La review

NOJIA + KRAV BOCA + BLUE COFFEE EXPERIMENT
La Dynamo - Toulouse (31)
03/03/2015


Review rédigée par Thomas
Photos prises par Mathilde


Cette soirée, organisée à la Dynamo par Quali District, regroupait trois groupes d'horizons et d'univers totalement différents. Tout d'abord, BLUE COFFEE EXPERIMENT qui joue dans un registre metal expérimental / prog' / jazz / djent […], un joli melting-pot quoi... ensuite, KRAV BOCA, groupe de rap-rock très énergique qui a la particularité d'avoir une mandoline électrique ainsi que de mélanger le grec et le français dans ses textes. Pour finir, NOJIA, groupe de rock / metal ambiant au talent immense... Nous avions donc une belle soirée en perspective...



La Dynamo n'était pas très pleine lorsque Blue Coffee est entré sur scène, vers 20h30. La première chose notable est que leur son était bien meilleur que la fois précédente. Tout était bien plus clair et propre. Il n'y a pas eu beaucoup de changements dans la setlist si ce n'est l'exclusion de deux morceaux. Leur concert a quand même duré une bonne heure... La seconde est le fait que le groupe semblait bien plus soudé, de ce fait, les morceaux joués semblaient plus cohérents. On avait réellement la sensation que les musiciens prenaient plaisir à nous livrer leur musique ainsi qu'à jouer ensemble. Comme d'habitude leur niveau technique était affolant et les titres étaient d'une complexité à en avoir mal au crâne mais de par cette cohésion, ils paraissaient plus accessibles. Troisième et dernière chose notable : Pablo au chant était plus à l'aise. Sa voix était plus audible et mieux maîtrisée et il était bien plus interactif avec les autres membres du groupe. BLUE COFFEE EXPERIMENT nous a sûrement livré l'un de ses meilleurs concerts. Plus le groupe avance, plus sa musique et son jeu mûrissent. A surveiller de près...



KRAV BOCA est un groupe de rap toulousain. Mais ce n'est pas un groupe de rap ordinaire où l'ont voit un MC débiter ses textes sur des samples. C'est un groupe de rap avec trois MCs et surtout de vrais musiciens. Un guitariste, un mandoliniste (électrique), un bassiste et un batteur. Leur musique est un mélange de rap / hip-hop assez old school soutenu par des instrumentaux rock assez groovy et influencés par des groupes tels que Rage Against The Machine ou les Red Hot Chili Peppers. Au niveau des textes, ils mélangent le français et le grec car l'un des trois MCs est originaire de Sparte (d'après leurs dires). Seulement, pendant leur prestation, les paroles étaient difficilement audibles, mais nous reviendrons sur ce point un peu plus loin. Les musiciens avaient tous un look et une allure différents mais ils n'avaient pas de tenue spéciale et aucun déguisement particulier contrairement au MC... Lors de leur entrée, ils sont arrivés tous trois cagoulés, un peu à la manière de Guy Fawkes et des Anonymous. L'un tout de blanc, le second blanc avec une cravate noire et le troisième intégralement de noir vêtu. Ces déguisements et la présence scénique des trois rappeurs ont clairement fait leur effet... La musique était entraînante, bien faite et le public était des plus réceptifs aux nombreux appels des MCs. La Dynamo était presque comble et les gens bougeaient à tout-va. Le gros souci était clairement le son et la répartition des voix. La mandoline avait un grand panel d'effets, donc avec un son un peu trop dénaturé, la guitare et la basse étaient parfois noyées par toutes les voix. Seule la batterie ressortait du lot, forcément. Les trois chanteurs étaient dans le même registre vocal et utilisaient le même timbre. Il y avait donc une sorte de flot vocal incessant qui est assez rapidement devenu "encombrant"car peut être un peu trop sur-mixé. Cette trop grande présence vocale et ces trop nombreux entrelas n'ont pas permis de comprendre les paroles qui avaient pourtant l'air assez bien écrites et réfléchies. Heureusement, cela n'a en rien affecté la dynamique de la musique du groupe ni celle qu'ils véhiculaient au public. C'était un show dynamique et résolument entraînant où l'on sentait une réelle franchise dans la musique et l'implication des membres de KRAV BOCA. D'un point de vue purement personnel ça ne correspondait pas à mes goûts musicaux, mais il faut reconaître que c'était très bien fait.



Ceux qui ont vécu le fabuleux concert de Sólstafir à la Dynamo comprendront clairement ce dont il sera question dans ces lignes. NOJIA est un groupe atypique. Ils le sont parce que leur musique est instrumentale mais ils le sont aussi parce que cette même musique pousse à l'introspection et va chercher des émotions au plus profond de nos êtres. Ils jouent une sorte de rock / metal très atmosphérique et planant, tantôt ténébreux et rampant, tantôt clair et onirique. Leur premier album "Solarchitect", paru en 2011 était un véritable chef-d'oeuvre mais ils ont frappé encore plus fort avec le joyaux qu'est "Gheist". Cet EP de trois titres, limité à 198 exemplaires physiques et long de trente deux minutes est digne de figurer parmi les plus grands disques de ces dernières années... Alors on en attendait énormément de leur part en live et nous n'avons clairement pas été déçus. C'est l'un des rare concerts où nous étions plusieurs à avoir la sensation de distortion temporelle : l'heure durant laquelle ils ont joué nous a semblé passer en seulement cinq minutes...
Quelques lights rougoyants, un peu de fumée et tout a commencé... Ils sont entrés sur le premier titre de "Gheist", "Canyon" et la grosse centaine de personnes qui restait a été happé dans leur univers à l'instant même où les premières notes ont raisonné. La cohésion entre les quatre musiciens était parfaite : des regards, de l'écoute, mais aussi des yeux fermés et une musique vécue à cent pour cent... Les morceaux de NOJIA contiennent une grand part d'improvisation et c'est dans ces instants que toute cette cohésion prend son sens... C'est alors qu'on s'aperçoit de tout le talent et de toute la virtuosité dont font preuve les musiciens. Ce n'est pas une virtuosité démonstrative, elle est retenue, maîtrisée, utilisée à bon essient... Malgré le fait qu'il n'y ait eu aucun mot de prononcé avant la fin du dernier morceau, les membres de NOJIA faisaient tous preuve d'une belle présence scénique. Le son était limpide, tout était clair. Nous étions tout devant donc que ce soit au travers des retours ou en façade, les balances étaient impeccables et chaque instrument était audible. Emotionnellement, c'était un instant très difficile à décrire. C'était comme une profonde méditation, une introspection au tréfonds de nous-mêmes où la réflexion laisse place aux ressentis et aux perceptions. Nul besoin de regarder, nul besoin d'effets scéniques. Il suffisait juste de se laisser porter sur cet océan émotionnel. Comme il est dit plus haut, c'est vraiment à mettre en parallèle avec le concert de Sólstafir que nous avions vécu le 29 Janvier dernier.
NOJIA est trop méconnu car leur style n'est pas forcément accessible et peut-être aussi car c'est un side project ? (Micka, le guitariste de NOJIA est bassiste chez Eryn Non Dae., autre très bon groupe toulousain)Seulement, ils mériteraient de l'être bien plus. Ils mériteraient qu'on parle plus d'eux et que leur musique soit mieux diffusée car ce qu'ils proposent est unique. Ce concert en est le témoignage. Des lignes et des lignes pourraient être écrites à leur sujet, cela serait inutile. C'est une musique du ressenti, une musique de l'instant. C'est une musique à vivre, que ce soit en studio comme en live. Nous avons eu droit à un moment immensément riche et prenant, d'une beauté à couper le souffle...