La review

CRADLE OF FILTH + BEHEMOTH + IN SOLITUDE + INQUISITION + SVARTTJERN
Le Bataclan - Paris
11/02/2014


Review rédigée par E.L.P


Couleurs vives et criardes se virent interdire l’accès à la sombre voute du Bataclan où se tenait, en ce pluvieux jour de Février, une imposante messe noire en l’honneur des monolithes du genre... BEHEMOTH ! Accompagnant CRADLE OF FILTH et secondés par les trois formations de SVARTTJERN, INQUISITION et IN SOLITUDE, c’est sans l’ombre d’un doute, l’attraction de ce début d’année 2014 qui vient s’abattre sur notre bien aimée capitale !...



Tout commence avec SVARTTJERN, groupe attendu par un parterre tristement rempli à moitié. Jouant la carte "true black" norvégien jusqu’à l’en user, le groupe ne parviendra pas à émerveiller outre mesure tant le set servi manquera d’originalité, de relief et d’amplitude. Sur un pâle fond de Pop Redemption, la formation ornera son passage d’un évident manque d’aisance scénique qui ne sera pas sans rappeler certains groupes de thrash ancrant, parfois, eux aussi, fermement leurs racines jusqu’aux fondations du bâtiment. Poussant le cliché à son paroxysme, entre bracelets cloutés et corpses paints ruisselantes, les Norvégiens peineront à rehausser leur jeu pour nous présenter un set de qualité malgré l’envoi de certains de leurs nouveaux titres aux accents plus actuels. Une terne performance en tout opposée à leur qualité studio, soutenue par un son des plus indécis, nouant et noyant l’intégrité des compositions, et ne laissant que peu de répit aux oreilles attristées des fervents défenseurs de la scène black parisienne présents en ce début d’après-midi... Une bien mauvaise façon de se faire l’ambassadeur de son nouvel album ("Ultimatum Necrophilia") que celle choisie par le combo nordique dont le passage se révélera malheureusement des plus anecdotique entre excès de delay / reverb et rigidité post mortem !



Qu’à cela ne tienne, le temps d’un rapide changement de plateau, voici que le fier duo américain INQUISITION fait alors son entrée. Nombreux sont ceux qui, ici, ont eu le plaisir de découvrir cette atypique formation aux détours d’une scène bretonne de notre festival bien aimé l’année passée !... Et c’est une fois l’installation de Dagon et d’Incubus à peine terminée que va s’entamer la "transe" INQUISITION, dès les premières mesures du titre "Force Of The Floating Tomb", ouvrant avec un accent des plus vif, le set du duo. Preuve qu’un groupe n’est en rien forgé par le nombre de musiciens qui le compose, le duo parvient à enchanter, entraîner et impliquer les spectateurs dans son univers, un univers torturé et pesant, tirant sa puissance d’implaccables et malfaisants riffs shreddés de Dagon, alliant chants d’inspirations Immortal, envoûtantes mélodies païennes et charisme inédit compte tenu de la préstation d’ouverture ! La frappe d’Incubus n’est, quant à elle, pas à reléguer au second plan, tant les rythmiques envoyées par l’ensemble ont le potentiel de faire sombrer les âmes les plus torturées présentes ce soir (comme sur le pesant "Those Of The Night" ou le profond "Astral Path To Supreme Majesties" empreint d’une noirceur païenne). Manifestement plus intéressé (l’univers s’y prêtant divinement bien) le public sera malgré tout légèrement retenu par la qualité du son présentant (chose rare pour le Bataclan), encore quelques lacunes de rigueur ainsi que de terribles ambiances lumineuses tristement devenues monnaie courante ces temps-ci sur les scènes parisiennes !...

Setlist : Intro "Force Of The Floating Tomb" "Nefarious Dismal Orations" "Command Of The Dark Crown" "Embraced By The Unholy Powers Of Death And Destruction" "Those Of The Night" "Crush The Jewish Prophet" "Astral Path To Supreme Majesties" "Infinite Interstellar Genocide".



Le public finalement rendu à la salle après cette immersive invocation de Lucifer, le voici confronté, après quelques minutes d’un efficace changement de plateau, à ce qui sera la plus grande interrogation de la soirée (peut-être autant que la présence de BEHEMOTH autrement qu’en tête d’affiche) : les Suédois d'IN SOLITUDE ! Arrivant avec une énergie toute autre, et flirtant avec certains codes scéniques de combos electro-rock / alternatif actuels, voici que l’énigme de cette affiche plutôt orientée "extrême", entame sa prestation avec "Death Knows Where", issu, comme 3/4 de leur setlist, de leur dernier opus, un opus chargé d'énergie et empreint d’un univers malheureusement foncièrement moins profond que celui du précédent... De nombreux soucis techniques émailleront également la prestation du groupe (sur "Lavender" et "A Buried Sun" notamment) qui jouera avec envie, certes, mais devant une fosse consternée ne saisissant pas la portée de ce style que les amateurs de formations telles qu’Arabrot auront eu le loisir d’apprécier !

Setlist : "Death Knows Where" "Lavender" "A Buried Sun" "Horses in the Ground" "Sister" "Witches Sabbath".



Les bars environnant ayant été pris d’assaut à la suite de la mitigée prestation suédoise, le public revenu désaltéré et, pour certains, repu, aura le loisir de découvrir, outre une salle où il est désormais difficile de se déplacer, une scène intégralement embellie et respirant la pesante empreinte de BEHEMOTH, probablement la réelle attraction de ce soir !... Revenu d’entre les morts, le Roi Nergal, que l’on croyait perdu, nous a donc été rendu les mains pleines avec l’album motivant leur présence ce jour, le virulent "The Satanist". Une mise en scène savamment orchestrée mélangeant effets de fumées, azote, flammes et jeux d’ombres, voici que la scène revêt des allures de cryptes, la Messe Noire peut commencer !... Et c’est tout naturellement aux noirs titres phares de ce dernier opus d’ouvrir le bal : les incroyables "Blow Your Trumpets Gabriel" et "Ora Pro Nobis Lucifer". Largement acclamée dès son entrée, la formation ayant minutieusement pris place poursuivra son habile démonstration avec des titres plongeant au plus profond de leur riche discographie tels que le viscéral "Decades Of Therion" ou l’explosif "Christians To The Lions" ! Occupant la scène derrière les pupitres ornés de cobras et encadré par sa Sainte Trinité composée des massifs Inferno (batterie), Orion (basse) et Seth (guitare), l’annihilation par le titan Black actuel bat son plein ("Alas, Lord Is Upon Me" et "Furor Divinus" ne feront d’ailleurs que confirmer cette hypnotique emprise du carré sur un parterre conquis)... ! Les mots "charisme", "envoûtement", "impérieux" et "puissance" figureront parmi la masse d’adjectifs largement attribués au carré ayant laissé s’abattre sur l’assemblée toute la désolation dont ils détiennent les secrets. Mélodiquement solides, rythmiquement constants (malgré, là, quelques accrocs), les 4 Polonais auront donc eu a coeur de tenir leur rôle de pilier actuel du genre au travers de leur conclusion "O Father O Satan O Sun", renvoyant les spectateurs, conquis, vers la tête d’affiche : CRADLE OF FILTH...

Setlist : "Blow Your Trumpets Gabriel", "Ora Pro Nobis Lucifer", "Conquer All", "Decade Of Therion", "As Above So Below", "Slaves Shall Serve", "Christians To The Lions", "Hidden In A Fog", "The Satanist", "Ov Fire And The Void", "Alas, Lord Is Upon Me", "Furor Divinus", "At the Left Hand Ov God", "Chant For Eschaton 2000".
Rappel : "O Father O Satan O Sun!"



L’importante logistique déployée par le quatuor désormais sorti de scène, il faudra attendre une bonne quinzaine de minutes pour voir apparaître une scène étonnement vide, sobrement ornée de 2 marche pieds, d’un pied de micro moulé d’os et d’un écran déroulant accueillant de quelconques images soutenant la prestation du groupe prenant place : CRADLE OF FILTH ! Changement radical d’ambiance, tandis que Dani (chant), fait irruption sur scène. Ne tenant plus en place, le frontman engoncé dans les nombreuses couches de son accoutrement et suivi de ses acolytes parviendra rapidement à lasser une bonne partie de la foule, décidément venue acclamer le retour de Nergal, avec, entre autres "Summer Dying Feast", "Beneath The Howling Stars" ou "Nymphetamine Fix"... Un morne manque d’effets et un charisme laissant honteusement à désirer, le point fort de la formation assurant la clôture de cette soirée restera malgré tout la maîtrise vocale de Dani, ce dernier assurant, sans pitch aucun, ses parties (aussi suraiguës fussent elles), telles que reconnues sur support physique et ayant fait les grandes heures de l’ensemble ! Ce ne sera malheureusement pas suffisant pour le sombre public (majoritaire ce soir) qui se verra quitter peu à peu la salle avant même la fin du set. Seuls resteront, jusqu’à "Funeral In Carpathia", les amateurs de cet équilibrisme stylistique qu’est CRADLE OF FILTH, oscillant entre black metal chancelant et univers gothique manquant d’assise malgré certaines puissantes parties instrumentales empreinte d’une rare maturité pour le groupe !

Setlist : "At The Gates Of Midian" (intro), "Cthulhu Dawn ", "A Dream Of Wolves In The Snow", "Summer Dying Fast", "The Principle Of Evil Made Flesh", "Beneath The Howling Stars", "For Your Vulgar Delectation", "Haunted Shores", "Nymphetamine Fix", "Born In A Burial Gown", "Cruelty Brought Thee Orchids", "Her Ghost In The Fog".
Rappel... Ave Satani" (interlude), "Funeral In Carpathia".

Ainsi donc s’achève cette soirée, une soirée en extrême demi-teinte à la vue du bilan dressé concernant les groupes gravitant autour des titans polonais... Une affiche parfois énigmatique, dont le style, le professionnalisme et surtout la créativité restent encore à prouver mais n’ayant fort heureusement pas desservie le fracassant retour, tout en pyrotechnie, en prestance et en ornements de scènes, du fier quatuor ayant rempli, à lui seul, nombres de coeurs : BEHEMOTH !
Merci à Garmombozia et à toute son équipe pour cette affiche entre chiens et loups...

Photos tirées de : www.elp-photo.fr