La review

GAAHL'S WYRD + THE GREAT OLD ONES + AUÐN
Le Petit Bain - Paris
03/12/17


Review rédigée par Matthieu


Les nuits parisiennes sont glacées en ce moment. Surtout sur les bords de Seine. C’est d’ailleurs au Petit Bain que le maître Gaahl et son groupe GAAHL'S WYRD nous a donné rendez-vous pour cette fin de week end, tout en emportant dans son sillage le groupe français de post-black THE GREAT OLD ONES et les Islandais d’AUÐN. Si les deux premiers sont loin de m’être inconnus, ce sera une pure découverte pour la formation islandaise.



Les portes du bateau s’ouvrent, et c’est une horde de fans avides de noirceur qui entrent tranquillement pour investir le premier rang. Le matériel du groupe est déjà en place, il ne reste plus qu’à attendre. Lorsque les lumières s’éteignent et que les musiciens débutent le premier titre, la transe s’installe. Sur le devant de la scène, Andri Björn Birgisson, Aðalsteinn Magnússon (guitares) et Hjálmar Gylfason (basse) remplissent à eux seuls l’espace alors que Sigurður Kjartan Pálsson (batterie) nous assomme déjà de ses frappes millimétrées. Alors que nous pensions tous que le show avait vraiment commencé, Hjalti Sveinsson (chant) paraît enfin, entamant un chant torturé et empreint d’une souffrance palpable. Le black metal atmosphérique qui nous parvient est d’une beauté que je regrette profondément de ne pas avoir connu avant. Je serais incapable de vous dire quels morceaux ces cinq hommes ont joué ce soir, mais l’impression qu’ils ont faite à une fosse qui ne cesse de se remplir parle d’elle-même : leur nom revient dans toutes les bouches, et leur stand de merch' est de plus en plus visité. Concernant les lumières, elles sont fidèles au style : un rideau d’un bleu aussi sombre que leur musique fond sur nous, mais qui s’éclaircit parfois pour nous laisser entrevoir à quel point les musiciens, tous en costume pour une sobriété à toute épreuve, s’investissent corps et âme dans leur musique. Certains hurlements sont doublés par Aðalsteinn, pour un effet encore plus prononcé et c’est avec stupeur qu’ils nous annoncent leur dernier morceau. Même si les musiciens parlent un peu à la fosse, ils semblent détachés, mais leur set fut beaucoup trop rapide, bien que j’en aie profité à chaque instant tellement la musique a envahi mon être.

Setlist : "Farvegir Fyrndar" (sur bande), "Veröld Hulin", "Lífvana Jörð", "Haldreipi Hugans", "Prísund", "Ljósaslæður", "Blóðrauð Sól", "Eilífar Nætur", "Skuggar", "Í Hálmstráið Held".



Le changement de plateau s’effectue rapidement. J’ai à peine le temps de passer au bar prendre une bière, que les Français prennent possession du plateau. J’avais déjà eu une assez mauvaise expérience avec THE GREAT OLD ONES il y a quelques années, mais j’ai décidé de leur laisser ce soir une deuxième chance. Tous encapuchés, Jeff Grimal (guitare / chant), Benjamin Guerry (guitare / chant), Léo Isnard (batterie), Aurélien Edouard (guitare) et Jérôme Charbonnier (basse) débutent leur rituel. Alors que je m’extasie sur la basse de Jérôme, qui est d’ailleurs celui qui s’investit visiblement le plus lors de la prestation du groupe, les riffs des Français heurtent le public de plein fouet. Que ce soit lors des samples ou des titres joués par le groupe, la fosse semble investie d’une seule et même volonté : le headbang. Les Bordelais instaurent l’ambiance pesante et intense qui les caractérisent, mais un petit détail m’empêche de rentrer pleinement dedans. Quel est ce détail ? Je n’en ai aucune idée. Mais il va me gâcher la prestation de THE GREAT OLD ONES, dont l’univers Lovecraftien me plaît énormément, et dont ils arborent d’ailleurs tous le massif pendentif. La scène est clairement dépouillée, même le pied de micro que j’avais adoré il y a deux ans n’est plus. Lors du dernier morceau du set, je me risque tout de même à un headbang hasardeux, mais je ne semble définitivement pas fait pour leurs compositions, qui enchantent la salle entière.

Setlist : "Searching For R. Olmstead" (sur bande), "The Shadow Over Innsmouth", "When The Stars Align", "Je Ne Suis Pas Fou" (sur bande), "Antarctica", "Visions Of R'lyeh", "The Ascend", "Wanderings" (sur bande), "Mare Infinitum".



Alors que les musiciens se hâtent sur scène pour nettoyer la scène, ce sont les Norvégiens de GAAHL'S WYRD qui se préparent en coulisses. Soudain, tous entrent en scène. Gaahl (chant), vêtu de sa veste en cuir, est toujours aussi impressionnant et monopolise l’attention, bien que ses compères soient tout aussi maquillés et menaçants que lui semble serein. Le show débutera avec un titre de "Trelldom", avec un chant clair qui donne l’impression d’un rituel païen. Lorsqu’il n’a pas à chanter, Gaahl est immobile, le bras armé de son micro. A côté de ça, ses musiciens s’en donnent à coeur joie, en faisant quelques grimaces au public lorsqu’ils jouent. Les deux guitaristes (que je crois être Sir et Lust Kilman (ex-God Seed)) n’hésitent pas à se pencher sur la fosse ou à headbanguer tout en laissant la place à Gaahl lorsque celui-ci en a besoin. Il est surprenant de voir à quel point les hurlements de Gaahl sont tout aussi justes et effrayants que son chant clair est planant et ésotérique. Mais le plus impressionnant se produit lorsque l’homme vous fixe. Que ce soit à distance en tendant sa main avec laquelle il fait le signe des cornes, ou que vous soyez au premier rang et qu’il vous tient la main, vous seul existez à ses yeux. Tel un géant au corps sombre, il se déplace lentement et sans mouvement superflu, alors que le bassiste et le batteur donnent toute leur énergie dans le show. Alternant entre des morceaux de God Seed et Gorgoroth, le groupe déploie un black metal puissant et sans aucune concession face à une fosse qui se révèlera être pleine à craquer. Lorsque les musiciens quittent la scène, les cris du public ne tardent pas à les faire revenir pour deux morceaux supplémentaires. La sortie de scène se fera sous des applaudissements plus que mérités.

Setlist : "Steg", "Til Minne…", "Slave Til En Kommende Natt", "Sign Of An Open Eye", "Awake", "Aldrande Tre", "Høyt Opp I Dypet", "Carving A Giant", "From The Running Of Blood", "Lit", "Alt Liv", "Exit", "Through Carved Stones", "Wound Upon Wound", "Prosperity And Beauty".
Rappel : "This From The Past", "Incipit Satan".

Le bilan de la soirée est plus que positif. Alors que j’allais regagner mes pénates, j’aperçois deux membres d’AUÐN, plus qu’enclins à la discussion, qui signent avec plaisir des autographes. Les derniers membres sont facilement repérables, grâce au bassiste qui est allé jusqu’à en chercher quelques uns en coulisses, alors que Gaahl et sa bande sortent à côté de la scène, visiblement heureux de leur show et du retour du public. La sécurité, plus qu’insistante, tentera de dissuader les quelques personnes qui restent encore, mais c’est heureux que je repartirai de la péniche, avec ma photo bien au chaud sur la carte mémoire. Ce soir, j’ai vu un démon, et il était en pleine forme.