Le Star Café, un bar avec un étage et une petite scène, pas loin de la Tour Eiffel, paumé dans un passage souterrain un peu glauque. Une dizaine de personnes attendent déjà dehors. Les gars d’ABYSSE sortent et me reconnaissent tout de suite malgré presque une année depuis notre première rencontre, ça fait plaisir. Ils avaient alors joué au Hellfest 2010 en clôture du festival, prestation vraiment sympa qui avait réussi à réunir du monde au Metal Corner, alors que sur la Main Stage, Kiss faisaient leur show (show retransmis sur un écran géant face au Metal Corner). Des conditions difficiles pour un "petit" groupe qui s’en fichait, et qui ont eu raison puisque dans le public se trouvait une chroniqueuse de Rage Metal (radio de Brest) qui leur a couru après pour improviser une interview. Bref que du positif pour le groupe de Cholet, qui a annoncé qu’il entrerait au Dome Studio (Angers) en Août prochain pour enregistrer son premier album.
Le groupe arrive de Poitiers où il a joué la veille devant une quarantaine de personnes. Les garçons sont contents de leur perf comme de la soirée qui a suivi, certains ont cependant les pattes coupées par la route. Les choses n’ont pas l’air d’avoir commencé sous les meilleurs augures : non seulement les groupes n’ont aucune boisson offerte (même pas un pack de mauvaise Kro à se partager), mais le bassiste, Jérémy, nous apprend qu’ils devront payer de leur poche l’entrée de leurs invités. Super classe… Et le patron fait une fleur en ne réclamant "que" ¾ du prix public. Incroyable !

On rentre jeter une oreille au premier groupe, OUTSIDERS. Il fait déjà chaud dans la petite salle où deux malheureux panneaux de bois coulissant font office de fenêtres. Nous sommes une petite quinzaine dans le public, Outsiders se laisse bien écouter mais –honte à moi– je n’en ai pas beaucoup retenu.

A la pause avant FACE DOWN, une dizaine de personnes débarquent, visiblement des amis du groupe. Réflexion d’un des membres d’ABYSSE : "Bien, bien, venez les gens", moi : "Ca fait tout-de-même peu", réponse : "Oh, tant qu’on joue pas devant juste 5 personnes, on s’en fout !". Un peu plus tard nous montons à notre tour pour FACE DOWN. Arrivés aux escaliers c’est le choc, on se cogne presque à un mur de chaleur, un véritable sauna, même les boiseries suent… La faute en partie au groupe qui s’en donne à cœur joie sur scène et balance avec hargne son thrash, le chanteur vient régulièrement bousculer le public mais les débuts de pogo bon enfant se calment vite d’eux-mêmes. La salle est plutôt bien remplie, eu égard à sa petitetesse, nous sommes maintenant à pas loin de 40 personnes. On se défoule puis en fin de set tout le monde se rue dehors, qui pour respirer, qui pour s’en griller une.

Je reste avec ABYSSE pendant le montage de leur matériel, ils réussissent à gagner un peu de place en virant le micro et en rendant aux autres leur matos. Le groupe a prévu une ambiance simple : 4 néons de couleur bleu en guise d’éclairage et basta. C’est reposant, on a moins l’impression d’étouffer et ça colle bien aux visuels du groupe. 6 personnes dans la salle… Abysse se lance en se disant, comme moi, que le son du set commençant rameutera les gens du public restés à l’extérieur. Eh bah mes salauds, ils sont tous rentrés chez eux ou n’ont pas bougé leur cul du trottoir ! Ok, ABYSSE a cette particularité d’être entièrement instrumental, ce qui peut surprendre un public habitué aux déchaînements vocaux et qui aura peut-être l’impression qu’il manque un truc. Une réelle écoute de leur musique démontre cependant qu’elle se suffit à elle-même, sans manque d’énergie mais qui demande une patience et une curiosité parfois mises au placard par le public. ABYSSE a donc joué devant quelques zicos des deux groupes précédents et bibi, une petite dizaine de personnes, point barre. Mais le groupe n’en a cure, ils sont imperturbables et enchaînent les titres avec la même concentration pour Vincent et Geoffrey (les deux guitaristes), alors que Jérémy et Sébastien (batteur) sont à fond. Ceci dit, le peu de gens présents se bougent bien. Une question reste encore en suspend que j’aurais dû poser : pourquoi FACE DOWN n’a-t-il pas joué en dernier ?

Donc voilà, petit concert d’ABYSSE certes mais bien sympa et sans prétention, pas à l’arrache mais presque. Les garçons sont loin de se prendre la tête, sympa, causants et surtout pas rancuniers : même avec une salle pour ainsi dire vide, il n’a jamais été question de ne pas jouer. Cependant je suis dépitée pour eux. Premièrement parce que cette salle m’a parue plus proche d’un rade qui a trouvé le moyen de profiter d’une clientèle supplémentaire sur le dos des groupes (et de l’asso qui les fait jouer) que d’un bar permettant à des petits groupes de se produire en public par passion. Ensuite, parce que pour leur premier concert à Paris, le groupe ait été confronté à des gens infoutus de se bouger les fesses, ne serait-ce que pour monter un malheureux escalier… Les Parisiens n’ont pas fait honneur au metal ce soir-là.