Adipocere reprend vraiment du poil de la bête en tant que label puisqu'il sort le premier album de Bloody Flow, un groupe français qui délivre du bon gros stoner bien gras. Un premier album sans nom, ou qui porte celui du groupe si vous voulez, avec une pochette délicieusement typée années 70 qui annonce un esprit bien rock'n'roll.

Et le morceau-titre qui ouvre l'album confirme tout ça avec un tempo bien lourd, très doom et qui renvoie clairement à Black Sabbath avant de passer la seconde et d'invoquer un rock gras aux guitares baveuses et à la basse vrombissante aux senteurs typées Kyuss. On peut presque sentir le sable et l'huile de vidange qui viennent s'agglutiner dans les enceintes. "Rock'N'Roll Is The Only That'll Never Let You Down" se fait plus nerveux et rajoute un peu de Motörhead là-dedans avec des riffs plus directs et une envie d'envoyer la sauce sans se prendre la tête. Mais Kyuss est probablement l'influence qui s'entend le plus, ne serait-ce que dans ce son de guitare et de basse gras et baveux qui renvoie directement à ça. Et dès que ça ralentit le rythme, c'est bien Black Sabbath qui vient à l'esprit, comme sur "Bloobs On Your Tits" qui balance une ambiance plus sombre avec un rythme bien plus pesant. Mais même si l'influence des mythiques Anglais est reconnaissable, Bloody Flow y ajoute ce grain de sable typique du rock bien gras et en fait quelque chose de groovy et qui penche plus vers le fun que vers la messe noire. "Kill The Witch" est plutôt sympa aussi dans le genre avec là aussi un rythme plus lourd, et un groove presque bluesy dans l'esprit. Le nom de Down est cité dans la biographie du groupe et c'est peut-être sur ce morceau qu'on peut vraiment le discerner, par cette même influence du blues rock justement et cette petite odeur de bayou. Là encore c'est très efficace, ça sonne bien, ça balance du bon riff qui tache et ça vise l'efficacité et l'accroche.

Au rayon des défauts, on pourrait dire que certains morceaux, dont le premier, sont un poil trop longs ou pas assez variés pour la durée. Le chant pourrait aussi se faire soit plus mélodique, soit plus rageur mais ne devrait pas hésiter à bien se lâcher, on sent presque une légère retenue, ce qui est dommage puisque l'énergie des morceaux s'accommoderait très bien d'un chant totalement désinhibé. Les influences sont assez discernables aussi mais tout ça s'explique par deux points, le premier étant que le groupe fait ça pour le fun et veut se faire plaisir. Le deuxième étant tout simplement la jeunesse du groupe qui s'est formé pendant la période de confinement et balance donc un premier album assez rapidement. Rien de dramatique cependant et avec le temps tout ça pourra être affiné sans problème, on ne va pas trop reprocher à un premier album de ne pas être parfait. D'autant qu'on sent un état d'esprit fun comme dit plus haut, que ce trio se fait plaisir et n'a pas d'autres prétentions que celle d'avoir la banane et de la donner à d'autres en jouant ce type de musique. Et ça c'est plutôt réussi avec des morceaux qui ne se posent pas de questions et ruent dans les brancards avec les potards dans le rouge. Certes Bloody Flow n'invente pas la poudre mais sait plutôt bien la faire parler, son stoner est classique mais efficace et suinte le rock bien gras à tous les étages. Niveau son, on a une basse bien en avant qui fait plaisir, des guitares qui bourdonnent juste ce qu'il faut pour amener la dose de graisse syndicale et une batterie qui ne sonne pas comme un ensemble de boîtes de conserve.

Bloody Flow nous amène donc un premier album classique mais direct et efficace qui balance un gros rock stoner bien gras, plein d'énergie et plutôt fun. Quelques petits défauts certes mais c'est un premier album et le temps corrigera tout ça, d'autant qu'il y a tout de même de bonnes choses par ici et que les amateurs du genre seraient bien inspirés d'y jeter une oreille.