"Agma"
Note : 18/20
Wombbath termine l’année avec son sixième album. Créé en Suède en 1990 par Håkan
Stuvemark (guitare / basse, Grisly, Pale King, Skineater, ex-In Thy Dreams), le groupe a
connu des débuts sous d’autres noms, puis s’arrête après deux EPs et un album. 2014
marque le retour du groupe, et c’est avec Jonny Pettersson (guitare / chant, Heads For The
Dead, Massacre, ex-Just Before Dawn, ex-Skineater…), Jon Rudin (batterie, Just
Before Dawn, Pale King…), Thomas von Wachenfeldt (guitare, Wachenfeldt) et Matt
Davidson (basse, Repulsive Vision) que le groupe sort "Agma" en 2021.
"The Law Of Everything" nous projette immédiatement de force dans cet univers brut au son
bourré de HM-2, mais également de hurlements pesants et agressifs. La rythmique est
accrocheuse, tout comme "At The Giant’s Feet" et ses harmoniques sanglantes. Le titre joue
sur l’efficacité brute et le son gras mais également sur des choeurs déchirants sur la fin du
morceau avant que "The Seventh Seal" ne vienne apporter une dissonance sombre. Un
groove lourd se greffe au son avant qu’"Inquisition Reborn" et ses influences old school ne
vienne frapper, mettant en avant les harmoniques acérées sous cette base épaisse. Le
groupe nous accroche irrémédiablement, tout comme avec "Blindly They Will Follow" et sa
rapidité abrasive, qui se transforme en lourdeur entêtante avant "A World Of Destruction" et
son groove pesant. Le titre ne laisse aucun doute sur ses influences qui dévastent tout sur
leur passage, alors que "Misantropi Och Förakt" offre des mélodies tranchantes pour
accompagner la puissance brute, que l’on retrouve énormément sur "Breathe In The Flames",
un titre très efficace. La rythmique sait faire place à des parties plus majestueuses, comme
ce final qui nous conduit droit sur "The Age Of Death" et son contraste intense entre
orchestrations planantes et lourdeur apocalyptique.
Le son pioche très clairement dans les
éléments les plus puissants des deux parties, puis "Oh Fire Of Hate" nous écrase sous sa
dissonance et son énergie malsaine. Les racines brutes sont de sortie pour ce titre aux
leads perçants, puis "In Decay They Shall All Fester" ouvre les portes aux sonorités
inquiétantes qui accompagnent la rythmique lourde et ses hurlements puissants. Quelques
parties plus sauvages feront leur apparition avant "Divine Pain" et ses sonorités modernes
entêtantes, créant un contraste avec le son sombre des leads, tout comme "The Dead And
The Dying" qui injecte des influences blackened death metal à ce son malsain. "Departure
From The Light" propose une lenteur lancinante pour accompagner la rythmique pesante et
les choeurs fantomatiques, alors que "Scorned Existence" revient aux bases du death metal.
Crasseux et énergique, le morceau laissera toutefois place à des influences aériennes et
inquiétantes, tout comme à une efficacité mystique et des choeurs puissants, puis l’album se
referme avec "On A Path Of Repulsion", un titre rapide et brutal. Une fois de plus, on retrouve
des voix en arrière-plan qui alimentent cette oppression, qui se retrouve une fois de plus
dans la rythmique dissonante avant le final.
Wombbath continue sur sa lancée en conservant une base de death metal suédois abrasif.
Avec "Agma", le son s’éloigne parfois des racines pures, offrant des mélodies ravageuses,
des leads aériens ou une noirceur oppressante, ce qui renforce son intérêt à mes yeux.
"Choirs Of The Fallen"
Note : 16/20
Si vous écoutez du death metal, il n’y a qu’une infime chance que vous ne connaissiez pas
Wombbath. Créé en Suède en 1990 sous le nom de Seizure, le groupe change rapidement
de nom la même année puis nous dévoile ses premières productions à partir de 1992. Mais
après un split, un album et un EP, le groupe cesse ses activités en 1995… Pour mieux
revenir en 2014 !
Toujours menés par Håkan Stuvemark (guitare / basse, Pale King,
Skineater, ex-In Thy Dreams…), le groupe compte maintenant sur Jonny Pettersson
(chant / guitare, Ashcloud, Berzerker Legion, Heads For The Dead, Just Before Dawn et
nombre d’autres projets axés death metal), Jon Rudin (batterie, Just Before Dawn, Pale
King, ex-Ashcloud…), Thomas von Wachenfeldt (guitare, De Tveksamma, Wachenfeldt )
et Matt Davidson (basse, Repulsive Vision, Henry Kane) pour compléter la formation.
"Choirs Of The Fallen", le quatrième album de la formation suédoise, vient de sortir, et c’est
Giulio Rimoli (Deadborn, Ingurgitation Oblivion, prototypeLAB, ex-Black Therapy) qui
s’est chargé de la basse.
Dès les premières notes, on sent que c’est gras. Du death metal à la suédoise dans toute
sa splendeur. On retrouve cette graisse auditive dans les riffs bourrés à la HM-2 qui donnent
aux harmoniques un son tranchant. Côté batterie, ça roule littéralement sur tout ce qui
bouge, avec un tempo assez haut, du blast et des cymbales claquantes. La voix puissante
de Jonny fait des merveilles en alliant un côté old school rauque avec un mix qui laisse
toute sa place aux instruments. Quelques titres sont cependant un peu plus mélodiques que
d’autres, comme "From The Beggars Hand" ou "Void", mais c’est principalement la puissance
brute qui prime, comme "Fallen" et son introduction caverneuse. Quelques sonorités sombres
et inquiétantes viennent parfois étayer le death metal compact du groupe, avec notamment
"Wings Of Horror". Les influences death’n’roll que le groupe pratiquait sur l’EP de 1994
ressortent légèrement sur le titre éponyme, "Choirs Of The Fallen", où la double voix fait des
miracles de violence, et ce sont des ambiances mystiques qui ressortent sur "In A Cloak Of
Anger".
"Choirs Of The Fallen" n’est qu’une preuve de plus que Wombbath est à nouveau debout et
prêt à en découdre. Axés sur un son old school, le groupe n’hésite pas à inclure une pointe
de technicité, un groove gras et un soupçon de brutal death pour faire de son death metal
une leçon de musique ! Les fans seront conquis !
"The Great Desolation"
Note : 16/20
Les pauses permettent parfois aux groupes de revenir plus forts que jamais, comme l’ont fait
les Suédois de Wombbath. Fondé en 1990 sous le nom de Seizure, mais adopte le nom
actuel rapidement après. Mais après deux EPs, un split et un album, l’aventure Wombbath
prend fin en 1995. Pourtant, Håkan Stuvemark (guitariste d’origine) n’a pas dit son dernier
mot. Il reforme le groupe en 2014 et enregistre un nouvel album en 2015 ainsi que quelques
splits, mais le line-up subit quelques remaniements. Pour "The Great Desolation", le troisième
album, Wombbath est composé d’Håkan à la guitare, Johan Momqvist à la basse, Jonny
Pettersson au chant, Henrik Åberg à la guitare et Thomas Von Wachenfeldt à la batterie.
Une grosse demi-heure de pur death metal à l’ancienne, mais avec un son actuel et lourd.
L’album débute sur "Embrace Death", une composition martiale et puissante, qui témoigne du
son actuel du groupe. Un mur de son s’abat sur nous et vrombit au son de la basse de
Johan Momqvist. Les riffs sont sales à souhait, et la rapidité prime sur cette nouvelle
composition. Le chant de Jonny est toujours aussi impactant, et nécessite que l’on s’y
attende. "The Great Desilusion", le titre suivant est toujours dans la même veine, soit une
composition puissante. A nouveau, c’est un mur de son qui nous fonce dessus, et il est
impossible de le contrer. Vous pensiez que le groupe allait vous permettre de vous reposer
? Absolument pas, c’est "Footsteps Of Armageddon" qui prend la relève avec une rythmique
old school vrombissante qui fera headbanguer les puristes comme les nouveaux venus
dans l’univers du death metal.
La guitare lead de "Born In Filth" est une véritable surprise puisqu’elle est très mélodique alors
que la rythmique reste tout aussi sale et imposante. Serait-on revenu au début des années
90 à Gothenburg ? C’est en tout cas le parti pris des Suédois pour ce titre, mais pas pour
"Punisher Of Broken Oaths" qui revient sur un death metal old school sans concession. Les
harmoniques tranchantes viennent frapper l’auditeur de temps à autre, mais les riffs du
combo nous assomment en quasi-continu. La vitesse est mise de côté pour l’introduction
malsaine de "The Weakest Flesh", dont on peine quelque peu à entendre la batterie par
moments. Cependant, la qualité de la composition est là, et je suis particulièrement fan du
phrasé du chanteur sur le refrain.
Le son saturé continue de nous hanter sur "Cold Steel Salvation", avec un scream possédé
qui rejoint de temps à autre le growl caverneux de Jonny. Ce sympathique duo se déchaîne
sur tout le long des trois minuscules minutes que dure le titre, puis laisse la place à "Hail The
Obscene", qui commence de manière très calme. A la limite post-rock, l’introduction laisse
finalement place à un son dérangeant et plus lent qu’à l’accoutumée, ce qui permet au
groupe d’incorporer à nouveau quelques choeurs hurlés sur le refrain. Après de longues
parties lead accompagnées d’un son criard, c’est "Harvester Of Sin", le dernier titre qui
commence. Le groupe semble avoir envie de nous montrer ce qu’il a dans le ventre une
dernière fois avant de nous laisser, presque sur notre faim tant le dernier riff aurait mérité
d’être repris une bonne dizaine de fois avant le final.
Alors que Wombbath a repris du service il y a quatre ans seulement, on peut dire que ce
sommeil lui a fait un bien fou, et que le monstre est fin prêt à asséner des mandales par
dizaines. Plus que les excellentes compositions de "The Great Desolation", c’est maintenant
une performance scénique que j’aimerais voir.
"Downfall Rising"
Note : 16/20
Les uns après les autres et partout dans le globe, les anciens guerriers du metal des années 80 et 90 ayant, après quelques coups d'éclat musical underground, inscrit leurs noms au panthéon des formations "culte" (terme à prendre avec des pincettes), reviennent d'entre les morts pour ranimer la flamme sacrée et la passion du metal après des décennies de silence. L'école death old school scandinave ne fait pas entrave à cette tendance. Retours scéniques se concluant parfois sur des rééditions d'anciens disques introuvables auxquels l'argument mercantile "album classique, groupe culte, fondateur, précurseur blablabla" fait parfois piquer les yeux. Parmi ces groupes ayant plus ou moins conservé une place importante dans le cœur des fans de death putride nordique, citons les Finlandais de Purtenance, Convulse, Rippikoulu ou les Suédois de God Macabre et Nirvana 2002. Avec Internet, l'intérêt pour les œuvres de ces aînés qui ont forgé les scènes underground européennes est ravivé et il est compréhensible de les voir retenter leur chance.
Le cas présent se nomme Wombbath, un groupe suédois dans la plus pure tradition des vieux Grave, Carnage et Asphyx ayant accouché d'un album en 1993 passé à la postérité. Malgré un nom ridicule pour un groupe de death (on chroniquera prochainement le nouvel album du groupe de black / thrash satanique Ornithorinque), leur premier album "Internal Caustic Torments", à la pochette superbe et mythique faite par Sylvain Bellemare (auteur très peu connu des pochettes cultes du "Tales From The Thousand Lakes" d'Amorphis, du "Gods Of War" de Blasphemy ou encore de "The Mystical Gate of Reincarnation" de Kataklysm), vaut son pesant d'or et représente l'une des plus sombres perles du death suédois à l'ancienne.
Commençons par évoquer le gros point noir de cet album. La production. Wombbath, groupe de 90's à la personnalité affirmée, revient en 2015 et veut coller à l'esprit de l'époque avec une prod' moderne et puissante tout en conservant ce côté brut de décoffrage et organique lié aux anciennes sorties (les guitares sont grasses, graves, boueuses, ce grain sale si typique est toujours là, de même que la voix, un râle puissant et primitif, qu'on sent qu'elle a fait l'objet de peu de prises). Le problème est que cette prod' moderne est immonde. Une vraie abomination pour les oreilles. Compressée à l'écœurement, écrabouillée jusque dans ses moindres recoins, le mastering (pourtant l'œuvre de James Murphy) est calamiteux et le mix ne présente aucune dynamique. La Loudness War a encore fait des ravages. Cette "production (à défaut d'autres termes), est une purge et a gravement nui à notre écoute et notre appréciation de l'album, à tel point qu'une demi-douzaine d'écoutes ont été nécessaires pour parvenir à "pénétrer" la musique et la décortiquer. C'est horriblement fort mais rien n'en dépasse, rien ne vit. La batterie est uniforme, n'a aucun relief, tous les éléments y sont placés au même niveau sonore. Les riffs de guitares sont quasi-incompréhensibles et bien que nous soyons accoutumés aux prods dégueulasses et aux vieilles démos cassette enregistrées sur un quatre-pistes, jamais on a autant peiné à reconnaître des riffs de gratte. Le tout est une abominable bouillie sonore qui, de surcroît, fait mal aux tympans ! Les fréquences les plus aigues (les cymbales, les sons "sh" prononcées par le chanteur) crissent comme des ongles sur un tableau noir et le fait de baisser le volume sonore rend tout juste supportable l'écoute. On se demande pourquoi certains chroniqueurs du web n'ont pas relever ces défauts majeurs dans leurs reviews dithyrambiques ou comment le groupe a pu valider ça.
Passé avec difficulté cette épreuve, nous avons finalement pu "écouter" l'album et si ce premier contact s'est avéré désastreux, le fond sonore vaut la peine de se décarcasser. Après une intro annonciatrice du chaos à venir, "Under Apokalypsens Svarta Vingar" arrive et montre un groupe, à commencer par son guitariste de leader Hakan Stuvemark, seul membre original encore présent, qui n'a rien perdu de son talent de composition. Le titre est gras, old school, aux riffs acérés et au subtil solo de guitare, mélodique et tragique, tranchant nettement avec le souffre des riffs, mais qui est placé avec une justesse. Le nouveau chanteur, Jonny Pettersson est parfait, ses gargouillis profonds et habités posent une touche de démence putride dans la musique. "Underneath This Rotten Soil" affirme le côté moderne avec des blasts sanguinaires. L'excellent "I Am The Abyss", à l'intro grandiloquente tout aussi étonnante que les mélodieux soli mais tout aussi bien faite, détruit tout sur son chemin, nous faisant voir les profondeurs noires de la terre.
Le surprenant caractère du groupe a développer des intros mélodiques est une nouvelle fois de mise avec "Fall Of The Weak", avec des guitares claires et éthérées. C'est une des grandes forces de cette album, cela confère une ambiance irréelle à l'assaut constant et noirâtre des compos. "Fall Of The Weak" est l'un des meilleurs morceaux du disque, long, heavy, désespéré et maléfique, un torrent infini de maléfices qui ne semble jamais se terminer. La brutalité jubilatoire de "Paid In Blood" prouve que le marsupial a encore les dents longues et veut en découdre. Enfin, il faut parler du dernier titre, "Abandoned Furthermore", qui est une relecture de "Abandoned", morceau figurant sur le premier album, ici transfiguré dans une version romantique. L'essai est osé mais réussi. Wombbath se détache de la scène old school et expérimente, il ose broder son death rugueux avec des fils d'or étincelants et inattendus et cela nous amène à une conclusion amère.
Si musicalement "Downfall Rising" est excellent et abouti, mêlant classicisme (musique, format court, peu de titres, son typique des grattes) et innovations (les quelques déviations mélodiques et symphoniques), il est ruiné par une mise en son exécrable, un affront à tous les amoureux de musique. D'où un sentiment de gâchis immense nous habitant, ne nous permettant pas d'élever plus haut la note qui aurait pu taper dans les 18 facilement. Nous espérons que le groupe rectifiera la chose sur ces prochaines réalisations car ses créations musicales en valent la peine.