Le groupe
Biographie :

Tassi est un one-man band de post-black metal / shoegaze chinois formé en 2020 et dans lequel opère Dryad (chant, instruments / Bliss-Illusion). Tassi sort son premier album, "北之国 (Northland I)", en Février 2021 chez "北之国 (Northland I)", suivi de "北之国二 (Northland I)" en Février 2021, et de "北之国三 (Northland I)" en Mars 2022 chez Time Tombs Production.

Discographie :

2021 : "北之国 (Northland I)"
2021 : "北之国二 (Northland II)"
2022 : "北之国三 (Northland III)"


La chronique


Tout droit venu de Chine, Tassi, one-man band aussi connu pour participer au projet de black metal / shoegaze Bliss Illusion, vient nous proposer une sortie de black metal toute douce et teintée de shoegaze et de post-rock, les deux genres apportant une mélancolie et une légèreté que l’on retrouve souvent dans ces mélanges de genres. Le tout est réellement apaisant et amène à la contemplation de la beauté et de la simplicité de ce qui nous entoure. L’histoire derrière tout cela, d’après ce qui est révélé par le groupe, est celle d’un jeune barde du nom de Tassi qui se lance dans un voyage mystique et ésotérique en quête de son amour nommé Uni. C’est ainsi à travers plusieurs albums que cette quête est contée, suivant les différentes étapes de ce voyage de l’âme. "Northland III" nous amène à un moment où le barde se réveille dans le monde réel au pied d’une montagne, regarde les étoiles et commence son long voyage vers Uni.

Accompagné par de nombreux samples évoquant des phénomènes naturels comme une légère brise ou le bruit des vagues, allant et venant durant le morceau "Fog Of The Black Sea", ce voyage est ainsi bien plus imagé, aidant à s’y retrouver dans les étapes, de nombreuses voix samplées sont également présentes, dont une en français dans "Lake Of Fire", ces voix sont tantôt bien audibles tantôt lointaines, et souvent mélangées à des murmures, traçant une limite très fine entre le monde réel et celui des esprits. Et c’est ainsi dans les ambiances que les différents mondes arrivent à se distinguer, la où les parties calmes chantées en clair, évoquent plus un monde mystique et merveilleux bien que teinté d’une certaine mélancolie, une recherche de ce qu’on aime mais également de soi, les parties clairement plus axées black metal rappellent brutalement au monde réel et à tous les obstacles qui peuvent nous séparer de ce que l’on cherche. C’est ainsi tout naturellement que les deux ambiances sont souvent mêlées l’une à l’autre, additionnant les barrières naturelles à celles de l’esprit comme ça peut être le cas dans "Fairy".

Bien évidemment, pour rendre compte de toutes ces ambiances, les instruments classiques que l’on retrouve dans le black metal et la shoegaze ne sont pas suffisants et c’est ainsi toute une batterie d’autres instruments qui viennent donner à l’album toute sa puissance et sa diversité. Là où un violon viendra souvent dans le grandiose et des grandes envolées en fin de morceau, le piano, lui, va venir se poser sur des instants beaucoup plus nostalgiques, souvent accompagné par une voix qui semble distante, à peine chantée. Côté instruments plus communs, ces derniers ne sont clairement pas en reste, la batterie, si elle est en arrière-plan, vient constamment supporter le reste des instruments avec une précision et un mixage la rendant parfaitement audible, elle s’offre même quelques fulgurances, notamment dans la fin de "Merkabah". La guitare, elle, est totalement en accord avec de la musique post-rock / post-metal, se caractérisant par des accords légers et aériens rendant toute cette impression de légèreté, même lorsqu’elle est accompagnée par un chant black metal, partie où on s’attendrait à des riffs plus agressifs et des trémolos, ce n’est pas le cas, et cela participe grandement au fait que même les parties de metal extrême ne résonnent pas de manière agressive et donnent ces tons de black metal atmosphérique, en particulier lorsque le violon vient accompagner tout cela comme dans "Lake Of Fire".

En termes de chant, comme on peut s’y attendre dans un tel projet, on a affaire à beaucoup de chant clair, très maitrisé et portant une intense mélancolie. Le chant hurlé, très black metal, n’apparaît pas violent pour autant, notamment dans le morceau "Nostalgia" qui porte exclusivement ce style de chant, si bien sûr il reste un chant hurlé, il ne dégage aucune agressivité mais semble plutôt mettre en valeur ce que coûte cette entreprise et ce voyage, les épreuves et difficultés rencontrées mais jamais un abandon dans le désespoir et la profonde dépression, ce chant souvent lointain n’est pas sans rappeler quelques références du genre comme Alcest ou Woods Of Desolation. Un morceau vient cependant faire exception à tout cela dans l’album, en effet, "Memories Of Eerie Fantasies II" vient se placer comme un véritable morceau de depressive black metal avec un chant hurlé très caractéristique tombant parfois dans les aigus à la manière d’un Psychonaut 4, illustrant potentiellement un passé douloureux. Un morceau qui ravira les fans du genre tant il est bien exécuté et en reprend les codes avec compréhension et maîtrise.

L’album se teinte également de quelques ambiances électroniques, portées par des claviers, très légers, venant se placer en toile de fond et assistant les lointains chants murmurés, les voix d’enfants et autres chants clairs qui se retrouvent dans le morceau "Merkabah", qui semble être un point de pivot dans cet album, comme une légère pause dans ce voyage, un retour à la civilisation mis en lumière par toutes les voix différentes, et donc une brève évasion de la solitude si caractéristique du périple qui a été entrepris. Le morceau "The Voice Of The Luna" vient également se doter de petites ambiances électroniques venant accompagner un chant clair et se distinguant par des claviers dissonants, annonçant la fin d’un partie, mais également le commencement d’une autre.

Si la première moitié de l’album met largement l’accent sur l’aspect calme et ésotérique porté par des ambiances très shoegaze et post-black, la seconde moitié semble bien plus tourmentée, avec un chant hurlé bien plus présent, se déclinant en plusieures variations allant du chant lointain, au chant dépressif en passant par un chant presque inhumain semblant illustrer une rencontre avec ésotérique avec des esprits assez peu conciliants, dans "The Adventures Of Ethernet". Tassi nous propose ici un récit complet, comme le chapitre d’un grand livre musical en train de s’écrire, ce dernier passe par plusieurs étapes d’un long voyage, nous amenant à travers toutes ces épreuves tout en passant par des instants de souvenir qui semblent douloureux, les moyens employés sont énormes, en résulte une diversité dans les mélodies et ambiances proposées qui est tout simplement hallucinante et on en vient à se demander comment tout cela peut être issu du travail d’un seul homme tant tous les instruments sont maniés avec virtuosité, le mixage est propre, et la palette vocale est étendue, la seule chose qu’il reste à faire est donc d’attendre le prochain chapitre de cette histoire.


Praseodymium
Mai 2022


Conclusion
Note : 18/20

Le site officiel : www.facebook.com/bliss.illusion.cn