Le groupe
Biographie :

Opeth est un groupe de metal progressif suédois fondé à Stockholm en 1990. Le style d'Opeth, basé en grande partie sur la présence continue du chanteur et guitariste Mikael Åkerfeldt, est bien ancré dans la tradition heavy metal. Le groupe est également sous-classé dans le death metal et le rock progressif (ou une combinaison de ces genres) selon l'album et parfois la chanson à laquelle le critique se réfère. D'une part, Opeth emprunte aux styles les plus brutaux à travers des chants gutturaux et des séquences instrumentales très agressives tandis que de l'autre, il se distingue par des séquences progressives mélodiques, très souvent douces et envoûtantes. Cette apparente dichotomie est présente dans tous les albums du groupe bien qu'à des degrés différents, ce qui rend sa classification dans un style musical d'autant plus complexe. Bien qu'Opeth n'ait jamais connu de succès commercial à grande échelle, le groupe jouit de nombreux fans qui suivent l'évolution du groupe et participent à ses concerts de par le monde. Cela dit, l'album "Damnation" a su percer le classement Billboard 200 en entrant à la 192e position lors de son lancement en 2003. L'exploit est amélioré en Septembre 2005 alors que "Ghost Reveries" passe deux semaines au classement aux positions 64 et 175 respectivement. Au cours de sa carrière, Opeth a sorti treize albums studio, trois albums live, un coffret et trois DVD musicaux.

Discographie :

1995 : "Orchid"
1996 : "Morningrise"
1998 : "My Arms, Your Hearse"
1999 : "Still Life"
2001 : "Blackwater Park"
2002 : "Deliverance"
2003 : "Damnation"
2005 : "Ghost Reveries"
2008 : "Watershed"
2011 : "Heritage"
2014 : "Pale Communion"
2016 : "Sorceress"
2019 : "In Cauda Venenum"


Les chroniques


"In Cauda Venenum"
Note : 18/20

Avec une régularité digne d'un coucou suisse, Opeth nous revient avec "In Cauda Venenum" qui sort trois ans presque jour pour après "Sorceress". Je vais casser les espoirs de ceux qui espéraient un retour du chant extrême puisque ce n'est toujours pas pour cette fois.

Avec le temps, la facette prog d'Opeth a pris de plus en plus de place et "In Cauda Venenum" continue dans la lignée de ses deux prédécesseurs avec toutefois une petite subtilité pour cette fois, à savoir le fait que l'album est disponible dans une version chantée en suédois et une autre en anglais. Honnêtement, il n'y a pas de grosses différences et Mickael Akerfeldt lui-même a avoué qu'en le faisant écouter à des amis, ceux-ci n'avaient même pas remarqué qu'il chantait en suédois ! Sachez toutefois que la version suédoise est celle d'origine, c'est de cette façon que l'album était prévu à la base. Pour la musique elle-même, le groupe continue son chemin vers le rock progressif délaissant les riffs metal de bûcheron que l'on avait pu entendre pendant des années. Cette évolution ne date pas d'hier et l'amour d'Akerfeldt pour le rock progressif est de notoriété publique lui aussi, pourtant certains ne s'en sont toujours pas remis. Personnellement, la seule chose qui me gênait un peu sur "Heritage" et "Pale Communnion" était le fait que cela manquait de dynamique à mon goût, tout était très feutré au point de placer des secondes de silence en plein milieu de plusieurs morceaux. Je sais bien que ce genre de cassures créent un effet mais chez Opeth cela devenait un peu trop envahissant à mon goût et l'on se retrouvait avec de plus en plus de passages pendant lesquels il fallait tendre l'oreille pour entendre les trois notes de guitare acoustique ou de piano qui étaient jouées dans la pièce d'à côté, bref je trouvais qu'il y avait un léger problème d'équilibre. Encore une fois, ce n'est pas un défaut mais simplement une question de goût et j'attendais le moment où ils recommenceraient à ajouter plus de musique au milieu de leurs effets (oui, c'est vache et je caricature, mais qui aime bien châtie bien). C'est avec "In Cauda Venenum" qu'ils se sont décidés à le faire puisque ce nouvel album est plus dynamique que ces deux prédécesseurs et j'ai bien dit dynamique et non pas agressif ou violent (oui, je vous vois les deux bourrins du fond là). En gros, ça bouge un peu plus, on a toujours ces cassures avec des passages très feutrés et d'autres plus rock mais l'équilibre est mieux trouvé entre les deux cette fois.

Après les trois minutes assez angoissantes de "Livets Trädgard" qui sert d'introduction, c'est "Svekets Prins" qui ouvre vraiment l'album et pour le coup c'est la baffe d'entrée de jeu avec un prog de haute volée comme d'habitude chez Opeth ! Les mélodies sont prenantes, belles, les riffs inspirés, les strctures changeantes prennent un malin plaisir à nous remuer dans tous les sens et on sent un Mikael Akerfeldt presque plus impliqué encore que sur les précédents albums. Le bougre nous livre une prestation parfaite avec une voix chaleureuse et des lignes de chant magnifiques et systématiquement prenantes ! Si les précédents albums étaient déjà très bons, "In Cauda Venenum" donne l'impression que le groupe testait encore certaines choses, qu'il tatonnait encore et qu'il vient de finaliser sa transition vers le prog tant ce nouvel album est éclatant à tous les niveaux ! "Minnets Yta" tout en douceur est bouleversant et c'est encore une fois en grande partie dû au chant magnifique d'Akerfeldt qui s'est décidément dépassé sur ce treizième opus. Les soli de guitare sont tous magnifiques et loin de la démonstration technique, toujours tout en feeling et balançant des mélodies à pleurer. Les émotions ont clairement pris toute la place qu'elles pouvaient et ces dix nouveaux morceaux frappent en plein cœur sans la moindre difficulté, on sent le groupe en état de grâce pendant soixante-huit minutes et on prend plein les oreilles. "Banemannen" nous balade entre passages jazzy et mélodies sombres et glauques, tranchant avec la beauté du reste. Globalement, l'album est assez varié et si l'on sent fortement les sonorités héritées du prog, le groupe s'en donne à cœur joie et pose ses ambiances en jouant avec nos oreilles et nos attentes, nous prenant à contre-pied plus d'une fois en passant de la beauté à la noirceur. L'album porte bien son nom et se montre effectivement plus vénéneux et plus sombre que "Sorceress" ou "Pale Communion" tout en gardant les pieds bien ancrés dans le rock prog.

On va faire simple et dire sans hésiter qu'Opeth s'est transcendé sur "In Cauda Venenum" en nous offrant un album équilibré, varié, poignant et blindé de feeling. Le chant de Mikael Akerfeldt s'y fait encore plus maîtrisé et le maître d'oeuvre nous balance des lignes d'une beauté terrassante. Si j'ai pu avoir quelques petites réserves sur les trois albums précédents, là j'avoue que pour un treizième opus le groupe a fait fort et nous prouve qu'il en a décidement encore sous le pied !


Murderworks
Octobre 2019




"Sorceress"
Note : 15/20

L'avantage, quand on chronique un groupe comme Opeth, c'est que même quand il s'agit du douzième album, on ne sait toujours pas sur quoi on va tomber. Après un "Heritage" surprenant mais pas super emballant et un "Pale Communion" qui arrivait à mieux s'en sortir tout en assumant le virage pris dans l'album précédent, on se demandait bien, en effet, à quoi allait pouvoir ressembler ce "Sorceress".

Premier signe encourageant, le groupe nous offre, pour ce nouvel album, l'une des plus belles illustrations de sa discographie avec ce majestueux paon au plumage vert/bleu et au regard de braise, picorant tranquillement un monticule de chaire humaine sanguinolente. On espère que, comme pour "Blackwater Park", la musique sera aussi belle que la pochette.

Le voyage commence par une sorte d'invitation à la rêverie au son des guitares folk sur lesquels vient se poser la voix apaisante de Perséphone, déesse du printemps et épouse du dieu des enfers. Sur la fin de cette introduction, on distingue de plus en plus clairement le son de la flûte traversière que l'on retrouvera de façon récurrente au fil de l'album. Une entrée en matière assez sobre mais très plaisante. On arrive ensuite au premier vrai morceau de l'album avec l'éponyme "Sorceress". Tout de suite, on quitte l'univers folk pour replonger dans les sonorités prog typiques des années 70's qu'on avait découvert dans "Heritage" avec un clavier mis très en avant, une basse très ronde et un chant clair très rétro. Le son de la batterie est assez matte, presque étouffé, mais en y prêtant une oreille attentive, on peut toutefois apprécier pleinement la virtuosité et la finesse remarquable du jeu de Martin Axenrot. L'essentiel du morceau repose sur un riffing très lourd, assez inattendu par rapport au son et au mixage des instruments. Au final, l'ensemble reste cependant assez anecdotique et on espère que la suite soit plus intéressante.

On continue dans le son rétro avec "The Wilde Flower". Le riffing y est moins lourd et plus "rebondissant", ce qui colle mieux avec le style. Ce morceau est aussi bien plus riche et intéressant avec, notamment un bon gros solo de guitare toujours bien vintage mais, surtout, une interlude plus intimiste et sensible ; entre clavier / voix et mélodies de guitare clean, on sort un peu du carcan rétro dans lequel l'album semblait s'enfermer. En guise d'outro, le tout finira par s'emballer un court instant avec, il me semble, le seul passage de double pédale de l'album. Retour au calme avec "Will O The Wisp", une ballade folk très lumineuse sur laquelle on retrouvera, notamment le son discret de le flûte traversière. La basse est, encore une fois, bien mise en avant et on a droit à de jolis solos de guitare.

On arrive au morceau peut-être le plus metal de l'album avec "Chrysalis" et ses rythmes presque tribaux. On a l'impression d'une course folle à l'intérieur d'un tunnel qui atteint son climax avec une succession de soli entre la guitare et le clavier avant d'arriver à un apaisement final avec arpèges acoustiques, voix planantes et solo aérien. Un apaisement qui se poursuivra sur "Sorceress 2" ; une autre petite ballade folk sans batterie sur laquelle la flûte traversière se fait plus présente. Mikael Akerfeld nous y berce de sa voix de tête, presque féminine. On retrouve ensuite des sonorités typiquement opethiennes dans le morceau quasi-instrumental "The Seventh Sojourn" Une parenthèse orientalisante dans laquelle la darbouka et les ensembles de cordes viennent se mêler aux guitares folk. Là encore, le morceau se termine de façon très aérienne par des arpèges de guitare et des harmonies vocales.

On enchaîne sur "Strange Brew" dont l'intro piano / chant crépusculaire nous fera tout de suite penser à l'album "Damnation". L'intervention de la guitare clean continuera à nous conforter dans cette comparaison avant que, soudainement, le morceau s’emballe au son d'un clavier puis d'une batterie épileptiques. On retournera alors aux sonorités rock à la Deep Purple avant de retrouver finalement l'ambiance crépusculaire du début. Le thème de piano sera alors repris par la guitare électrique en mode trémolo et la batterie viendra se joindre à la partie pour un final assez épique. Un morceau intéressant donc, qui nous fait voyager dans les sonorités et les époques. Encore une petite intro folk avec "A Fleeting Glance" avant que le clavier de Joakim Svalberg vienne nous marquer discrètement les temps forts d'une petite valse entêtante, laissant une place confortable à la basse de Martin Mendez pour s'exprimer. Le chant de Mikael Akerfeld se fait, encore une fois, doux et haut perché. On terminera sur quelque chose de plus envolé et lumineux avec, notamment, un joli petit solo de guitare.

On arrive au dernier vrai morceau de l'album avec "Era". On commence par un petit thème de piano qui sera interrompu par l'entrée fracassante de la batterie et des guitares saturées. On partira alors sur des riffs énergiques de deux accords sur lesquels le chant et les nappes de clavier apporteront un aspect très positif et lumineux. Le tout finira par éclater en un refrain éblouissant sur lequel vient se greffer un très bon solo de guitare. Le jeu de batterie de Martin Axenrot est, encore une fois, virtuose et vraiment jouissif. On se rend alors compte que c'est clairement ce genre de passage enivrant qui manque dans cet album et on est frustré que le morceau se termine aussi brutalement pour revenir simplement, en guise d'outro, sur le thème de piano du début.

Vous l'aurez compris, "Sorceress" est un joli album qui s'avère intéressant quand on prend le temps de se pencher dessus mais il lui manque clairement quelque chose pour vraiment réussir à nous faire décoller. Loin d'être désagréable à l'oreille, son manque apparent de fougue et d'émotion risque d'en faire, au finale, pas grand-chose de plus qu'une bonne musique de fond qu'on écoute avec distraction. Reste à voir, peut-être, ce que ces morceaux pourront bien donner en live.


Zemurion
Octobre 2016




"Pale Communion"
Note moyenne : 17,5/20

Nul besoin de présenter Opeth ou leur discographie. Souvent controversés par une partie des amoureux de la première heure du groupe, les derniers albums ont montré une nouvelle facette de la formation suédoise. Pour leur douzième album (en comptabilisant "The Roundhouse Tapes" sorti en 2007), Opeth fait appel à Steven Wilson pour le mixage, et nous offre un nouvel opus sans growl, mêlant habilement à sa nouveauté des ambiances entre "Damnation" ou "Ghost Reveries", et, n’en déplaise à ceux qui se prénomment "puristes", "Heritage".

Autant vous dire qu’après le très controversé dernier album, ce nouvel opus était plus qu’attendu. Ambiances éthérées, riffs de guitares et de piano bien signés, lignes de basse et patterns de batterie toujours aussi parfaits, le son et les structures des morceaux ne sauraient renier leur créateur. "Eternal Rains Will Come" nous plonge immédiatement dans une atmosphère progressive des années 70 à la musicalité indéniable. De toute évidence, la formation suédoise n’a pas l’intention de nous livrer un nouvel "Orchid". La voix claire de Mickael Akerfledt est toujours aussi envoûtante et se marie parfaitement aux ambiances instrumentales mélodiques et aux constructions rythmiques à la limite de la schizophrénie. "Moon Above, Sun Below" est un des titres phares de l’album : avec ses 10 minutes 52 de pur voyage et des ponts rappelant fortement ceux dans les albums où le chant death était encore présent, on retrouve bien ici toute l’identité du groupe. La mélancolie musicale laisse place à un dynamisme impressionnant qui ne nécessite rien de plus. Nul besoin de guitares ultra-saturées ou de cris féroces pour nous faire passer d’une émotion à son extrême. "Faith In Others", qui clôture l’album, est simplement tout aussi magnifique. Je ne détaillerai pas ici la playlist point par point, afin de pleinement vous laisser vivre l’expérience de la découverte.

Cet album est bien du véritable Opeth : prenez tous les ingrédients des précédents albums, mixez les dans une sauce plus acoustique et progressive (de par ses sonorités notamment), ajoutez quelques sections d’instruments à cordes et un toucher de Fredrik Akesson de plus en plus savoureux, et vous vous apercevrez vite que si le groupe évolue constamment dans sa créativité, il conserve toute son identité musicale. La plupart des morceaux de cet album pourraient d’ailleurs parfaitement être adaptés en version metal. Mais ce n’est point la finalité de "Pale Communion".

Peut-être faut-il simplement arrêter de réfléchir et de débattre inutilement sur l’orientation actuelle de cette formation majeure de notre époque pour juste se laisser bercer par la beauté et l’intelligence de ses compostions. Les mots parfois sont juste totalement incapables de retranscrire ce que votre perception vous dictera. Fermez les yeux et laissez vous emporter pour un sublime voyage au travers d’une des productions les plus marquantes de cette année : un vrai nectar. Opeth reste une entité à part entière que l’on ne peut ignorer : de par sa diversité, son intelligence, son originalité, sa créativité et cette agaçante facilité à toucher ce qu’il y a de plus profond en chacun de nous.


Radien
Août 2014
Note : 19/20

Voilà, on y est ! Voici enfin ma première chronique d’un album d’Opeth, l’un de mes groupes préférés depuis 10 ans, le nouvel album d’ailleurs, "Pale Communion". Qu’il est dur de poser des mots sachant le poids qu’ils peuvent avoir, surtout lorsque cela touche à la musique, ce qui nous fait tous vibrer, et aussi lorsqu’il s’agit d’une désillusion, une prise de conscience, voire même une trahison pour certains fans de l’époque "Orchid" et "Morning Rise".

Opeth, le projet d’un seul homme, un génie ou un fou, à vous de voir, Monsieur Mikael Akerfeldt qui, en plus de 20 ans, est passé du black metal (entrecoupé de passages à la guitare classique) au rock psyché 70's à tendance ténébreuse. Fini, la brutalité d’un "My Arms, Your Hearse" ; fini, l’âge d’or du groupe avec ce style si particulier entre du "gentil" black metal mélodique progressif et des passages calmes qui a commencé avec "Still Life  et qui a fini avec "Watershed", album aux critiques mitigées (album qui signe d’ailleurs l’arrivée aux fûts de Martin Axenrot, au détriment de Martin Lopez qui aura signé 10 ans dans la formation et ses meilleurs opus).

Je crois que la "chute", ou plutôt devrais-je dire le changement radical de style, est arrivé avec "Heritage" et ses sonorités 70’s si chères à Akerfeldt (docteur ès "groupes obscurs pré-80's"), avec un réel engouement pour le chant clair et l’abandon de grosse disto et de double pédale de la mort qui tue (pourtant, avec "Damnation", le combo nous avait régalés, voire même retournés, en montrant qu’il était capable de pondre un album entièrement calme et ambiant). Donc c’est officiel, l’ami Mikael et ses employés ont quitté, du moins pour un temps certain, le doux monde du black metal pour retourner à leurs racines (surtout celles du patron à vrai dire, puisque, depuis toujours, il compose tout dans le groupe, de manière autocratique) et ce "Pale Communion", même s’il garde la "patte" si particulière d’Opeth, ne fera pas exception.

On franchit encore un cap dans le old school, un pas tellement grand que cela en est déroutant. On pourrait d’ailleurs, après une ou deux écoutes seulement, se fâcher avec les gentils Suédois mais que nenni, il s’agirait bien là d’une "monumentale erreur" (copyright Jack Slater) car il ne s’agit pas d’un changement de style, mais plutôt d’une évolution, ce qui veut dire que l’on retrouve tous les ingrédients du style fondamental d’Opeth : des constructions prog et plus jazzy que jamais, des gammes qui accrochent l’oreille ("Elysian Woes" qui sent bon le "Still Life" et le "Damnation") , des titres à rallonge, des solos toujours plus recherchés (merci Fredrik) et cette voix inimitable qui est celle de Mikael Akerfledt, doublée par son nouveau claviériste sur à peu près toutes les pistes (là encore, adieu Per Wiberg qui officie maintenant chez Spiritual Beggars, et bonjour Joakim Svalberg).

Hasard ou coïncidence, Per, premier claviériste du groupe, n’a fait son apparition qu’en 2005, soit pour "Ghost Reveries", qui déjà confirmait que le combo ne ferait certainement plus de black metal à la "Orchid" (cela semblait entendu depuis "Still Life", mais avec Akerfeldt, on ne sait jamais…) mais prendrait une voie désormais plus mélodique et organique. C’est donc chose faite avec "Pale Communion", "mélancolique, complexe" comme le définit son guitariste Fredrik Akesson (ex-Arch Enemy, pour remplacer cette buse de Chris Amott), qui nous ramène 40 ans en arrière à l’époque des pattes d’eph, des drogues expérimentales, du sexe facile et surtout des groupes de légende. 8 titres, aux ambiances différentes, tantôt rock poussant un peu sur leurs racines heavy ("Cusp Of Eternity"), tantôt presque voire totalement instrumentaux (la longue intro de "Eternal Rains Will Come", le morceau "Goblin" qui, dans son genre, n’a rien à envier à un "Ending Credits"), tantôt old school rock, mais toujours avec cette trame de fond si particulière, avec un énorme travail de chant. Le travail a également été fait au niveau de la recherche de son. Pour éviter de tomber dans la morosité, Fredrik et Mikael ont testé énormément de configurations de duos de guitares, de micros, tant et si bien qu’à aucun moment sur l’album, deux guitares, qui plus est avec des jeux de micros différents, ne sont utilisés en même temps (c’est un peu la recette qui a fait le succès de Thin Lizzy par exemple, idem avec Judas Priest sur "British Steel").Voilà bien la volonté du groupe de faire de la musique plus organique, avec de vrais sons étudiés, des lignes de basses toujours parfaites…

En bref, c’est album est certes différent des premières œuvres du combo, et cela de bien des manières (en même temps, en plus de 20 années de carrière sur-productives, il est normal que le groupe ait évolué), sait conserver le style Opeth, reconnaissable entre 1000, souvent copié et jamais égalé (même "Dethroned And Uncrowned" de Katanonia, qui reste un opus d’exception selon moi, n’arrivera jamais à la cheville de "Damnation") .Ils grandissent, ils évoluent, ils vieillissent et nous aussi, et à ce titre, vu la qualité du présent album, il serait fort prématuré de les enterrer car il est certain qu’Akerfeldt a encore bien des choses à nous dire et bien des paysages à nous faire découvrir.


Byclown
Août 2014
Note : 16/20




"Heritage"
Note : 14/20

D’après certaines personnes, la vraie bonne musique est morte depuis la fin des années 70, on en connaît tous des vieux cons qui nous disent que c’était le bon temps et que maintenant on n’a plus que de la musique de fast food. Bon si on se contente de comparer ce qu’on pouvait entendre à la télé et à la radio à cette époque et aujourd’hui, on a effectivement tendance à se dire qu’on privilégie maintenant les artistes qui font de la merde en barquette pour pucelle décérébrée. Mais bon il n’y a pas que là qu’on peut trouver de la musique, je dirais même que ce n’est surtout pas qu’il faut la chercher.

Et là vous vous demandez où je veux en venir, ben c’est tout simple puisqu’on entend pas mal d’albums en ce moment qui reviennent à des sonorités typiques des années 70 en évoquant un retour aux sources du rock ou du prog. Et c’est le choix qu’à fait Opeth sur son 10ème album, "Heritage" (la note d’intention est déjà donnée dans le titre pour le coup). J’en connais une paire qui ont tremblé quand Akerfeldt a annoncé que l’album serait plus 70’s et plus prog, ils se voyaient déjà avec du pur prog dans les oreilles puisque le monsieur n’a jamais caché son amour du genre. Autre détail qui en a inquiété une paire, c’est qu’en plus de ça Akerfeldt avait précisé qu’il n’y aurait aucune trace de metal sur cet album, et que le chant ne serait fait qu’en voix claire. Forcément quand on sait que le groupe a toujours su manier une parfaite harmonie entre les parties acoustiques en voix claires et le reste plus agressif en chant death on se dit que le fait de ne privilégier qu’un de ces deux aspects est risqué.

Bon en fait il convient de dire qu’Akerfeldt a peut-être un poil exagéré, parce que si effectivement l’album est paré de sonorités et d’un son branchés 70’s et que le chant est effectivement constamment en voix claire, on n’est quand même pas à des années-lumière du style Opeth que tout le monde a connu jusqu’à maintenant. Et puis ce genre d’écart n’est pas nouveau, rappelez-vous l’album entièrement acoustique "Damnation". Bref on va dire que le groupe a décidé de livrer sa musique dans un emballage différent, mais sûrement suffisamment inhabituel pour déstabiliser les fans de la première heure il est vrai (si tant est qu’ils ne se sont pas fait la malle depuis un moment).

Disons simplement que l’héritage justement du prog n’a jamais été aussi franchement assumé que sur cet album, une espèce de fusion des classiques du genre et de la patte habituelle d’Opeth. Rien de vraiment révolutionnaire non plus puisque ces influences se sentaient déjà par le passé, mais le côté metal étant effectivement passé à la trappe elles nous sautent aux oreilles. Même la prod' va dans ce sens, avec un son un poil moins propre et des guitares typiquement années 70 elles aussi, vu le style tout en finesse affiché ici le gros son aurait de toute façon été quelque peu déplacé. En dehors de ça l’album est bon pas de souci là dessus, même si on ne peut s’empêcher de penser que c’est un exercice de style égoïste et qu’il ne fera pas partie des chefs d’œuvre intemporels du groupe. Il n’apporte rien de plus au prog qui en a déjà vu d’autres plus aventureux, et pour la discographie du groupe ce n’est pas une révolution non plus. Simplement un petit voyage dans le passé histoire de montrer une bonne fois pour toutes d’où vient en grande partie l’inspiration d’Akerfeldt.

Résultat on retrouve les mélodies et le chant typiques du groupe, mais le tout totalement expurgé d’agressivité et des pointes de violence qu’on pouvait rencontrer dans les autres albums jusqu’à maintenant (sauf justement "Damnation" duquel il est proche au niveau de la démarche) et agrémenté de pincées de prog plus fortes que d’habitude. Inutile de préciser que ce détail a suffi à certains pour qu’ils s’emmerdent à l’écoute de cet "Heritage", c’est clair que si le prog vous débecte il vaudrait mieux passer votre chemin. Mais en même temps si c’est le cas je doute que vous écoutiez Opeth en fait, mais sait-on jamais ?


Murderworks
Novembre 2011


Conclusion
L'interview : Fredrik Åkesson

Le site officiel : www.opeth.com