Les fêtes de fin d'année approchent, vous voulez quelque chose pour mettre l'ambiance ? Vous tombez bien, les Allemands d'Ophis sortent leur cinquième album "Spew Forth Odium" et leur doom / death à cheval entre la beauté et le putride devrait égayer vos longues soirées d'hiver. Et pour vous convaincre encore un peu plus, regardez le menu : six morceaux pour soixante-trois minutes !

Rien qu'avec ce petit détail tout est dit, mais on va quand même aller voir ce que ce nouvel album a dans le ventre. C'est "Default : Empty" qui démarre et qui se trouve être le morceau le plus court de l'album avec ses neuf minutes, doom jusqu'au bout des ongles ! On se retrouve avec des mélodies mélancoliques et empruntes d'une certaine beauté froide assez classique pour le genre, mais la suite part explorer quelque chose de plus sinistre et les growls très profonds de Philipp Kruppa se chargent bien vite de rendre l'ambiance un peu plus sale. C'est d'ailleurs une des grandes forces d'Ophis depuis ses débuts, cette capacité de passer d'un doom déprimant et magnifique à des quelque chose de plus death et par conséquent bien plus crade et putride. Le doom / death est évidemment pratiqué par de nombreux groupes mais tous n'arrivent pas à mélanger ces deux univers de façon si naturelle. Chez Ophis, la crasse et la beauté semblent vraiment être deux facettes d'une même pièce, les transitions ne semblent jamais forcées et ces deux univers créent une ambiance assez particulière qui permet de reconnaître ces Allemands au milieu de la mêlée. L'autre avantage, c'est qu'on évite du coup le piège du riff étiré pendant dix plombes et qui finit par tomber dans l'ennui au lieu de provoquer un effet hypnotique. Pas de ça chez Ophis qui se sert de tout ce qu'il a pour dynamiser ses morceaux et rendre tout ça vivant malgré la lenteur typique du doom. Les ambiances passent d'un univers à l'autre, les riffs et les mélodies aussi et tout ça contribue à créer un album qui ne paraît jamais durer si longtemps. Si vous ajoutez à ça une production organique avec un son assez chaud et clair qui permet de profiter de la moindre nuance, vous n'avez plus aucune raison de résister.

"Spew Forth Odium" ne révolutionne pas la musique d'Ophis et le groupe continue sur le chemin qu'il s'est tracé avec ses quatre précédents albums, et il a bien raison quand on entend à quel point le sujet est maîtrisé. Ce nouvel album est impossible à prendre en défaut et il y a toujours quelque chose qui accroche l'oreille quelque part, comme ce break avec des arpèges en son clair sur "Of Stygian Descent" qui posent une respiration dans un morceau très lourd et sale. "Conflagration Eternal" commence, quant à lui, comme du bon gros death bien lourd et écrasant avec des riffs teigneux et crades, le tout sur fond de tapis de double grosse caisse avant que des mélodies bien glauques ne viennent encore assombrir le tableau. On a même carrément de gros blasts bien énervés qui débarquent vers la fin de "The Stagnant Room" qui ferme l'album avec plus de treize minutes au compteur, un petit plaisir qu'Ophis se fait de temps en temps sur ses albums et qui contribuent là aussi à amener un peu de variété et de surprises. Connaissant le groupe, on s'y attend à chaque fois mais on ne sait jamais à quel moment ça va tomber, ce qui fait que ça fonctionne à tous les coups. Vous ne trouverez évidemment pas de grandes surprises sur "Spew Forth Odium" mais c'est sacrément bien foutu et dans le genre c'est clairement à placer dans le haut du panier. Ophis connaît ses classiques et ne se contente pas de les recracher, le groupe apporte sa patte avec cette façon bien à lui de mélanger la crasse à la beauté. On sent que tout ça est fait avec amour et ce nouvel album évite tous les écueils que l'on peut trouver chez d'autres représentants de la scène, à savoir la répétivité, les morceaux inutilement longs ou un classicisme trop marqué.

On se retrouve donc avec un très bon nouvel album dans les oreilles, "Spew Forth Odium" ne souffrant d'aucune baisse de régime malgré une durée d'une bonne heure. Si vous êtes passés à côté d'Ophis jusqu'à maintenant, c'est une très bonne occasion de rattraper votre retard et de vous mettre un bon cru de doom / death dans les esgourdes par la même occasion (profitez-en pour écouter les quatre précédents albums).