On peut dire que c’est pas des tendres chez RazorRape, Rien que le nom du groupe associé au titre de l’album c’est tout un poème, alors ajoutez à cela une pochette bien dégueulasse où une femme à tête de porc est responsable d’une vraie boucherie sanglante, on a tout ce qu’il faut pour alerter la brigade du mauvais goût et la pousser à intervenir dans les plus brefs délais. RazorRape est fournisseur officiel de death metal décadent depuis sa première démo sortie en 2005, et est responsable d’albums aux noms inspirés tels : "Unleashing The Shemales Of Vengeance", "Revenge Of The Hermaphrodite Whores", "Orgy In Guts", tout un programme. Nos comparses suédois, adeptes de l’humour de bas étage d’ados attardés, proposent, avec "Fucked Beyond Recognition", disque sorti en 2022, un death / grind mâtiné de deathcore violent, sordide et puissant virant vers le porn.

Ce qui frappe direct chez RazorRape, c’est la précision chirurgicale, autant dans le son que l’exécution. Quelque part entre le Aborted de la période "Goremaggedon" / "The Archaic Abattoir", et le Exhumed dégoulinant de l’époque "Gore Metal", la formation nordique s’impose avec un death metal de qualité. Ça mastoche dans tous les sens, ça groove méchant comme sur "Shrunken Head Scalping" et ses parties slam qui plombent sa mère, la riffaille donne envie de headbanguer comme un gros débile, bref, c’est la claque à chaque instant. On a même droit à du toupatoupa à la Rompeprop / Gutalax : "Zombie Chicks With Double Dicks", non mais sans dec’, rien qu’avec un titre pareil, pour moi ils ont gagné direct ! Avec des titres qui oscillent entre 2 minutes et 3.30 avec un pic à 3 minutes 45 pour le titre final, autant dire que là on touche au prog’, le temps défile vite tellement on s’amuse. L’absurdité des vocals fait sourire, à la fois parce que de tels dégorgements inhumains, sorte d’éructations de truie mutante détunée une octave en dessous sont non seulement drôles, mais aussi terriblement efficaces, ça renforce le côté grind à tel point qu’on sent parfois la musique se pencher vers le goregrind. Quand il s’agit de blaster, le groupe en a en réserve et fait pas semblant comme sur "A Night To Dismember", quel titre, fallait le trouver ! Quoi qu’il advienne, de bout en bout "Fucked Beyond Recognition" est un gros banger, tout est hyper bien foutu, amené, drivé par une envie de briser des nuques, les titres sont tous bien dynamiques et, renforcés par une prod' im-pec-cable, on frôle l’excellence. Les Suédois ne nous ménagent à aucun moment et on sent que les mecs ont de la bouteille et qu’ils n’en sont pas à leur premier coup d’essai. La richesse de chaque composition, avec son lot de breaks, d’harmoniques sifflées, de riffs nerveux, de blast dévastateur, de voix de gros cochon en rut, de coups de freinages qui surviennent au moment où tu t’y attends le moins, nos instincts bestiaux sont comblés à chaque seconde. L’album dure un poil moins de 30 minutes et franchement, c’est parfait comme ça, c’est pile poil le timing qu’il faut.

La Suède est un vivier d’excellent groupes de death / grind, on pense aux mythiques mais relativement underground Regurgitate, Jigsore Terror, General Surgery, Henry Kane, elle s’illustre brillamment aussi du côté du grind / power violence pur et dur : Gadget, The Arson Project, Birdflesh, Nasum et j’en passe. RazorRape prolonge la liste des protagonistes favorables au gros son qui tache et parvient à délivrer avec ce cinquième full length un concentré de violence et de puissance. La salve qu’on se prend dans la tronche à l’écoute des 11 pépites qui constituent l’opus présent est délicieusement jouissive. Entraînant et surboosté, ce skeud me donne envie de creuser RazorRape car je dois admettre que je ne connaissais pas ce groupe et je le regrette amèrement, toute une éducation à refaire, pffff. En même temps, avec 1000 sorties metal extrême par mois, comment tu veux être au courant de tout ? Mais si j’étais tombé dessus plus tôt, ça m’aurait bien aidé car pour le coup, "Fucked Beyond Recognition" mérite de trôner au sommet du monticule de disques dont je m’empiffre quotidiennement. Paru le 17 Février 2022 chez Morbid Generations Records, label allemand reconnu pour faire l’apologie de la musique dégueu' et bruitiste (leur catalogue est proprement hallucinant), cet album de RazorRape est sans contexte une des meilleures sorties metal extrême de cette même année !