La review

MAYHEM + MERRIMACK
Le Divan Du Monde - Paris
22/05/2014


Review rédigée par Boris


Divan du Monde, 19h15, une queue dans la rue s'étend sur 300 mètres. Le spectacle est plutôt attrayant pour quelques touristes qui ne manquent pas de faire quelques photos de cette communauté de gens étranges, multiraciale, majoritairement à cheveux longs, vêtu de noirs, de cuir et de clous. Faut dire que dans le cadre de sa tournée européenne, MAYHEM n'a prévu qu'une seule date en France... après 7 ans d'absence sur le territoire (je passe sa venue au Hellfest en 2011). Malheureux pour les provinciaux qui devront se contenter, entre autres, du souvenir d'Attila déguisé en... lapin, je pense au concert de Bordeaux en 2007. Un paradoxe puisque l'histoire d'amour entre la France et la Norvège en ce qui concerne le black metal n'est plus à prouver et cette soirée-là en est le couronnement.



Pour amorcer celui-ci, MERRIMACK a le privilège d'ouvrir pour les Norvégiens maudits sur toute la tournée. Fondé en 94, les Parisiens considérés comme des pionniers du black metal en France, ont débuté par jouer un black metal sympho inspiré d'Emperor pour évoluer ensuite vers quelque chose de bien plus violent, direct et torturé plus proche d'un Marduk ou d'un Watain. Fort d'un intense quatrième album "The Acausal Mass", le quintette livre un show des plus sombres et malsains, à l'image de son nouveau frontman Vestal (également brailleur chez Anus Mundi et Lugnasad). Derrière les titres d'une grande fluidité, on sent une grande qualité d'écriture alternant passages d'une violence sans borne et mid-tempo inquiétant pour le moins expressif !! Lacéré, salement grimé, cheveux crasseux, Vestal impose une présence vraiment singulière avec un physique androgyne et une voix très puissante, alternant chant black haineux et vociférations d'outre-tombe (copyright à Attila !!). A tout moment on ne sait s'il va s'effondrer de douleur ou se jeter dans le public pour planter quelqu'un... le cliché de l'écorché vif ?... Oui, s'il n'était soutenu par une musique féroce et des musiciens solides. Bénéficiant d'un très bon son, MERRIMACK séduit le public qui répond présent aux sensations fortes et aux performances extrêmes !



Sept années d'attente donc avant de retrouver le légendaire MAYHEM, qui est à la musique ce que Le Caravage fût à la peinture, tant pour sa quête de la transgression que de la déchéance. Témoins d'histoires tragiques qui allaient devenir le ciment et l'identité du groupe, il faut rappeler que MAYHEM a toujours eu le génie et la force de transcender ses démons et a su les figer dans son art. A force de provoquer la mort, jusqu'à l'excès, les membres de MAYHEM se sont donc pris la vie en pleine gueule pour devenir une exception, car peu de gens peuvent comprendre dans leur chair ce qui s'est passé, et s'est bouleversé de l'intérieur... Voir MAYHEM en concert serait donc recevoir cette aura si particulière, une tranche de l'humanité la plus sombre mis en lumière par les feux de la création. Morbide ? J'avoue... mais aussi pédagogique.
Le groupe arrive donc sur scène avec l'intro "Sylvester Anfang" qui nous ramène des années en arrière, en 87 (issu du fameux "Deathcrush"), l'âge de pierre des Norvégiens. Ambiance tribale, primitive, mystique, sous un tonnerre d'applaudissement. Hellhammer se réfugie derrière un kit impressionnant, tandis que Krister "Morpheus" Dreyer (nouveau venu dans la bande) arrive encapuchonné tel un fantôme, ou plutôt en Faucheuse. Pour cette tournée, Attila semble avoir laissé de côté ses originalités, pas de déguisement de lapin, de croupier ou encore de père Noël. Le vocaliste s'impose en grand mage occulte, le visage grimé de manière chaotique, sanguinolent à l'image du nom de son groupe. "Pagan Fears" déchaîne alors la foule qui a définitivement rempli la salle sous le regard menaçant de Necrobutcher (basse) et celui plus posé et concentré de Teloch !! Excellent son !! Hellhammer impressionne, tandis qu'Attila assure le spectacle, se la jouant Hamlet, manipulant un crâne au gré de ses performances théâtrales et vocales entre cris stridents et incantations vibratoires... Scotchant !
La setlist est juste parfaite ! Entre le mysticisme plus ou moins "barré" d'un "Illuminate Eliminate", "De Mysteris" bien sûr, "Psywar" (nouveau titre qui frise la transe dans sa seconde partie) et les débordements punk borderline d'un "Carnage", c'est bien le "true" MAYHEM que tout fan souhaitait voir. Aucun album n'est mis de côté. Ainsi de "Chimera" sera joué le pulsionnel et addictif "Whore" ou encore "To Daimonion" de "Grand Declaration Of War", interprété originellement par Maniac. Le groupe confirme cette générosité en invitant le guitariste français Silmaeth (qui jouait déjà les mercenaires pour les Norvégiens de 2009 à 2011) au ¾ du set. La tornade "Freezing Moon" fait alors trembler le Divan du Monde sous les hurlements des hordes en furie, ça bouge dans tous les sens. Il est d'ailleurs de plus en plus compliqué de se frayer une place pour prendre des photos correctes... Entre deux ou trois pogos plutôt énergiques, une certaine tension se fait toutefois ressentir dans la fosse... A priori, la faute à un pèlerin trop agité qui se fera calmer à plusieurs reprises. Le show se termine sur le tonitruant "Pure Fucking Armageddon" qui s'achève de manière violente. Le groupe quitte la scène remerciant le public, Hellhammer tout sourire balançant ses baguettes tandis que la chanson "I Put A Spell On You" retentit dans la salle...

Setlist : "Silvester Anfang", "Pagan Fears", "Deathcrush", "Buried By Time And Dust", "To Daimonion", "Symbols Of Bloodswords", "My Death", "A Time To Die", "Psywar", "Illuminate Eliminate", "Whore", "De Mysteriis Dom Sathanas", "Chainsaw Gutsfuck", "Freezing Moon", "Carnage", "Pure Fucking Armageddon".

Je n'avais encore jamais quitté une salle de concert avec les frissons, accompagné d'une musique qui en disait long sur le passage d'un groupe. La chanson de Screamin' Jay Hawin, ici, version "Creedence Clearwater" n'était pas innocente, une manière pour MAYHEM d’asseoir (non sans humour) son pouvoir autant que pour remercier son public fidèle et conquis.