Si Tan Kozh est un nouveau groupe proposant ici son premier album, "Lignages Oubliés", chez Antiq, ses membres n'en sont pas des débutants pour autant puisqu'on retrouve au line-up d'anciens membres de Way To end, Les Chants De Nihil et un membre d'Introspect au côté du créateur du projet Sven, qui est entre autres membre live d'Himinbjorg et Belenos.

Vous vous doutez donc que vous allez retrouver ici un black metal aux accents pagan et folk et l'entame acoustique de "Troisième Fonction" confirme cette orientation mais aussi le fait que ce nouveau groupe tient à proposer quelque chose de personnel. Plutôt mid-tempo, le morceau nous fait remarquer que le bassiste joue sur une fretless, ce qui est assez rare dans ce style pour être signalé, d'autant que passée la surprise on se rend compte que cette basse est admirablement bien utilisée et que son choix ne tient pas du gimmick. Malgré le mid-tempo, on sent tout de même un esprit belliqueux, une sorte de colère rentrée qui refuse d'exploser. On est loin du folk dansant avec Tan Kozh, son black metal est certes teinté de ces influences mais c'est la rage qui prédomine et qui mène les débats. "De Brest A Brest-Litovsk" remet d'ailleurs les pendules à l'heure et lâche les blasts pour exprimer cette colère qui était encore retenue sur "Troisième Fonction". Ce deuxième morceau balance même des riffs très thrash dans l'âme par moments et tout ça renforce encore cette impression de rage et de colère qui transpire sur tout l'album. "Et La Haine Nous Sauvera Tous" part même sur une inspiration presque rock bien sale ou même plutôt punk, en tout cas quelque chose de bien direct et bien crade qui colle parfaitement au titre. Les ambiances et sonorités utilisées sont assez variées et servent le propos conceptuel de l'album puisque la bio nous apprend que la première partie est consacrée aux visions du passé et aux futures guerres avec en trame de fond le réveil des anciens dieux païens et que la seconde partie est réservée à des prières adressées aux dieux en question.

On sent clairement à l'écoute le lien qui unit le concept à la musique et les émotions véhiculées dispenseraient presque de lire les textes, ce qui serait dommage puisque les paroles de "Lignages Oubliés" sont en français. En tout cas, pour un premier album, la patte du groupe est déjà bien affirmée et les influences qui s'entrecroisent ici sont tellement variées qu'il est difficile de rapprocher Tan Kozh d'un autre groupe. Le black metal du groupe est assez froid et belliqueux sans être outrageusement brutal et les blasts ne viennent que lorsque c'est nécessaire, là aussi on est donc loin du gimmick qui consiste à en mettre partout au risque de détruire leur impact. Tan Kozh utilise la violence brute à bon escient et ces accélérations gardent par conséquent leur puissance d'attaque. En tout cas, les sonorités metal sont majoritairement old school et vous ne risquez pas d'entendre ici une quelconque influence récente. Mis bout à bout, tous ces éléments confèrent une authenticité et une sincérité indéniable à "Lignages Oubliés" qui rend son black metal païen d'autant plus percutant et efficace. Pour la production aussi on est loin des groupes de black au son volontairement raw au point d'être quasiment inaudible, Tan Kozh a fait le choix d'un son puissant et assez clair même si les guitares sont tranchantes et qu'il y a ce qu'il faut de crasse. Loin des évolutions récentes du black metal mais loin aussi des autres représentants des scènes pagan ou folk / black, Tan Kozh crée son univers et fait bande à part avec un premier album à la personnalité déjà bien marquée.

Au-delà des barrières de style, Tan Kozh nous propose un premier album qui transpire l'authenticité et qui ne séduira que ceux qui n'attendent pas d'un groupe de black qu'il respecte un dogme. Le groupe n'en fait qu'à sa tête, développe son monde et ne cherche pas à épater la galerie. Si vous voulez du black qui met ses tripes sur la table et qui met l'accent sur la sincérité plus que l'imagerie ou le folklore, vous venez de trouver un bon client avec "Lignages Oubliés".