"Scourge Of The Enthroned"
Note : 19/20
Douzième album pour Krisiun ! Depuis 1990, les trois frères Alex Camargo (basse / chant),
Moyses Kolesne (guitare) et Max Kolesne (batterie) font du death metal, et leur nouvelle
offrande porte le doux nom de "Mortem Solis", sortie en 2022 chez Century Media Records.
Le groupe ne perd pas une seule seconde, et "Sworn Enemies" nous lacère immédiatement
avec ses riffs puissants. Le son old school et la touche du groupe sont toujours présents,
recréant cette tornade de violence effrénée qui ne freine même pas lorsque le guitariste
place ses harmoniques assassines, tout comme sur la massive "Serpent Messiah" et sa
lourdeur apocalyptique. On retrouve cette complexité entêtante qui conserve toute sa
violence en restant dans l’efficacité et la technicité, puis "Swords Into Pieces" dévoile une
ambiance plus planante sous ce blast effréné. Les harmoniques nous offrent le contraste
nécessaire pour apprécier pleinement le titre accrocheur, alors que "Necronomical" joue avec
ce groove gras et puissant pour laisser la guitare et les hurlements offrir du relief à ce son
agressif. Les trois musiciens restent ancrés dans ces patterns bruts avant de nous offrir
une pointe de technicité grâce à la véloce "Tomb Of The Nameless" et ses leads fous. La base
solide permet à la guitare de placer ses leads cinglants avant de repartir dans l’efficacité
pure et saccadée, laissant le peu de quiétude à "Dawn Sun Carnage", une introduction
acoustique mais martiale et inquiétante.
La tornade reviendra rapidement nous frapper, et
elle prend le nom de "Temple Of The Abattoir", qui sera parfait pour incarner la violence dont le
trio fera preuve une fois les sonorités dissonantes passées. Rapidité et maîtrise seront les
maîtres-mots de ce morceau tranchant et épais qui laisse les racines les plus malsaines
oeuvrer avant que "War Blood Hammer" ne nous présente un autre type de violence,
beaucoup plus régulier et entêtant. Le blast sera bien évidemment à l’honneur sous les riffs
saccadés et dévastateurs, mais certaines parties se montrent plus accessibles avant qu’"As
Angels Burns" ne vienne nous rappeler les premiers riffs du groupe. Cette rage déchaînée
nous lâche juste avant "Worm God", le dernier titre, qui retourne dans les sonorités sombres
et dissonantes avant de renouer avec la violence pure, brute et pourtant maîtrisée de bout
en bout.
Krisiun a toujours su nous matraquer, et le groupe le fait avec une régularité rare. "Mortem
Solis" démarre une fois de plus avec cette violence effrénée que l’on ne retrouve nulle part
ailleurs, et ne nous laissera respirer qu’avec quelques introductions plus sombres. Une
perfection rare.
"Scourge Of The Enthroned"
Note : 18/20
Impossible de parler de brutal death sans évoquer les mandales que distribuent les
Brésiliens de Krisiun à chaque album. Formé en 1990 par les frères Alex Camargo
(basse / chant), Max Kolesne (batterie) et Moyses Kolesne (guitare), le groupe évolue en
trio depuis 1994, bien qu’ils aient eu un guitariste supplémentaire sur les quatre premières
années. A chacun de sesdix albums, le groupe prouve qu’il a pour seul et unique la
violence brute, et ce n’est pas "Scourge Of The Enthroned", le onzième sorti tout récemment,
qui va nous faire dire le contraire !
L’album commence par le titre éponyme, "Scourge Of The Enthroned", et bien que
l’introduction soit quelque peu énigmatique, avec notamment un chant tribal en fond, les
amateurs de death bourrin ne vont pas être déçus. La rythmique est toujours aussi violente,
mais le chant d’Alex a changé : il n’est plus aussi “vomi” qu’auparavant, tout en gardant sa
puissance caractéristique. Cette impression se confirme avec "Demonic III", une autre
composition brutale et qui profite de riffs imposants pour caser une guitare lead rapide et
perçante. Si vous souhaitez un moment pour reprendre vos esprits, je vous conseille de
mettre l’album en pause, car le trio attaque tout de suite après avec "Devouring Faith", et le
repos n’est pas prévu au programme avec cette avalanche de blasts. La technicité rencontre
des riffs bruts massifs qui s’écrasent sur l’auditeur en quelques secondes, provoquant des
mouvements de tête incontrôlables jusqu’à "Slay The Prophet", qui déchaînera littéralement
les fosses devant lesquelles le groupe sera amené à jouer. Encore une fois, la guitare lead
de Moyses apporte un vrai plus à cette musique martiale, et ce son déchirant est
parfaitement maîtrisé par le combo, qui sait parfaitement où placer ses harmoniques.
Amateurs de blast furieux, vous serez servis avec "A Thousand Graves". Le contraste entre la
guitare hypnotique et la batterie violente sera exploité tout au long de ce titre
pachydermique, et la basse vrombissante fournit cette touche de gras au titre qui est pour
moi le meilleur de l’album. On repart sur "Electricide", une composition un peu plus axée
death technique, et qui colle toutefois parfaitement à l’image du groupe. Il est
impressionnant de voir à quel point les Brésiliens ont une maîtrise parfaite de leurs
instruments, tout en provoquant breaks et changements d’ambiance de manière très
réussie. On revient sur quelque chose de plus classique avec "Abysmal Misery (Foretold
Destiny)" qui incite au headbang en quasi-permanence, alors que les trois frères se
déchaînent sur leur instrument, mais j’avoue être quelque peu resté sur ma faim avec cette
guitare lead qui avance avant de s’arrêter net, pour finalement reprendre à son point de
départ. Le final, plus lourd, débouche sur "Whirlwind Of Immortality", la dernière composition.
Encore une fois, c’est une rythmique massive qui capture immédiatement l’auditeur pour
l’enfermer dans une spirale de violence maîtrisée de bout en bout avant de le lâcher à
l’issue de presque six minutes de rage.
Les trois titans du death brésilien ont encore frappé. Alors que Krisiun se veut une valeur
sûre pour les connaisseurs, je trouve toutefois cet album plus… accessible. Le mixage est
plus soigné, et les puristes pourraient regretter cet aspect brut de décoffrage qui a fait leur
réputation, mais qui n’empêchera personne de rentrer dans l’univers impitoyable du groupe.
Revenez vite chez nous !
"Forged In Fury"
Note : 19/20
Ce n'est pas la première fois que j'ai cette sensation avant de débuter une chronique : je connais très bien le groupe, je sais qu'ils ne m'ont jamais déçu et que ça ne sera jamais le cas. La dernière fois, c'était avec Pro-Pain... En général, pour ce genre de groupe, quand j'ai envie de l'écouter, je m'envoie toute la discographie sur la journée (souvent facilement trouvable sur YouTube), en me disant "Putain, c'est vraiment de mieux en mieux, vivement le prochain". Et le prochain de Krisiun, le voilà qui débarque en ce mois d'Août 2015, 4 ans après l'excellent "The Great Execution". Pour cette nouvelle production, les trois frères brésiliens ont confié la production à Erik Rutan (Hate Eternal) et non plus Andy Classen. Ce changement ne semble pas porter préjudice au groupe puisque l'enregistrement m'apparaît comme, lui aussi, très réussi.
Au programme de ce nouveau petit bijou, une avalanche de brutalité, voilà qui résume à merveille ce que l'on savoure durant une bonne cinquantaine de minutes. Pour faire simple, je n'avais pas pris de telle raclée avec du death depuis le dernier album de Vader... Ce qui est épatant ici, c'est que l'on n'a pas les oreilles qui grincent à cause de soli intempestifs. Non ici, on a de la violence pure et dure, une basse qui nous assomme du début à la fin, une batterie omniprésente, des riffs endiablés à couper le souffle, le tout divinement accompagné d'une énorme voix qui ne se contente pas de growler inlassablement dans son micro. Je peux même dire que j'ai trouvé ce chant carrément classe, avec ce p'tit côté Phil Anselmo (Pantera, Down), capable de capter votre attention même durant un morceau de plus de six minutes ("Burning Of The Heretic").
Au-delà, c'est toute l'atmosphère diffusée sur cet album qui m'a littéralement scotché. Alors certes, Krisiun ne mise pas tout sur sa noirceur, mais quand même, on est vraiment transporté dans l'univers, à part, du groupe. Indéniablement, la formation brésilienne se démarque totalement de la concurrence, offrant des pistes sombres, pas forcément old school mais qui nous rappellent sans aucun doute les meilleures heures du brutal death, comme nous les avons vécues avec des groupes comme Deicide, Cannibal Corpse ou encore Nile.
Au final, on peine à trouver quoi que ce soit d'imparfait à cet excellent "Forged In Fury". Bien plus qu'un incontournable de la scène death, il s'impose certainement comme l'album le plus réussi de ce milieu d'été (bon ok, je n'ai pas encore écouté le nouveau Cattle Decapitation... Honte à moi).
"The Great Execution"
Note : 17/20
La musique peut être une affaire de famille comme le prouve le trio fraternel de Krisiun. Trois ans après leur dernier opus, les Brésiliens reviennent avec un album toujours aussi death enregistré au Stage One Studio (Allemagne) au côté de Andy Classen avec qui ils avaient déjà collaboré. A noter le concours vocal de Joao Gordo (Ratos De Porao) et de Marcello Caminha à la guitare acoustique… Surprenant.
Maturité… Voici ce que revendique Krisiun avec cet album produit d’une façon foncièrement différente des autres en évitant à tout prix de trop "compresser le son" et d’arriver à un résultat plus "organique" dixit Camargo. Organique est sûrement à entendre au sens de puissance pure, car c’est vraiment ce qui caractérise ce dixième album de Krisiun qui nous avons déjà envoyé dans le décor avec "AssassiNation" et "Southern Storm". Il n’y a pas de fioritures, le tempo n’est pas spécialement rapide et le rythme haletant d’un bout à l’autre des morceaux. On ne trouve aucune surenchère à ce niveau. Non, Krisiun va chercher la puissance dans un son calibré et justement dosé mais aussi et surtout dans des structures musicales très travaillées : des compositions riches et techniques très inspirées qui suffisent à créer la puissance. Pour preuve aussi de ce travail réel de composition, la fusion fort judicieuse des guitares électriques avec la guitare acoustique de Marcello Caminha et ses accords latino posés directement dès la première piste de "The Great Execution". On retrouve son concours sur "The Sword Of Orion", où son jeu est directement mis en valeur avec celui des gratteux de Krisiun. Une alliance respectueuse de chaque instrument envers l’autre, irréel et pourtant réussi qui en ramènera aux sources plus d’un, la guitare acoustique étant très souvent l’étape obligatoire menant à la 6 cordes raccordée au gros ampli. Ce travail de composition nous ramène vraiment à l’origine de la musique de Krisiun, aux basiques. Après cela, le duo avec Joao Gordo sur "Extincao Em Massa", chanteur du groupe hardcore Ratos De Porão, est à découvrir : le chanteur déverse un flou de paroles rapide en Portugais qui ravira les aficionados de Sepultura, cette ambiance tribale est à retrouver sur "Rise And Confort" avec encore et toujours un équilibre respecté entre les instruments.
Cet album n’est sûrement pas le plus bourrin au niveau sonore mais c’est la compo qui fait la puissance et l’efficacité dans le cas des Brésiliens mais il est selon moi le mieux construit, le plus cherché et intelligent. Sans partir dans l’expérimentation douteuse, Krisiun essaie dans une démarche presque mystique, que l’on ressent dans le ton général de l’album, de travailler les bases de la musique qui sont les compositions et l’harmonie entre les instruments plutôt que la puissance à outrance avec des sons bidouillés et souvent vaine que proposent certains groupes en manque d’originalité et de créativité.
|
|