Si la plupart des groupes de black metal sont souvent orientés vers une représentation du chaos, de la haine ou de la décadence, c’est également une scène très admirative des croyances humaines et de la nature, on retrouve particulièrement ces thématiques dans les scènes islandaises et néerlandaises. C’est à cette dernière que nous allons nous intéresser cette fois-ci avec l’album "Oale Groond" de Sagenland, formation de black metal néerlandaise n’ayant sorti qu’un split en 2005 et qui revient cette année avec un album d’une bonne demi-heure. Plongée dans une contemplation aussi mystique que brutale.

La première chose qu’il est important de remarquer et la présence de cette "signature" que l’on retrouve très souvent dans le black metal néerlandais, chez des formations pionnières comme Fluisteraars ou Turia. En effet, comment ne pas penser au premier des deux groupes cités précédemment à l’écoute de "In’t Bos" qui nous plonge directement dans les mêmes ambiances avec un chant tantôt crié tantôt chanté, des riffs composés des trémolos très rapides, souvent dans les aigus, et parfois de ralentissement qui nous conduisent presque dans le doom metal avec une ligne de basse très mise en avant. On retrouve également cela dans les "Der Jammerklachten Van Singrave" dont la première partie délivre les riffs à trémolos et la deuxième les lignes de basse et le ralentissement. On a évidemment le traditionnel chant rauque et éraillé si caractéristique du black metal, mais celui-ci est poussé dans une dimension beaucoup plus contemplative et sereine que dans la plupart des autres formations qui proposent la plupart du temps une vision plus triste et défaitiste des choses à travers le chant.

L’album nous propose tout le long de notre voyage, de sympathiques interludes acoustiques, souvent courtes, dépassant rarement la minute. Ces passages instrumentaux se posant comme une petite pause calme à travers la contemplation beaucoup plus dure et anguleuse des choses qui est proposée dans le principal propos musical. Certains de ces morceaux sont cependant difficiles à comprendre, notamment la place qu’ils occupent dans l’album et ce qu’ils signifient. En effet, on a du mal à saisir la raison pour laquelle l’album s’ouvre "Wheer Thuus" sur la musique traditionnellement jouée aux Etats-Unis lors de l’enterrement d’un militaire. Peut-être est ce un hymne aux diverses cultures de la mort, il est compliqué de le dire lorsqu’on ne parle pas le langage proposé dans l’album. Certains titres s’éloignent parfois un peu plus de cette ambiance, sans pour autant la délaisser totalement, et c’est avec ces titres que l’on voit la maîtrise de composition de la formation qui arrive à proposer des riffs de black metal plus convenus mais d’une efficacité surprenante, c’est ainsi que l’on retrouvera dans "Bladval" un riff qui est sûrement parmi ceux que l’on retiendra le plus facilement dans tout l’album, et ce malgré son identité un peu moins marquée. Il faut dire qu’il est largement appuyé par une alternance, parfois même une superposition de chant hurlé et chanté maîtrisé à la perfection.

C’est donc avec une identité très marquée et de très bonnes idées de composition que Sagenland nous délivre son premier album. Marqué par l’inimitable patte néerlandaise, ce dernier va cependant explorer des sonorités parfois plus convenues sans pour autant se perdre et tomber dans le facile et oubliable. Si certaines parties sont parfois un peu incompréhensibles, cela ne freine aucunement l’appréciation de l’album qui est dans sa grande globalité très bon. Sagenland est donc définitivement un groupe à suivre au même titre que Fluisteraars ou Turia dans la scène black metal néerlandaise.