"...Discontinued"
Note : 18/20
Il aura fallu attendre quatorze ans et passer par trois ans de travail pour qu'Argile termine enfin son œuvre avec un troisième album nommé "Spleen Angel". Un pavé de soixante-dix sept minutes soit quasiment le double de la durée des deux premiers albums ! Formé par Philippe Courtois (alias S.A.S de l'Argilière chez Misanthrope), le line-up a par la suite été complété par les autres membres de Misanthrope. Deux groupes qui ne partagent pas seulement les mêmes membres puisqu'on y retrouve surtout la même implication, le même feu sacré et la même abnégation.
Ce nouvel album sort évidemment chez Holy Records, label historique qui a contribué à élargir les goûts de certains d'entre nous par ses signatures atypiques et dont la distro a longtemps fourni une belle partie de ma discothèque (la collection de CDs, pas la boîte de nuit). Comme sur les deux précédents albums, il y aura plus d'un lien avec le Celtic Frost de "Into The Pandemonium" par ici, le groupe ayant clairement été monté comme une sorte d'hommage au départ. Sans compter que l'album en question a révolutionné pas mal de choses au sein du metal extrême et bousculé pas mal de monde à l'époque de sa sortie. Entre l'incorporation de cordes, de chant féminin et le fait d'ouvrir l'album par "Mexican Radio", il y avait de quoi anéantir tous ceux qui avaient aimé le côté cru et bestial de "To Mega Therion" ! Mais revenons-en à ce "Spleen Angel" qui s'ouvre sur le déjà très sombre "Mineral StyxMata" qui nous renvoie à la fois au metal extrême atmosphérique du début des années 90 d'un côté et à des relents goth ou cold wave de l'autre, en particulier dans le chant. C'est "Resurrection Of The Flesh" qui ouvre vraiment le bal et cette fois ce sont presque les ambiances étranges et oniriques des premiers Septicflesh que l'on croit entendre par moments. De toute façon des clins d'oeil au doom ou au death des années quatre-vingt dix il y en a pas mal sur "Spleen Angel", ce qui renvoie justement à pas mal de signatures Holy Records de l'époque. "BlueWine (Lips Of Doom)" enchaîne avec quelque chose de bien plus varié et dense qui passe de cavalcades quasiment heavy metal à de gros blasts tout en plaçant quelques cassures rythmiques et d'autres plans plus doom ou death. Vous êtes prévenus, ce nouvel album est exigeant ! Les morceaux sont tous assez longs et il s'y passe pas mal de choses, ce qui me fait dire qu'il va laisser pas mal de monde au bord de la route.
On nous répète que la capacité d'attention des gens diminuent et que faire un album de plus de quarante minutes tient de l'inconscience, autant dire que la durée de "Spleen Angel" tient du suicide ! Cela va passer pour un passage de pommade mais pas grave. Il est tout de même rassurant de voir des groupes qui font ce qu'ils veulent, suivent leur vision et ne se préoccupent pas de quelconques chiffres de vente. À l'heure où notre musique de "passionnés" se retrouve constellée de groupes qui s'écharpent au tribunal pour récupérer les droits sur les noms ou qui tournent pendant trois ans sur un de leurs anciens albums pour remplir facilement les caisses, il est bon d'écouter des gens qui sortent de tout ça. Il est d'ailleurs toujours aussi étonnant d'en entendre autant se plaindre du manque de relève pour remplacer les dinosaures, ou du manque de renouvellement de la scène en termes d'innovation musicale d'un côté et de les voir de l'autre foncer comme des pigeons vers les dites tournées anniversaires. Mais revenons-en à la musique du groupe et à ce "Zephyr Penitent" par exemple qui fait entendre des sonorités orientales, des passages plus groovy et un petit solo de basse en plein milieu de passages plus doom ou death ! C'est aussi ça qu'Argile à hérité de Celtic Frost, l'envie de faire sauter les barrières et ne pas avoir peur de tenter des choses qui semblent étranges à première vue. Et ce n'est pas la puissance tellurique, l'ambiance parfois malsaine, les cassures rythmiques et les riffs massifs de "Giant Titan Mysteries" qui vont calmer le jeu. On se permet même quelques incursions électroniques sur "Macabrieta" qui prend du coup des airs bien plus froids et déshumanisés ou encore des lignes de chant clair et des leads sur "Maldoror" qui renvoient clairement à S.U.P.
Cette chronique aura mis du temps à arriver mais la bête ne se laisse pas apprivoiser facilement. "Spleen Angel" signe la fin de la discographie du groupe, la trilogie est enfin terminée et si Argile donnera, on l'espère, encore quelques concerts c'est bien la fin cette fois. Vous avez donc tout le temps de vous pencher sur les trois albums du groupe et découvrir ou prolonger l'écoute d'un groupe qui n'aura décidément rien fait comme les autres du début à la fin. Rien que pour l'intégrité de la démarche, l'abnégation de ses membres et l'implication qui suinte par tous les pores, on ne peut que recommander d'aller jeter une oreille attentive à cet ultime pavé. "Spleen Angel" est exigeant, profond et demandera une certaine ouverture d'esprit mais l'effort sera récompensé à terme.
"Monumental Monolith"
Note : 15/20
S.A.S de l'Argilière nous revient avec un nouvel album d'Argile, autre projet développé en parallèle de son groupe Misanthrope, toujours entouré de son acolyte préféré. Rejoint par Gaël Ferret, le combo nous propose une réelle suite à "The Monotonous Moment Of A Monologue".
J'avais découvert un titre d'Argile sur la compil "Holy Bible II" en 1999 avec le fantastique et nommé "Fire Before Snow". Argile avait sorti un premier album en 2002, puis S.A.S de l'Argilière était retourné à ses activités au sein de Misanthrope.
Voici que 10 ans plus tard, je reçois le nouvel album d'Argile. A ce moment, beaucoup de questions me passent pas la tête sur l'évolution de ce projet...
A la première écoute, j'ai l'impression de me retrouver au lycée (que j'ai quitté en 1997) à écouter "The Silent Enigma" ou "Shades Of God" and co. Ici, n'attendez pas un son metal moderne ! Argile met en avant un son que l'on pourrait presque qualifier de "à l'ancienne". On pourrait croire à un hommage à tous ces groupes qui furent leurs influences.
Argile propose toujours un heavy / doom / death. Mais Argile C'est un peu la côté sombre et désespéré de Misanthrope. Point de blast ou de braillements. Ici on parle plus de sensibilité que de violence.
Tout en gardant un côté heavy très présent notamment avec le recours de soli, de passages plus thrash / death, alternés régulièrement avec des passages vraiment plus doom atmosphérique qui laissent la place nécessaire au chant de s'exprimer et qui me rappelle parfois Cultus Sanguine.
A noter une reprise de Celtic Frost, "Mesmerized", qui, malgré que l'on sente l'écart générationnel avec la musique d'Argile, trouve bien sa place sur cet album. Le seul bémol de cet album serait pour moi des morceaux qui ne sonnent pas très modernes mais restent vraiment fidèles à ce style qui berça mes oreilles dans mon enfance.
Si vous connaissez Argile et que vous avez aimé le premier album, vous aimerez celui-ci. Si vous êtes fans des groupes doom / death anglais des années 80 / 90, foncez également.
Un album qui séduira sans concession les fans de heavy / doom / death des groupes des années 80 / 90.
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