Le groupe
Biographie :

Theotoxin est un groupe de death / black metal autrichien formé en 2016 et actuellement composé de : Joachim Tischler (basse / Zombie Inc.), Flo Musil (batterie / Distaste, Molokh, The Negative Bias, Zombie Inc., ex-Seeds Of Sorrow, ex-Raising The Veil), Martin Frick (guitare / ex-Avathar, ex-Dismal Lumentis), Fabian Rauter (guitare / Fabian Rauter, Tagarot) et Ragnar (chant / Schattenfall, Bifröst, ex-Flammensturm, ex-Selbstentleibung). Theotoxin sort son premier album, "Atramentvm", en autoproduction en Mars 2017, suivi de "Consilivm" en Mai 2018 chez Massacre Records, de "Fragment : Erhabenheit" en Septembre 2020 chez AOP Records, et de "Fragment : Totenruhe" en Octobre 2022.

Discographie :

2017 : "Atramentvm"
2018 : "Consilivm"
2020 : "Fragment : Erhabenheit"
2022 : "Fragment : Totenruhe"


Les chroniques


"Fragment : Erhabenheit"
Note : 19/20

Theotoxin poursuit sa route avec un quatrième album. Créé en 2016 en Autriche, le groupe sort son premier album l’année suivante. Mené aujourd’hui par Flo Musil (batterie, Agrypnie, Demersus Ad Nihilum), Fabian Rauter (guitare) et Ragnar (chant, Demersus Ad Nihilum, Schattenfall), le groupe sort "Fragment : Totenruhe" en 2022 chez AOP Records. L’album a été enregistré avec Martin Frick (guitare / basse), qui a récemment quitté le groupe pour laisser son poste à Torsten (Agrypnie, Nocte Obducta, The Wreckage Of Erebus…).

"World, Burn For Us" nous plonge rapidement dans une dissonance mélodieuse avant que les hurlements tranchants ne lancent l’assaut sous le blast et les riffs effrénés. L’atmosphère glaciale nous capture entre ses leads aériens pendant que la base solide nous frappe sans relâche à grands renforts du vocaliste avant que "Catastrophe In Flesh" ne continue sur les racines old school virulentes du groupe, intégrant même quelques éléments black / death des débuts. Les patterns agressifs accueillent aisément les leads tranchants qui alimentent la rage viscérale, puis le son s’apaise avant l’imposante "Towards The Chasm" et ses tonalités pesantes. Le morceau est moins rapide que les précédents, permettant au groupe de créer cette ambiance lourde et malsaine avant de revenir parfois dans la vitesse, puis dans la quiétude pour le final, qui nous mène à "Demise Of The Gilded Age" et ses riffs directs. On retrouve cette rage viscérale qui reste la même lorsque le morceau se pare d’orchestrations pesantes, mais également sur "After Thousands Of Years" et ses riffs froids qui laissent le groupe déverser toute sa haine et sa puissance.

Le vocaliste semble être totalement déchaîné, et les quelques choeurs qui l’accompagnent ne font que le confirmer avant que "Perennial Lunacy" ne nous fasse revenir dans les racines les plus brutes du black metal à l’esprit punk agressif, accrocheur et dissonant. Les riffs abrasifs nous maltraitent jusqu’à ce que "...Of Rapture And Dissolution" ne vienne assombrir le paysage avec des passages plus lents mais tout aussi angoissants qui créent un contraste avec les éléments les plus tranchants. On retrouvera également une mélodie étrangement apaisante après une charge épique, puis "Totenruhe" se dévoile progressivement pour nous enfermer dans sa tornade aussi agressive que dérangeante, laissant des leads inquiétants rivaliser avec des patterns bruts. Le très doux final laissera quelques pleurs nous mener à "Frontschwein", une reprise des suédois Marduk que le groupe a choisi pour rythmer la fin de l’album avec des sonorités martiales qui collent parfaitement à leur univers.

Si vous n’avez jamais entendu parler de Theotoxin, vous risquez de prendre une véritable claque auditive. Le groupe sait parfaitement se montrer brut avec des riffs directs, mais les musiciens nous dévoilent également quelques passages plus malsains sur "Fragment : Totenruhe", un album puissant.


Matthieu
Décemlbre 2022




"Fragment : Erhabenheit"
Note : 17,5/20

L’Autriche a toujours fournit d’excellents groupes de black metal : Abigor, Asmodeus dont l’album "Imperium Damnatum" mérite d’être écouté et reste trop peu connu, Dornenreich, Summoning ou encore Belphegor. Aujourd’hui, un petit nouveau, né en 2016, défend déjà son troisième full-length, c’est Theotoxin. Dans la plus pure tradition du metal noir, ce groupe porte les war paints, le cuir et les clous, et son logo présentait deux grosses croix renversées de chaque côté, de quoi prouver clairement son allégeance au malin. Aujourd’hui, le logo a évolué, le lettrage est plus lisible, avec comme unique symbole occulte une croix de Léviathan, peut-être une manière d’affirmer de manière plus intimiste ses idées tout en évitant les clichés dont le black metal a trop longtemps souffert, allez savoir.

Musicalement, dès les premiers instants, la musique s’offre à nous avec puissance, nous laissant apprécier un black de grande classe. En effet, nous sommes loin des productions minimalistes au sein desquelles le son est volontairement ou involontairement noyé, "Fragment : Erhabenheit" surprend immédiatement par sa force et sa production efficace. La balance entre les instruments est idéale, les différents éléments de la batterie sont tous bien audibles et l’équilibre grosse caisse, caisse claire et charleston consolide l’ensemble en ajoutant du corps et de la poigne. Les guitares, un poil plus lointaines, traduisent une sensation de noblesse et de suprématie qui s’ajoute à un feeling global à la fois animal et racé, grâce à une écriture très travaillée. La basse est bien ronde, parfaite pour ce genre de musique, quant au chant, rageux à souhait, il démontre une grande capacité de timbres, passant du chant suraigu écorché, parfois même à la limite du cri hystérique, à des tonalités plus gutturales ou guerrières.

Globalement, nous n’avons pas affaire ici à un black de gros sauvageons, même si certains titres comme "Sanatory Silence" ou "Philosopher" sont de véritables invitations au massacre, Theotoxin privilégie le développement de climats sombres et mornes, des tons bleu foncés, un chemin enneigé éclairé par les étoiles dont la lueur morbide accompagne nos pas à travers un sentier menant vers un destin de mort, vers de vieux sites de rituels sanglants qui aboutissent à l’inexorable. Comparativement, pour situer, il y a pas mal de similitudes entre le Belphegor récent et Theotoxin, surtout dans les moments les plus lourds et les ambiances vraiment sinistres. Le combo se la joue bien technique, surtout au niveau du drumming, mais dans l’approche, celui-ci reste malgré tout moins subversif que son grand frère.

Ce disque mérite plusieurs écoutes pour la simple raison qu’il n’a pas les atouts pour accrocher l’auditeur immédiatement. Il y a une structuration progressive des éléments musicaux avec une mise en tension qui s’installe de manière plutôt évolutive et de ce fait, si vous n’êtes pas concentrés sur le son lorsque vous vous passez l’album, vous allez forcément passer à côté de moments vraiment stimulants. L’exemple type, "Golden Tomb", premier morceau, qui conduit vers un riff de fin proprement majestueux et épique. Idem pour "Obscure Divination", qui mêle habilement à l’ensemble des nappes de synthé bien discrètes pour ajouter intelligemment de l’atmosphère, et alterne les passages intenses à d’autres plus burnés, voire thrashy.

Le maître-mot dans ce disque est "épique". La froideur est omniprésente également, mais ce que l’on retient le plus, c’est l’aspect grandiose des mélodies car tout est imbriqué de manière à ce que la musique monte en puissance. Pour apprécier pleinement ce skeud, il faut néanmoins éviter de l’écouter d’une oreille distraite, ce n’est pas le genre de black que l’on s’enfile en cuisinant ou pour animer un apéro entre amis, non, là il faut se poser, et se laisser embarquer dans le monde austère et désincarné au sein duquel Theotoxin règne en maitre. A cheval entre le black traditionnel et des tonalités plus actuelles, les Autrichiens ne sombrent pas pour autant dans le post black intello et défend clous et ongles la philosophie de l’art sombre, la flamme du cierge noir n’est pas prête de s’éteindre.


Trrha'l
Novembre 2020




"Consilivm"
Note : 16/20

"Maintenant, que deviennent, que deviennent les valses de Vienne", chantait François Feldman à la fin des années 80. Theotoxin, groupe de black / death en provenance de la capitale autrichienne, est bien loin de la mièvrerie du texte de notre chanteur populaire national. La valse, c'est pas leur truc à ces musiciens-là ! Eux, c'est dans les cryptes et les catacombes qu'ils pratiquent leurs pas de danse.

Ce qui est frappant chez cette formation récente, en dehors de la pochette très explicite sur laquelle on peut percevoir une religieuse qui pleure du sang, prête à se passer la corde au cou, c'est l'extrême noirceur qui se dégage de la musique. Theotoxin entretient le malsain, et le fait bien. Là où certains groupes, qui avaient le monopole du glauque et de la "evil attitude", et qui cultivaient une imagerie bien subversive, ont sombré dans une routine de sorties de disques ayant pour impact d'atténuer progressivement l'aura maléfique qu'ils diffusaient - je pense notamment à Belphegor, autrichien lui aussi, Theotoxin fait office de jeune loup motivé pour maintenir le désespoir et le chaos.

De ce fait, "Consilivm" est un concentré de noirceur, une musique négative soutenue par des riffs incisifs, des mélodies misanthropiques et de multiples passages mis en valeur par une technicité au service de l'efficacité. Le son des guitares est grave, poisseux mais très audible, la batterie est suffisamment en avant pour soutenir l'ensemble, sans étouffer le reste des instruments, quant au chant, les multiples registres, de la voix death au black, ajoutent de la variété à l'ensemble. La production est claire et puissante, deux qualités nécessaires dans ce contexte stylistique.

Au travers des 9 titres présents sur l'album, nous retrouvons tous les clichés du genre death / black. Alternance de passages vifs et mid tempo, atmosphère mélancolique, riffs en trémolos dissonants et passages thrashy entraînants. L'album est varié, captivant, l'attention dans l'écoute est préservée grâce à une structuration judicieuse des enchaînements et le format des titres, ni jamais trop longs, ni trop courts. Chaque plage est équilibrée et nous maintient dans l'ambiance ténébreuse du début à la fin, surtout les trois dernières compositions qui privilégient un côté plus doom et laissent entendre la guitare acoustique en mode "arpèges funéraires". Le dernier titre, instrumental, est un final magnifique et majestueux qui dénote de manière positive avec le reste de l'album. Comparativement à "Atramentvm", leur précédent méfait datant de 2017 (eh oui, deux full lengths en l'espace de trois ans d'existence, c'est beau quand même !), "Consilivm" est plus sombre, mélancolique et introspectif. Nous sommes en présence d'un groupe qui s'attache vraiment à privilégier l'ambiance tout en préservant l'efficacité. Il n'y a pas réellement de points négatifs à souligner pour ce nouvel opus de Theotoxin. Tout amateur de black / death y trouvera son compte.

Parmi la horde de formations officiant déjà dans ce registre musical, cette équipe récente a le potentiel de se démarquer tant sa musique est mature, maîtrisée et sincère. "Consilivm" est convaincant, il présente une évolution notable par rapport à "Atramentvm" tout en préservant les fondations stylistiques bâties par ces Autrichiens pleins de haine. Un groupe à suivre de près.


Trrha'l
Juin 2018


Conclusion
Le site officiel : www.facebook.com/theotoxinofficial