Le groupe
Biographie :

The Fall Of Mother Earth est le projet solo créé par Mathieu B., artiste rennais, ex-guitariste et cofondateur de Cebren-Khal (black / doom metal). The Fall Of Mother Earth distille une musique personnelle puisant son inspiration et ses origines dans un dark / post-black metal résolument mélodique et ambiant. C’est au cours de l’été 2020 que le projet voit le jour et que débute la composition d’un concept de deux albums, "Another Kind Of Consciousness" et "From Darkness To Light", dont les sorties sont prévues en Mai et Octobre 2022.

Discographie :

2022 : "Another Kind Of Consciousness"


La chronique


The Fall of Mother Earth – Another Kind of Consciousness Créer un groupe de toute pièce et en porter absolument tout de l’enregistrement des instruments en passant par la production et la distribution est un processus qui force absolument le respect tant le travail est colossal, c’est cependant le cas de plusieurs artistes qui, à travers cela, démontre leur virtuosité autant dans le domaine de la musique pure mais aussi dans celui de produire leurs albums. C’est le cas de The Fall Of Mother Earth, one-man band rennais sans aucun label, qui nous propose avec l’album "Another Kind Of Consciousness" une expérience de doom / death metal absolument fascinante, un véritable voyage. La démarche n’est pas sans rappeler des formations telles que Clouds qui excellent dans cette sphère musicale, mais cette fois sans les fioritures comme le violon, les instruments utilisés ici étant le classique combo guitare batterie et basse.

L’album nous propose donc de multiples ambiances, souvent apaisantes, parfois nostalgiques, à grands coups de riffs tantôt pesants tantôt plus percutants, comme l’introduction de "Aura" s’inscrivant dans une dynamique très death metal avec une production très crue, là où la suite du morceau va adopter des tons plus aériens tant dans les riffs que dans le mixage. Ce qui est d’autant plus fort dans tout cela, c’est que le chant guttural, qui se tourne vers une touche profonde et lente, parvient à toucher juste avec les deux types d’ambiances proposées dans le morceau, sans pour autant radicalement changer l’intensité et la hauteur de ce dernier. Le chant est justement un élément central de cet album, et dans le chant il convient également d’inclure le parlé car ce dernier est récurrent dans l’album. On passera ainsi souvent d’un chant guttural profond et triste à un chant clair mélancolique, pour parfois avoir également des mots déclamés tout simplement sur un fond musical bien souvent très tranquille, comme dans le morceau éponyme de l’album, qui sert également de morceau d’ouverture. Cette variété dans les chants, compte tenu une fois de plus que tout est porté par une seule personne, est simplement hallucinante et d’une maîtrise totale, autant dans la justesse que dans le mixage au sein des morceaux. Le chant clair ainsi que les petites notes de guitare en acoustique ne sont d’ailleurs pas sans rappeler dans les intonations les parties similaires de la formation Dark Tranquillity, ce qui constitue bien évidemment un point fort pour l’album même si ce dernier n’évolue pas dans le même courant musical. On trouvera également en termes de chant des chœurs féminins ainsi qu’un chant presque lyrique au sein de "The Dark Dimension", permettant ainsi de soutenir une introduction très introspective et intimiste, mais également de côtoyer le chant guttural et profond, en se mettant en arrière-plan.

Les transitions également sont très bien ficelées. Il est pourtant difficile parfois de passer de passages contemplatifs portés par des riffs aériens et frais à une avalanche de blasts portée par des trémolos rapides et agressifs, cependant cela est fait avec brio, notamment dans le morceau "Out Of Time" qui passe de l’un à l’autre sans soucis, et parvient à conserver la même ambiance de fond appelant à une contemplation mélancolique de la nature qui s’étend devant nous. Ce morceau est d’ailleurs une véritable machine à riffs mémorables, nous offrant des trémolos très entraînants, des riffs très doux qui se répètent dans une boucle totalement hypnotisante et que l’on voudrait interminable. Ce n’est d’ailleurs pas le seul morceau à réussir ce tour de force car sur ce domaine, le morceau le plus marquant de l’album en termes de riff est sûrement "Dust", traversé par une guitare dont la production est extrêmement raw, ce qui va lui donner un son complètement étranger à celui d’une guitare classique, se déclinant presque comme un chant lointain et traînant, rendant ce riff particulièrement mémorable.

L’album se teinte même parfois de touches de black metal, notamment à travers les trémolos et une production beaucoup plus crue qui se remarque particulièrement dans "Looking For Northern Lights" qui nous sert des accords lourds et percutants qui vont par la suite se décliner en une version plus rapide jouée en trémolo, accentuant ainsi l’accent black metal qui est pourtant suivi d’un chant qui reste dans un aspect très doom / death. C’est également le cas dans "The Dark Dimension" qui va pousser le procédé encore plus loin que le morceau précédemment évoqué, et induire le même genre de ressenti final, sans pour autant procurer un inconfort lié à la transition brutale. Cette hybridation fonctionne donc très bien et nous renvoie une impression de chute lente mais inévitable. Une chute qui, cependant, n’est pas redoutée ou crainte mais axée sur un certain regret nostalgique et pourtant contemplatif, comme mis en lumière par des ambiances beaucoup plus claires dans la suite du morceau, ainsi qu’un chant clair cette fois plus effacé dans le mixage. Cet LP se distingue également par sa façon de proposer relativement souvent des riffs, souvent courts, mais qui reviennent très vite et très longtemps, créant ainsi une boucle hypnotisante dont on peine à se sortir, comme c’est déjà mentionné plus haut pour le morceau "Out Of Time", on retrouvera également ce processus utilisé dans le titre qui porte le nom de la formation ainsi que dans plusieurs autres morceaux de l’album. En plus de la puissance musicale apportée par ce genre de procédé, vient également l’impact en termes d’implication de ce genre de riffs, qui nous entraînent souvent dans une boucle entêtante marquant le début d’un cycle qui touchera inévitablement à sa fin.

Ainsi, The Fall Of Mother Earth nous présente une douce mélancolie teintée d’un certain fatalisme qui est mis en lumière par des aspect plus black et death metal dans une musique pourtant résolument doom metal et finalement aussi très contemplative. L’album se distingue par une production changeante brassant une multitude d’ambiances et toujours maîtrisée, avec des transitions qui le sont tout autant. La virtuosité nécessaire pour composer et produire un tel album est tout simplement hallucinante et on ne peut que saluer tout le travail fourni par la personne derrière ce projet qui, rappelons-le, n’est sur aucun label. Un premier album d’une telle qualité est donc très prometteur pour la suite de ce one-man band qu’il faudra suivre avec une attention toute particulière.


Praseodymium
Août 2022


Conclusion
Note : 19/20

Le site officiel : www.thefallofmotherearth.bandcamp.com