Interview faite par mail par JU

Salut, Loïc, pourrais-tu présenter ton travail en tant que manager en quelques lignes ?
En quelques lignes, pfffffiou… Disons que j'ai inauguré en 2009 un service dénommé MUSICA DIABOLI MANAGEMENT, opérant au titre de l'activité accessoire au sein de l'entreprise de médiation culturelle que j'ai créée en 2007 et que je dirige depuis. MUSICA DIABOLI n'a fait que donner un nom à une pratique du management de groupes datant de 2008 environ. Le travail lui-même est assez vaste en fonction des groupes dont je m'occupe ; l'essentiel réside en de la gestion stratégique de carrière et de développement : prospection de labels et négociation de contrats, endorsements, communication, conseil juridique, relations média, entre autres. Pour le reste, je fais également du booking et du tour management selon les configurations.

Pourquoi ce métier et comment s’y prépare-t-on ?
Pourquoi ? Parce que ça s'est imposé à moi. Je suis un rocker. Au-delà des phrases toutes faites, c'est un mode de vie. Aucune concession là-dessus. Outre cela, je suis ce que l'on appelle un "professionnel de la culture", ayant fait mes armes dans les sphères de l'Histoire et du Patrimoine, tout en ayant depuis mon plus jeune âge eu les deux pieds dans la scène rock 'n' roll au sens large du terme. Lorsque j'ai créé ma propre activité dans le domaine de la médiation culturelle, des rencontres et les circonstances ont généré une diversification de mes activités ; c'est ainsi que MUSICA DIABOLI est née. Pour être très honnête, j'ai côtoyé des masses de "professionnels" issus de filières préparant directement aux métiers du spectacle vivant et / ou du management d'artistes. Et crois moi, ce n'est pas une garantie de compétence et de probité. A contrario, évoluer depuis sa prime jeunesse dans le milieu du metal ou dans celui d'une autre des sub-cultures rock 'n' roll ne donne ni légitimité professionnelle, ni ne prédispose comme par magie à la pratique professionnelle du management ou de la production, par exemple. Je pars du principe que la meilleure façon de s'y préparer reste d'être curieux, d'accumuler les expériences encadrées, de fournir un travail acharné et méticuleux, et de ne rien laisser au hasard.

Sachant que la crise est malheureusement implantée dans le domaine de la musique, comment procèdes-tu pour que tout se passe pour le mieux ?
La crise est devenue le plus universel des prétextes pour certains des décideurs du music business. Loin de moi l'idée de sombrer dans le déni ou dans le conspirationnisme : cette crise existe et elle touche une bonne partie des sphères de l'activité musicale, du D.I.Y. aux majors. Mais on aura toujours besoin de labels quoi qu'on en dise, toujours besoin de promoteurs, et paradoxalement, bien que ça puisse aisément s'expliquer, j'ai rarement vu une telle éclosion de groupes qu'en ce moment. Maintenant, il est clair que l'on fait face à de nouvelles difficultés, ou à des difficultés plus anciennes qui s'amplifient. La meilleure façon de s'y adapter, à mon sens, est de se montrer probe, intègre, limpide. J'ai en permanence à l'esprit l'intérêt des groupes que je défends, quitte à refuser régulièrement des propositions que je juge proprement indignes. La scène rock en général, et metal en particulier, aurait besoin d'une sérieuse introspection sur les effets induits de ses actions, même si elles sont le plus souvent animées par de bons sentiments.

Combien de temps par semaine cette profession t’occupe-t-elle ?
Sachant qu'une semaine de travail dure en moyenne 60 heures dans mon microcosme, tu peux en compter en ce moment la moitié pour Musica Diaboli, l'autre étant dévolue à Vox Historiae, l'activité de médiation culturelle.



Comment se sont passées les rencontres avec les groupes et en particulier Fleshdoll ?
Comme souvent, en concert ou autour d'un bec pression. Je navigue particulièrement dans la scène rockabilly, et le premier groupe dont je me sois occupé de façon professionnelle est The Gutter Boys, une formation Bordelaise, dès 2008. Ils ne sont plus au roster de MUSICA DIABOLI depuis le début de l'année, mais ont été déterminants. Aujourd'hui, le catalogue est composé de Las Pistolas (Raucous Records), un groupe de neo-rockabilly Britannique que j'ai rencontré en produisant une date à Toulouse pour laquelle je les ai programmés en tête d'affiche, Reckless Ones (neo-rockabilly, U.S.A.) qui m'avaient sollicités suite aux bons échos qu'ils avaient eu sur mon travail, et Minushuman (metal, Bergerac), qui sont des amis de longue date, et dont je suis fan depuis leur époque Dark Poetry. J'ai précisément rencontré Fleshdoll en les programmant en première partie de Minushuman sur une date que j'ai co-produite à Toulouse plus tôt cette année. Je suis resté de loin en contact avec Bastich, le growler du groupe, et celui-ci est revenu vers moi en fin d'année pour me demander si je pouvais épauler la formation au niveau du plan média dans le cadre de la sortie de leur nouvel opus, "Animal Factory". Parce que j'aime les challenges et que je gardais un très bon souvenir d'eux, j'ai accepté. Et parce que j'aime les semaines de 70 heures, les imitations de Lemmy réussies et le vieil armagnac, il n'est pas impossible que je reste.

Quels sont les groupes que tu aimerais bien gérer ?
Wow… C'est en effet le genre de questions que je me pose en me rasant. Pour être très honnête, il doit y en avoir peu. D'abord parce que je suis déjà très occupé. Ensuite parce que nombre d'entre ceux à qui je pourrais penser n'ont pas besoin de moi ! Mais dans la série des groupes qui, je pense, mériteraient d'être travaillés davantage ou différemment et avec qui je pourrais m'entendre humainement et artistiquement, je penserais en premier lieu à Mustasch (Gain Music / Nuclear Blast, Suède). Parmi les groupes de metal en développement, je dirais Sacred Storm (U.S.A.). Maintenant, si tu me trouvais une DeLorean DMC-12 équipée de "time circuits" alimentés par 1,21 gigawatts pour aller faire un tour en 1975 et que Rainbow me faisait une proposition, je promettrais d'y réfléchir.

Que penses-tu des avis de certains disant du mal de la musique metal aujourd’hui ?
Si tu fais référence aux bigots et autres partisans d'un ordre moral plus que douteux, clairement : je les emmerde. Ils se manifestent depuis que le rock 'n' roll existe. Les premières apparitions scéniques de Elvis ont engendré toute une série de qualificatifs péjoratifs sur son œuvre, au premier rang desquels "devil's music" (le lien avec le nom MUSICA DIABOLI est établi). Comme quoi les baptistes pourrissant les funérailles de Dio en Californie ou les intégristes aspergeant le site du Hellfest d'eau bénite n'ont rien inventé. Notre musique, notre culture s'est aussi construite comme ça : dans l'adversité. Pourvu que ça dure.

Suite à la question posée ci-dessus, est-ce que cela peut être un frein à la propagation du metal ?
Non, ce fut, c'est et ça restera un facteur de cohésion supplémentaire pour la famille du metal. Qu'ils parviennent à nous prendre un festival, et dix réapparaîtront dans la foulée.

Quelque chose à rajouter pour ceux qui liront cette interview ?
Merci d'avoir pris le temps de l'avoir lue jusqu'au bout, d'abord ! Pour le reste, keep on rockin' ! Et… Ah oui : n'hésitez pas à me payer une bière si on se croise.


Le site officiel : www.facebook.com/musicadiaboli