Le groupe
Biographie :

Fleshgod Apocalypse est un groupe de death metal technique italien formé en Avril 2007 par Paolo Rossi (basse / chant), Francesco Paoli (chant), Cristiano Trionfera (guitare) et Francesco Struglia (batterie). Il enregistre sa première démo "Promo ‘07" au 16th Cellar Studio avec le producteur Stefano "Saul" Morabito, laquelle sort l’année suivante en split avec les Italiens de Septycal Gorge, Modus Delictis et Onirik. Le groupe signe ensuite chez Neurotic Records et tourne à travers l’Europe au début 2008 avec Behemoth, Origin, Dying Fetus, Hate Eternal, Suffocation, ou encore Napalm Death. Leur premier album, "Oracles", est enregistré en Mai 2008 et sort en 2009 chez Willowtip Records, après leur séparation d’avec Neurotic Records. Peu après, Tommaso Riccardi (guitare rythmique, voix) intègre le line-up en remplacement de Francesco Paoli, celui-ci occupant dès lors le poste de batteur laissé par Francesco Struglia. L’EP "Mafia" est à nouveau enregistré au 16th Cellar Studio et sort en 2010. En Mai 2011, Fleshgod Apocalypse signe avec le label Nuclear Blast et alors que le groupe commence à travailler sur son nouvel album, Francesco Ferrini, qui s’occupait alors des orchestrations et du piano sur "Mafia" et "Oracles", rejoint le groupe en tant que membre permanent. "Agony" sort en Août 2011, avant d’enchaîner avec une tournée aux USA, Royaume Unis et Afrique du Sud en 2012. "Labyrinth" sort en Août 2013 chez Nuclear Blast, et a été enregistré par Stefano Morabito au 16th Cellar Studio. Le quatrième album, "King", sort en Février 2016. Le 10 Octobre 2017, le groupe annonce le départ de Tommaso Riccardi pour des raisons personnelles. Le guitariste Cristiano Trionfera quitte également le groupe. Francesco Paoli reprend son poste de chanteur et guitariste, tandis que David Folchitto (Stormlord) devient musicien live pour la batterie et Fabio Bartoletti (Deceptionist) s'occupe de la guitare solo. L'album "Veleno" sort le 24 Mai 2019, toujours sous le label Nuclear Blast.

Discographie :

2007 : "Promo '07" (Démo)
2009 : "Oracles"
2010 : "Mafia" (EP)
2011 : "Agony"
2013 : "Labyrinth"
2016 : "King"
2019 : "Veleno"


Les chroniques


"Veleno"
Note : 17/20

Fin 2017, on apprenait brutalement le départ du chanteur Tommaso Riccardi, ainsi que de Cristiano Trionfera, guitariste et membre fondateur du groupe. Ceci entraînant de multiples changements de line-up, dont Francesco Paoli qui abandonnait son poste de batteur pour repasser au chant, comme aux débuts du groupe. Quelque peu sonnés par la nouvelle, les fans craignaient les conséquences sur l'évolution artistique de Fleshgod Apocalypse. En effet, on sait l'importance et la place que prend un chanteur dans l'identité d'un groupe et l'interprétation des morceaux. De même, avec Cristiano Trionfera qui emportait avec lui une partie de l'âme de Fleshgod. Comme l'explique Francesco Paoli, le groupe lui-même secoué par ces changements, la tournée et les frustrations quotidiennes, a composé le nouvel album dans des conditions assez particulières et dans une spontanéité qui leur était jusque là inconnue.

Voici donc le tant attendu "Veleno" - le venin en français. Graphiquement, l'album réutilise la même identité visuelle que sur le précédent album, "King", avec des rouges, des ocres et des noirs. La pochette de ce dernier hautement élégante, rappelait la période du classicisme et du baroque en peinture. Mais la pochette de "Veleno", réalisée par Travis Smith est tout simplement magnifique. A travers la représentation surréaliste d'un univers semi-circassien / semi-mystique, se dégage un mélange de souffrance, de désespoir et paradoxalement de poésie. Mais on ne bâtit pas un album sur une belle oeuvre picturale.

Quelle surprise musicale nous réserve donc "Veleno" ? Ce qui fait la recette de Fleshgod c'est son univers death orchestral proche de l'opéra, enrichi par la voix soprano de Veronica Bordacchini et le son de clavecin / piano de Francesco Ferrini. Fleshgod Apocalypse, c'est le maître du death technique qui invite Mozart à sa table. Fondamentalement, l'esprit n'a pas changé. Cependant les compositions ont évolué vers plus de "légèreté". Entendons-nous sur la qualification "légèreté", qui est toute relative... Pour mieux l'expliquer, parlons de "Sugar", premier titre sorti pour la promotion de "Veleno" avant de prendre l'album dans son ensemble. Ce morceau incarne parfaitement la spontanéité évoquée par Francesco. Comment se traduit-elle ? Premièrement, par une composition plus épurée et surtout un poil moins technique que sur les précédents albums. C'est peut-être un point qui chiffonnera quelques fans de la première heure. Et pourtant, c'est aussi le vrai point fort de "Sugar" et plus globalement de "Veleno" ! Eh oui. Là où la richesse et la surenchère d'avant desservaient un peu le rendu sonore parfois confus - voire inaudible disons-le -, "Sugar" est, lui, tout aussi brutal mais beaucoup plus direct ! Grâce à cette formule, le morceau gagne indéniablement en dynamique. A être extrêmement complexes, les anciens morceaux étaient aussi plus "linéaires". Ce qui nous amène au deuxième point : l'affirmation mélodique du nouveau line-up. Forcément, dégagé de toute pollution technique, le caractère symphonique de Fleshgod est plus largement mis en exergue. Notamment sur des titres comme "Monnalisa" ou "Embrace The Oblivion". L'ensemble de l'album est bâtit sur ce même modèle. La plupart des morceaux opposant violence et beauté de façon plus équilibrée que sur les autres opus. Fleshgod a canalisé son énergie et dosé les attaques rythmiques. Les parties de piano (le clavecin a été abandonné) ne sont pas étrangères à l'apport de musicalité. Souvent étouffé auparavant sous le son écrasant des guitares et de la batterie, le piano s'exprime cette fois superbement.

De cette oeuvre orchestrale se dégagent des petits bijoux tels "Sugar", "Monnalisa", "Absinthe", "Pissing On The Score", "Embrace The Oblivion" ou encore "Worship And Forget" (mon coup de coeur !). Seul "The Day We"ll Be Gone" dénote avec le reste. Comme avec "Paramour (Die Leidenschaft Bringt Leiden)" sur l'album "King", ce titre vient mettre à l'honneur la voix de la soprano Veronica Bordacchini. Malheureusement, il manque cruellement de puissance et de profondeur. On connaît les performances de la soprano et ce morceau ne lui rend pas justice. La mélodie générale est trop classique et ne souffre pas la comparaison avec l'interprétation du superbe "Paramour" où Veronica réalise une réelle prouesse vocale. Justement, puisque l'on parle de chant, les craintes sont vite évanouies car Francesco reprend parfaitement le rôle du chant lead. J'apprécie tout particulièrement le fait qu'il s'amuse plus avec sa voix que Tommaso Riccardi pour la rendre théâtrale sur certaines parties. De façon générale, que ce soit Francesco Paoli, Veronica Bordacchini ou encore Paolo Rossi (pour notre plus grand bonheur ce dernier intervient bien plus que sur les anciens albums), la partie chant a été savamment travaillée. Tel un opéra, les voix créent une pièce musicale où chacun tient un rôle. Une dramaturgie en plusieurs actes, soutenue par un choeur féminin envoûtant et gracieux.

En réalité, Veleno ne raconte pas une histoire mais plusieurs histoires qui traitent toujours du même sujet : la dévotion et la mort avec des références qui oscillent entre religion biblique et dieux antiques. D'où cette impression de naviguer entre profane et sacré. C'est ici que le mot "venin" prend tout son sens, un poison lent qui consume les âmes sous la forme de la quête épique, de l'amour dévot ou toute autre forme d'addiction. L'outro instrumentale "Veleno" clôture avec finesse cette tragédie classique.

En résumé, le groupe italien a su rebondir de belle façon malgré les aléas qui auraient pu sceller rapidement la fin de l'aventure. Certes "Veleno" n'est pas tout à fait parfait car certains titres ne sont pas aussi percutants que les titres phares. Cependant, c'est indéniable, la séduction opère ! Après tout, la perfection n'est-elle pas ennuyeuse ? "Don't let the illusion of perfection seduce you" ("Cold As Perfection", album "King")... "Veleno" reste fidèle à l'identité de Fleshgod Apocalypse, tout en marquant une nouvelle ère après la refondation du groupe. Est-ce un album intermédiaire ou la confirmation d'une direction musicale ? Seul l'avenir nous le dira.

P.S. Ne boudez pas votre plaisir et écoutez la version instrumentale de "Veleno" disponible sur le net.


Miss Bungle
Juin 2019




"King"
Note : 16/20

Fleshgod Apocalypse est le genre de groupe qui a su mettre tout le monde d'accord en seulement trois albums... Mais quels albums !!! Magistraux, épiques, brutaux, techniques, bref, de quoi révolutionner le petit monde du death symphonique, d'aucun dirait même orchestral... Forcément, après les fameux "Agony" et "Labyrinth", tous deux sortis chez Nuclear Blast, leur successeur, présentement intitulé "King", est attendu au tournant !!! En effet, ce nouvel opus est tout à la fois source de grandes espérances, mais aussi à l'origine de nombres d'inquiétudes... Va-t-il sentir le réchauffé ??? Les Italiens en ont-il encore sous la pédale ??? Ou alors vont-il encore tout chambouler dans nos têtes ??? C'est donc dans cet état esprit que je vais me plonger dans cet album au combien mystérieux : mais qui donc est ce fameux roi ???

Tout commence avec une intro magistrale intitulée "Marche Royale" !!! De quoi rapidement se plonger dans une ambiance parfaitement théâtrale et grandiloquente... En 2 minutes, le groupe parvient à amener le premier vrai titre "In Aeternum" avec un crescendo imparable !!! A partir de là, on rentre dans ce qu'il est commun d'appeler le vif du sujet... Guitares death metal, batterie alternant merveilleusement bien blast beats et tapis de double grosse caisse, voix rauque et puissante et surtout orchestrations et chœurs à gogo !!! Le refrain, quant à lui, est parfaitement étudié et accrocheur, faisant la part belle au chant clair du bassiste, peut-être un peu moins haut perché qu'auparavant, n'en déplaise à certains... Tout cela est extrêmement intense, laissant peu de temps à l'auditeur pour souffler !!! Heureusement, comme s'ils avaient entendu mes pensées, un solo en tout point imparable va venir calmer le jeu, glissant petit à petit sur ce fameux refrain qui vous restera en tête un petit bout de temps, soyez-en sûrs... Bref, même s'il y a beaucoup d'informations à digérer sur cette entrée en matière, les Italiens nous donnent avec intelligence l'envie d'y arriver !!!

On poursuit avec "Healing Through War", continuant dans un registre plus lourd et accrocheur à mon goût, à l'image des saccades cordes/ batterie du début de morceau... Un titre résolument plus posé et se rapprochant quelque part de Septicflesh, concurrents directs de Fleshgod Apocalypse en matière de death symphonique, bien que les Italiens soient plus dans la théâtralité et les Grecs dans le mysticisme  !!! L'ambiance y est plutôt martiale et oppressante, mais le morceau finira par s'éclaircir à l'aide d'un solo lumineux pouvant évoquer Arch Enemy... Avec ce titre, les Italiens auront réussi à vous donner envie d'headbanguer avec beaucoup de subtilité : du grand art !!! Place à "The Fool" et à son intro ultra énergique au clavecin... Autant vous le dire tout de suite, la suite du morceau n'est pas en reste question énergie !!! Le genre de titre qui fonce tête baissée : c'est carré, rapide, plutôt impressionnant, mais ça n'empêche pas le groupe de vous caser un nouveau refrain entêtant avec mélodie et chant clair impeccablement travaillés, à l'image du lead mélodique qui suivra... Ce morceau est d'une densité rare et il vous faudra à coup sûr un certain temps pour vous en remettre !!! En tout cas, je suis bien sûr que vous n'aurez pas tout saisi dès la première écoute...

On enchaîne avec un morceau plus lent et résolument émotionnel nommé "Cold As Perfection" et qui donna naissance à un sympathique clip vidéo tout à fait raccord avec l'ambiance générale !!! L’atmosphère y est plutôt lourde, voire oppressante, sentiment que vient contrecarrer le subtil refrain teinté de mélancolie... Un titre profond s'il en est, qui, après un petit interlude narratif et un magistral passage mettant en exergue le chant d'opéra féminin, va peu à peu sombrer dans la noirceur et la folie avec un final en tout point épique !!! Le morceau suivant, "Mitra", est sans conteste le morceau le plus death metal de ce nouvel album "King" : brutal, efficace et technique, tout ce qu'on aime est là pour nous retourner le cerveau et le reste !!! Direct comme un coup de pieds au cul, on en ressort comme si on avait pris un uppercut en pleine tronche : c'est cela aussi Fleshgod Apocalypse, un groupe qui sait se dévoiler sans chichi ni fioritures, sans orchestrations (ou presque) et sans chant clair... Mais surtout, les Italiens continuent même ainsi à être impressionnants !!! C'est sûrement ça qu'on appelle avoir la classe, non ???

Place à "Paramour (Die Leidenschaft Bringt Leiden)", morceau digne d'un opéra baroque de la grande époque et présentant un magnifique duo piano / chant d'opéra féminin (désolé, mes connaissances ne me permettent pas de dire s'il s'agit là de soprano ou d'autre chose)... Toujours est-il que l'ensemble est prenant malgré le chant allemand, intense, parfois entraînant, et surtout parfaitement dans l'ambiance générale !!! Bref, voilà bien un habile moyen de calmer le jeu tout en aérant l'album... Maintenant que nos oreilles sont reposés et que notre esprit est apaisé, nous pouvons reprendre les hostilités avec "And The Vulture Beholds", brutal et orchestral s'il en est, et lui aussi agrémenté d'un refrain plutôt bien senti appuyé encore une fois par le chant clair du bassiste : la recette est certes connue, mais elle fonctionne toujours aussi bien !!! Mais alors qu'on se sent en terrain connu, le groupe part dans un délire plus progressif amenant de manière inattendue un passage très chargé d'un point de vue émotionnel, ce qui ne devrait pas vous laisser indifférent... Eh oui, avec Fleshgod Apocalypse, on ne s’ennuie jamais !!!

Comme son nom peu le laisser penser, on va avec "Gravity" retrouver un peu de lourdeur... En effet, ce morceau plutôt orienté mid-tempo contribue à donner du relief à ce "King", et permet aussi de l'aérer, ce qui n'est pas un mal vu la densité de la chose !!! Après, c'est sûr que pris individuellement, ce titre est moins intéressant que les autres, du moins de mon point de vue, mais il s'intègre parfaitement à l'ensemble : ce doit être ça la force des concept-albums... D'ailleurs, même ce morceau un peu en retrait parviendra à gagner en puissance sur la fin avec un magnifique passage émotionnel agrémenté d'un impressionnant tapis de double grosse caisse et suivi d'un solo une fois encore impeccable et diablement accrocheur !!! "A Million Deaths", quant à lui, est né sous le signe de l'efficacité... Un morceau certes plus sobre mais qui va droit au but et qui n'épargnera pas vos cervicales !!! Un titre qui n'oublie pourtant pas d'être subtil et qui saura ainsi proposer une ambiance riche et lourde de sens, à l'image du lead mélodique lors du passage narratif... Et finalement, la puissance ne viendra pas forcément de là où on l'attend : une vraie réussite qui en fait à mon humble avis l'un des titres les plus intéressant de ce nouvel opus !!!

On continue avec un morceau plus sombre intitulé "Syphilis", particulièrement lourd et torturé, basé sur un jeu de questions / réponses entre (je suppose) roi et reine... Toujours est-il qu'il fait la part belle aux chœurs d'opéra féminins, d'une intensité à vous glacer le sang, à l'image de cette guitare lancinante emplie de tristesse et de regrets !!! Peu à peu, l'émotion va s'installer pour ne pas vous lâcher... Le titre gagne ainsi beaucoup en profondeur par cet aspect nostalgique et désespéré qui transpire de chaque note ou de chaque mot prononcé !!! Cette écoute du dernier méfait des Italiens de Fleshgod Apocalypse va se conclure avec le morceau éponyme, outro de 4 minutes délicatement, voire même délicieusement exécutée au piano, et seulement au piano... Un final tout en sobriété qui fait du bien après autant d'intensité et de richesse émotionnelle !!! Comme quoi, le groupe sait vraiment jouer sur tous les tableaux, que ce soit du classique comme ici, de l'opéra comme précédemment, ou n'importe quelle facette du death metal comme ils ont su le prouver depuis 2007... Qu'importe ce qu'on peut penser de cet album, ou même des précédents, voilà bien qui force le respect !!!

Eh oui, avec "King", Fleshgod Apocalypse a une nouvelle fois matière à impressionner les foules : intensité, technique, émotion, variété, les Italiens sont définitivement polyvalent et talentueux !!! Malgré tout, leur musique n'est pas à mettre entre toutes les oreilles... Plus que sur "Agony", ou même que sur "Labyrinth", la densité des informations à digérer fait qu'il ne faut pas espérer tout saisir dès la première écoute !!! Cet album nécessite un effort pour être cerné, et je sais d'avance que tous ne sont pas prêt à y consentir... Pour les personnes un tant soit peu ouvertes d'esprit et patiente, Fleshgod Apocalypse vous dévoilera un album d'une richesse incroyable dont la profondeur et la justesse sauront ouvrir les portes de sentiments parfois restés trop longtemps enfouis !!! Alors certes, ce nouvel opus est peut-être moins accessible que ses prédécesseurs et on est parfois déboussolé lors de son écoute, mais le groupe a su disséminer ici et là suffisamment de points de repère pour vous procurer, si vous vous y accrochez solidement, une expérience unique et indispensable... Tout ça pour dire que les Rois, ce sont eux, tout simplement !!!


Carcharoth
Mars 2016




"Labyrinth"
Note : 19/20

Fleshgod Apocalypse revient deux ans après l’excellent "Agony", avec un nouvel opus sorti le 16 Août en Europe chez Nuclear Blast. Un album qui se présente sous forme d’album concept sur le thème du Labyrinthe de Knossos. Une thématique représentée tant dans les textes qu’au niveau de la pochette, dont l’artwork a été réalisé par Colin Marks, ou du titre de l’album lui-même, simplement intitulé "Labyrinth". Le combo italien a su se faire un nom en peu de temps grâce à son death brutal ultra technique, associant éléments orchestraux et symphoniques depuis leur précédent opus "Agony" (2011) et l’intégration au groupe en tant que membre officiel de Francesco Ferrini, conférant au groupe un côté très théâtralisé que l’on retrouvera sous divers aspects sur "Labyrinth". "Agony" avait à l’époque mis tout le monde d’accord (ou presque) avec un excellent album, démontrant toute l’étendue du talent des Italiens, mais cette nouvelle galette saura-t-elle relever le niveau et être à la hauteur de nos espérances ?

Avant de s’intéresser à l’aspect musical et technique de "Labyrinth", et afin de mieux cerner toute la complexité de ce dernier, une brève présentation de cet album concept, centré sur le mythe du labyrinthe de Knossos, et des thèmes abordés dans les textes qui le compose s’impose. Ce fameux labyrinthe se trouverait donc à Cnossos, en Crète, et aurait été construit par Dédale sur ordre du roi Minos, possesseur de l’île, afin d’y enfermer le Minotaure, créature monstrueuse engendrée par la reine Pasiphaé (fille d’Hélios et Persée, épouse de Minos) avec un taureau. Thésée y a été envoyé pour tuer le Minotaure. Ariane, fille du roi Minos, tombe amoureuse de lui, décide de l’aider et lui donne une pelote de fil afin de retrouver son chemin après avoir pénétré dans le labyrinthe et tué le Minotaure. Seuls Thésée, Dédale et son fils Icare (tous deux enfermés dans le labyrinthe par Minos) en seraient sortis, les derniers y parvenant en s’envolant par les airs à l’aide d’ailes faites de plumes collées avec de la cire. Sont aussi évoqués dans "Labyrinth" : Astérion, roi des Crétois; Poséidon, Dieu des Mers et des Océans, lequel a fait sortir de la mer à la demande de Minos le taureau avec lequel Pasiphaé engendrera le Minotaure; et Hélios, le Roi du Soleil et frère de Séléné (une des déesses de la Lune). Nombre de références à ce mythe apparaissent au fil des titres, à travers l’évocation de divers personnages, découverts au fur et à mesure de l’écoute de ce "Labyrinth" : Poséidon et le Minotaure sont évoqués dans "Minotaur (The Wrath Of Poseidon)", les Dieux du Soleil et de la Mer (Hélios et Poséidon) apparaissent dans "Towards The Sun", le roi Minos sur "Warpledge", "Pathfinder" aborde Pasiphaé, et "The Fall Of Asterion" évoque le roi Crétois Astérion. En résumé, ce mythe, dépeint tout au long de l’album à travers les différents titres qui le composent, est une représentation de l’Homme dans sa quête de lui-même, perdu face à ses démons intérieurs (symbolisé par le Minotaure) de par son âme torturée et la complexité de la nature humaine. C’est aussi une métaphore de l’Homme face au monde actuel, qui cherche qui il est, d’où il vient, où il va et cherchant des réponses à ses interrogations face à l’univers, et à la condition humaine dans laquelle il est enfermé (symbolisé par Thésée et sa destinée de tuer le Minotaure, aidé par Ariane), par la connaissance et l‘élévation de l‘esprit (symbolisé par l‘envol hors du labyrinthe de Dédale et Icare).

Bref, concentrons nous désormais sur le principal : l’aspect musical et technique de cet album. On démarre l’écoute avec "Kingborn", qui après une brève intro, nous plonge direct dans le bain avec un titre ultra rapide et la batterie qui blast à fond, sur fond d’orchestrations et de chœurs. Les guitares s’exécutent toutes deux avec harmonie, les riffs de la lead se voulant accrocheurs. Le chant lyrique féminin apparaît cette fois dès la première piste, lequel s’avérera beaucoup plus présent sur cet album que sur "Agony", où Veronica Bordacchini n’intervenait que sur "The Egoism". Bien sûr, le chant guttural de Tommaso Riccardi domine sur cet album et sur cette piste, le chant clair (et limite criard tant il est aigu) de Paolo Rossi ne s’entendant que par petites interventions en choeurs et étant nettement moins présent sur "Labyrinth" que sur leur précédent opus. "Minotaur (The Wrath Of Poseidon)" est un excellent titre qui démarre sur une intro au piano, dominé par le chant guttural de Tommaso Riccardi. Les chœurs y ont une grande place, tant en début qu’en fin de piste, et sont superbement interprétés et très bien placés, les orchestrations quant à elles sont judicieusement incrustées. Les riffs de guitares, aussi bien la rythmique de Tommaso que la lead de Cristiano Trionfera, avec son superbe solo à 3‘30, ainsi que la batterie sont parfaitement exécutées, Francesco Paoli martèle de plus en plus vite derrière ses fûts, c‘est violent, entraînant, le rythme est martial, efficace. L‘un des titres les plus représentatifs de ce que F.A sait faire le mieux. On enchaîne avec un autre titre tout aussi brut et puissant. "Elegy" est ultra violent, très technique et rapide. Seul le chant guttural est présent, le chant clair de Paolo intervenant seulement en chœurs par moments ; le chant féminin lui, est absent sur cette piste. Heureusement les guitares sont là pour rendre le tout un peu plus mélodique tant ça va toujours plus vite et plus fort, autant vous dire qu’on en prend plein les oreilles, à tel point que la basse en est quasi inaudible pour ainsi dire sur l’ensemble de l‘album. "Towards The Sun" est lui aussi puissant et violent, ne laissant aucun répit, ça blaste encore et toujours à la batterie, Francesco Paoli se montre précis et efficace derrière les fûts, la technique est implacable. Le chant guttural domine ici, malgré quelques passages au chant clair "criés" ça et là, voire limite parlés. Le morceau se termine par un superbe passage laissant apparaître un solo de guitare en fin de piste, avant une nouvelle fois l’intervention au chant lyrique de Veronica, magnifique, étonnant de maîtrise et de perfection, une voix à en couper le souffle, puis un passage au piano. "Warpledge" est dans la même veine que les précédents, un très bon titre efficace, brutal, de par la batterie qui martèle le plus vite possible et en met de partout, associé au chant death, c’est violent, rapide, brut. Mais le chant lyrique féminin, qui forme comme une sorte de duo vocal avec Tommaso, est envoûtant, touchant, ajoutant à l’aspect théâtral et quasi tragique déjà présent sur l‘album, en contraste avec le reste du morceau.

Ici encore, au même titre que sur "Agony", les titres s’enchaînent les uns aux autres sans temps mort, il est parfois difficilement décelable lorsqu’un morceau se termine pour passer au suivant. Comme pour ne pas nous faire oublier que "Labyrinth" est un album concept, et aller dans cette continuité, sans avoir le temps de faire de pause entre chaque morceau. Le rythme est effréné, les titres défilent à une allure toujours aussi impressionnante. On arrive déjà à la moitié de l’écoute, on passe à présent à Pathfinder. Ce titre nous fait une nouvelle démonstration des talents du groupe à combiner la brutalité du death de par les voix et la technique des instruments toujours des plus rapides et violentes, avec les orchestrations et les chœurs parfaitement mêlés au reste comme si les deux avaient été faits pour s’entendre depuis toujours. Les "hurlements" aigus du chant clair viennent parfois s’ajouter à l’ensemble, les notes défilent tant au niveau des guitares qu’à la batterie, on en prend plein la face tellement les changements de rythmes sont nombreux, avant de terminer le morceau par un passage au violoncelle qui sert aussi bien de conclusion à Pathfinder que d’intro à la piste suivante, "The Fall Of Asterion". Ce dernier suit dans l’ensemble le même genre de schéma que les pistes précédentes. Les lignes de guitares sont mélodiques et le rythme effréné, la batterie envoie toujours la sauce avec son quota de blasts.

Une petite pause musicale s’ensuit, et nos oreilles n’en seront que soulagées le temps de quelques minutes devant le déluge de violence qui a précédé. En effet, "Prologue" est entièrement instrumental, interprété à la guitare sèche, et sert en quelque sorte d’interlude, suivi de "Epilogue", lui aussi beaucoup plus calme et mélodique, centré sur les orchestrations au piano et au violoncelle notamment, ainsi qu’une belle entrée en matière avec le chant féminin lyrique de Veronica, suivi du chant guttural de Tommaso, auquel s’ajoute un superbe passage à la guitare en fin de piste. On approche du dernier morceau avec "Under Black Sails", où les orchestrations ont une fois de plus une place importante, et sont très bien mises en valeur, contrastant avec la brutalité et la violence du death metal, toujours aussi rapide et efficace. Labyrinth clôt l’album avec ce titre éponyme, sur un morceau instrumental au piano avec des orchestrations et chœurs en milieu de piste, magnifique et envoûtant.

Avec ce nouvel album, Fleshgod Apocalypse a voulu dépasser ses limites en matière de technique et de rapidité, son but semble avoir été atteint. Même si "Labyrinth" semble relativement proche de "Agony", leur précédent opus sorti deux ans plus tôt, il reste redoutable d’efficacité en termes de technique, de bourrinage et de violence tant il y en a de partout, que ce soit au niveau de la batterie qui blaste non stop, des orchestrations et du chant féminin lyrique qui se font plus présents qu’auparavant sur cet opus et tiennent ainsi une place importante sur l’album, mettant un peu de côté le chant clair et "criard" de son bassiste et second chanteur. De quoi ne plus savoir où donner de la tête. Heureusement, l’ensemble est parfaitement maîtrisé et la production de qualité, permettant ainsi de rendre ce "Labyrinth" relativement cohérent et audible parmi toute cette déferlante de brutalité et de notes. Certains diront que le groupe en fait trop, d’autres approuveront cet album mais autant dire qu’il ne laisse pas indifférent, et je recommande vivement "Labyrinth" à tous les fans de brutal death et de musique classique.


Alexandra
Septembre 2013




"Agony"
Note : 18/20

Voilà un album qui me surprendra sur toutes les coutures et qui aura eu le don de faire parler déjà beaucoup de lui, en bien autant qu’en mal. "Agony" commencera avec "Temptation", en guise d’introduction, basée entièrement sur de l’instrumental de type orchestral, ça sent le début de bataille, une ambiance grandissante, des hautbois qui montent tout doucement tout en restant discrets avec des attaques de violons et violoncelles bien prenantes sous une nappe orchestrale digne de ce nom, les hostilités, peuvent commencer...

Ce sera sous "The Hypocrisy", morceau avec une batterie faisant office de mitraillette, c’est violent et intense, et le calage d’instruments "classiques" en fond ne fait que relever le dimension offerte par le son de Fleshgod Apocalypse, la voix en choeur de Hammer est exquise à condition d’aimer ce côté lyrique dans les vocalises, des rythmes effrénés, de belles variations de tempo et des soli qui sont franchement trop courts mais excellemment posés. Et l’ensemble de la galette va rester dans le même état d’esprit, ayant un goût particulier pour la musique scientifique (en terme bâtard : la musique classique), Fleshgod prêche un convaincu. Petite signature de Fleshgod Apocalypse en dehors de l’aspect orchestral, c’est des morceaux qui partent sur un coup de canon via des percussions un brin saturées en office de départ, on le ressent très fortement sur des morceaux tel que "The Imposition" ou encore "The Egoism". Morceau terriblement massif par ce jeu à la batterie monstrueux mais sur lequel j’émettrai tout de même un léger bémol quand à l’aspect répétitif des riffs sur l’ensemble des morceaux, ça blaste sévère, c’est sûr, c’est cool et impressionnant, mais au final, on retrouve le même schéma sur trop de morceaux. "The Deceit" nous offre une belle branlée de riffs détonants, le chant toujours aussi efficace dans cette vague de bourrinisme en contradiction continuelle avec les bois en fond et les claviers donnant un certain charme aux titres, oui oui on peut être brutal et avoir un certain charme musical. Les choeurs sont toujours aussi efficaces, le jeu guitares / basse est prenant, notamment au niveau de ce passage vers les 3’20 qui fait secouer naturellement la tête tout en partant progressivement sur un solo de guitare plus que convaincant, le tout relevé avec des "pauses" orchestrales, c’est du grand art.

"The Deceit" se terminera sur l’introduction entièrement orchestrale de "The Violation", une introduction légèrement malsaine, laissant deviner une puissance montante prête à exploser au départ de "The Violation", qui sera parmi mes petits préférés de "Agony". Voilà un concentré de talent et de brutalité qui n’est pas sans me laisser indifférent, la batterie est une fois de plus colossale mais reste trop sur le schéma du blast, en dehors de ça, un piano sublime, des montées orchestrales gigantesques, des riffs à donner envie de briser, en toute sympathie je précise, les jambes de son voisin. "The Violation" est un boulet de canon qui fait très mal.

Voici mes deux autres petits préférées de la galette, "The Betrayal" et "The Forsaking", deux morceaux très complémentaires. Malgré un chant que je trouve hélas trop "classique", par rapport aux précédents titres, ces deux morceaux sont effroyables, il y a une puissance débordante, et ça nous envahit littéralement, difficile de rester stoïque à l’écoute, juste envie de tout destroy. Au final, ce qui m’atteint clairement le plus sur "The Betrayal", restera, en dehors des splendides soli de guitares, le côté orchestral. D’ailleurs ce côté orchestral sera énormément mis en avant sur "The Forsaking", avec cette ligne de piano majorée sur l’ensemble, cette batterie légère à la double continuelle, et à ce chant venant s'étouffer sous le piano qui pèse considérablement ici, quand Francesco monte dans les graves, on a l’impression que c’est avec un marteau qu’il frappe sur les touches, un grand moment dans cette chanson qui ne fera que monter en force pour se terminer sur le piano seul qui vous file le frisson, 5’30 d’une intensité à couper le souffle. Avant-dernier morceau avant d’en finir avec cette baffe orchestrale titanesque, "The Oppression", qui sera le titre qui me marquera le moins, peut-être à force d’écoute, je le trouve bien trop semblable aux morceaux précédents, un schéma qui se répète, la seule chose qui change vraiment sur ce morceau, c’est les lignes orchestrales de fond et le jeu au piano toujours aussi impressionnant, en dehors de ça, rien de bien neuf hélas, à la limite, ils ne l’auraient carrément pas mis sur la galette, ça n’aurait pas été plus mal. Je ne m’attarderai donc pas sur ce morceau, trouvant le final bien plus intéressant.

Le final : "Agony", je parlais du jeu de piano de Francesco fort surprenant, ils auront donc décidé de finir "Agony" en cet honneur avec une composition splendide, un piano, utilisé correctement devient une arme charnelle terrible, objectif réussi ici, ça vous parcourt la colonne vertébrale, la profondeur de chaque note jouée offre une émotion dévorante quasiment palpable... chut... je jubile... ahhhhh que c’est bon !!! Fleshgod Apocalypse n’aura pas fini de faire parler de lui, avec "Agony" ils se sont mis une barre assez haut mais qui aura le mérite de marquer clairement les esprits, après, il est clair que le genre ne sera pas abordable pour tous, ça passe ou ça casse, pour ma part je suis plus que convaincu par ce magnifique album, mais beaucoup plus touché par le côté orchestral que par les riffs pouvant sembler à la longue un peu trop répétitifs.


Phenix
Février 2012


Conclusion
L'interview : Tommaso Riccardi

Le site officiel : www.fleshgodapocalypse.com