Bekor Qilish est un one-man band italien qui a déjà sorti un premier album en 2022 ("Throes Of Death From The Dreamed Nihilism") chez I, Voidhanger Records et qui nous amène son second méfait sur le même label avec "The Flesh Of A New God". Vous devriez commencer à savoir à quoi vous attendre puisqu'on a déjà parlé plus d'une fois des sorties de ce label atypique. Bekor Qilish donne donc dans un death / black metal expérimental avec quelques influences progressives.
Si le premier album présentait déjà une musique riche et complexe, il gardait une durée courte qui permettait de l'encaisser assez facilement, vingt-sept minutes cela passe plutôt vite. Cette fois c'est quarante minutes de musique que propose Bekor Qilish et cela va donc être une bonne occasion de voir si Andrea Bruzzone sait où il va. Il est effectivement facile de trop s'étaler et de perdre tout le monde lorsqu'on double quasiment la durée d'un album à l'autre, "The Flesh Of A New God" va donc nous dire si oui ou non le projet est doté d'une vision. Et pour casser le suspense la réponse est oui ! "Defaced Background" ne perd pas de temps et nous confirme très vite que la musique de Bekor Qilish est toujours aussi complexe et pioche toujours allègrement dans le death, le black et la thrash. Il y a toutefois suffisamment de riffs efficaces là-dedans malgré les nombreuses cassures rythmiques pour accrocher l'oreille, et même si ce premier titre est déjà touffu et assez technique il retient notre attention. Quelques mélodies se font entendre au milieu des nombreuses dissonances et autres break inattendus, de quoi là aussi offrir quelques points d'accroche. "Unobtainable Transformations" se fait parfois plus brutal et direct mais garde une complexité qui passe par mal de cassures rythmiques là encore. De toute façon, Bekor Qilish aime proposer des morceaux à tiroirs et il y a ce qu'il faut de ruptures de ton. Bon point aussi pour la production qui opte pour un assez propre et clair qui permet de saisir ce qui se passe sans avoir besoin de entendre l'oreille.
C'est agréable d'entendre un groupe qui ne tombe pas dans le cliché de la production brouillone et grasse au possible souvent utilisée pour amplifier le côté chaotique de la chose. Ici, c'est au contraire limpide et la moindre nuance s'entend sans problème. "The Flesh Of A New God" est un album intense, brutal et expérimental mais il arrive à nous embarquer dans son monde en équilibrant bien les différentes sonorités qui le composent. Bekor Qilish sait se faire complexe et technique pour densifier son univers mais n'hésite pas à se montrer plus direct et brutal quand il le faut. Ce deuxième album est donc tout aussi éprouvant et riche que son prédécesseur mais de toutes les sorties de I, Voidhanger Records, c'est probablement une des plus simples à approcher. Si certains groupes, de ce label ou ailleurs, font tout pour être les plus chaotiques possibles, Bekor Qilish se sert de cet aspect pour amener une dimension particulière à sa musique. Il ne reste pas piégé dans ce schéma et n'hésite pas à proposer des riffs plus simples, plus percutants pour envoyer quelques passages brutaux ou plus accrocheurs (dans une certaine mesure hein, on n'est pas en présence d'un groupe de pop non plus). "Unearthly Dominion" propose d'ailleurs un passage mélodique qui tranche bien avec l'ambiance plus sombre et brutale que l'album faisait entendre jusque là. Tout comme l'instrumental "Unaware Gods" qui fait entendre quelque chose de plus aérien malgré le tempo assez rapide.
Bekor Qilish confirme donc avec "The Flesh Of A New God" le potentiel que l'on pouvait déjà sentir sur le premier album. Si les morceaux sont cette fois plus longs, on ne se perd jamais dans un dédale d'expérimentations pour autant. La musique de ce one-man band garde toujours un minimum de mélodie ou de riffs plus directs pour accrocher l'oreille et même si l'ensemble est éprouvant, on n'en ressort pas totalement perdus.
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