irrégulier prouve par sa persévérance et son engagement que l’affaire est sérieuse, et ce n’est pas seulement le délire d’un mec, fan de metal et connu autrement dans le milieu, mais un véritable projet artistique dans lequel on trouve un véritable propos musical.

"Transmutations" contient tout ce qui fait le son de Fetid Zombie, on retrouve pléthore d’influences diverses allant du thrash, du death, du doom atmosphérique teinté de clavier comme sur le titre "Beyond Andromeda", ou encore des relents cold wave à le The Cure sur "Dreamless Sleep Awaits" qui, avec son chant féminin, nous embarque vers des univers peu explorés dans la discographie gargantuesque de ce one-man band américain. L’influence de Chuck Schuldiner s’entend régulièrement au sein des compositions qui flirtent telles des dévergondées avec tous les styles de metal possibles, mais respectent le critère de sonner très mid 80, début 90. En effet, en bon conservateur des écrits anciens, Fetid Zombie a toujours respecté son cahier des charges, à savoir, rester ancré dans le old school et creuser dans cette esthétique. Une fois de plus, le travail des guitares est exemplaire, notamment dans les solos, avec cette touche qui me fait énormément penser au Satriani de la période "Flying In A Blue Dream", à L’ami Schuldiner, mais aussi à Maiden, aux solos du Metallica des premiers albums, j’en passe et des meilleures.

Fidèle à ses habitudes, Mark Riddick joue tous les instruments et vu qu’il se fait ça peinard chez lui, il ne subit aucune pression, et ce confort est en partie responsable de l’irrégularité qualitative des productions de la formation. Souvent, c’est le manque de cohérence qui pêche un peu, c’est quelque chose que l’on peu éprouver à l’écoute de Fetid Zombie, c’est d’avoir le sentiment que les titres sont parfois décousus. "Transmutations" a réussi le pari de ne pas tomber dans le panneau et même si les 6 tracks présents dans ce disque s’engagent dans des structures progressives, le côté patchwork se fait moins ressentir ici que sur certaines précédentes réalisations. Ainsi, on entend un Fetid Zombie plus mûr, plus structuré en ce qui concerne le songwriting, mais pas que, puisque la production est elle aussi plus compacte et précise. Le son est mieux équilibré, mieux ordonné, le mix est globalement cohérent et plonge dans un climat bien sombre, plus dark qu’à l’accoutumée. S’il y a bien un élément qui démarque ce disque par rapport aux autres opus de ce projet, c’est cette direction artistique qui tend vers le doom / death. Fetid Zombie a toujours été ténébreux, il y a toujours des claviers mornes et angoissants, des riffs menaçants, des harmonies morbides mais là, cette ambiance funèbre n’est pas générée par des clichés musicaux, c’est de manière omniprésente qu’elle se développe, en toile de fond. Pour cet album, on a droit à moins de blast beats, de riff thrash virulents, de délires speed, tout cela au profit de tempos mediums, de guitares qui privilégient le climat et de moments musicaux qui s’étalent et prennent de l’espace.

Encore une fois, l’ami Riddick n’est pas Riddick-ule, loin de là, cette nouvelle incarnation de Fetid Zombie possède de nombreuses qualités et se démarque également sur pas mal de points par rapport aux précédentes réalisations. On sent que c’est la passion du metal qui anime ce monsieur, comme à son habitude, mais pour ce nouvel opus, il semble avoir agit avec plus de recul pour façonner un environnement musical plus concis et construit, c’est sans doute la période de crise sanitaire qui a eu un impact sur sa logique, ou pas. Bref, si vous ne connaissez pas Fetid Zombie, ce disque est un bon moyen de découvrir cet univers artistique sombre et épique, à mon avis, une des meilleures entrées possible pour se familiariser avec ce projet de toute une vie pour notre confrère métalleux dessinateur. Si vous aimez, allez creuser le reste de la discographie, ça vaut également le détour. Pour les habitués, vous vous en doutez, vous ne serez pas déçus !