Une fois de plus, le label I, Voidhanger Records nous sort une bizarrerie qui sort largement des sentiers battus avec le premier album des Américains de Fleshvessel, "Yearning: Promethean Fates Sealed". Une mixture étrange de death metal et de progressif avec des instruments inhabituels pour le genre tels que la flûte, le glockenspiel, le piano, la trompette, l'ocarina ou encore la clarinette ! Ouverture d'esprit exigée comme pour toute sortie de ce label décidément atypique.
Déjà, il va falloir rester concentré puisque malgré les cinquante-cinq minutes que dure l'album le tout n'est réparti que sur sept pistes dont trois courts instrumentaux, cela nous laisse donc trois morceaux de onze minutes et un de dix-sept minutes ! Ici quand on parle d'influences progressives, c'est au vrai sens du terme, c'est à dire dans le sens où Fleshvessel mélange toutes sortes de sonorités sans se soucier d'une quelconque barrière stylistique ou de la moindre considération commerciale. Le groupe n'expérimente pas pour le simple plaisir de le faire, il se sert de cette ouverture et de ces expérimentations pour enrichir sa musique, apporter des ambiances puissantes et parfois surprenantes, bref pour donner une âme et une véritable personnalité à sa musique. Cel n'empêche pas le fait que "Yearning: Promethean Fates Sealed" est un album exigeant, éprouvant et intense qui va demander une certaine ouverture d'esprit et toute votre attention. "Winter Came Early" ouvre l'album tout en douceur avec piano et violon avant de sortir les guitares et le chant de goule à cheval entre le black et le death. Pour autant, Fleshvessel ne choisit pas de verser tout de suite dans la brutalité, le tempo reste mid dans un premier temps et le groupe en profite pour faire entendre des mélodies belles et dérangeantes à la fois. Il y a évidemment du progressif dans ces structures changeantes et ces ruptures de ton, ainsi que dans le mélange d'influences et d'instruments divers. Mais ce qui va rendre l'écoute de l'album éprouvante et compliquée pour certains n'est pas liée à une complexité technique que le groupe évite soigneusement, ce sont plutôt ces multiples changements d'univers qui risquent d'en désarçonner quelques uns. Parce que si la première partie de ce premier morceau est assez calme, la seconde devient à la fois plus brutale et plus folle, les blasts s'y succèdent au milieu de soli de clarinette, violons et piano complètement barrés !
Le premier interlude "Promethean : Vignette I" fait du bien après une telle déferlante de folie expérimentale, deux petites minutes au piano avec de belles mélodies et tout de même une ambiance plus dérangeante en fin de morceau. Ce qui laisse la place à "A Stain" qui démarre de manière tout aussi folle mais surtout bien plus rampante avec double grosse caisse et riffs death metal dissonants en renfort. Les blasts eux aussi reviennent bien vite se faire entendre et les sonorités death metal se font bien plus présentes rappelant parfois les cinglés de Portal. Quant au break possédé qui débarque en milieu de morceau, on est pas loin de certains délires free jazz ! Certaines transitions sont parfois trop abruptes et le groupe nous perd par moments, il manque encore d'un peu de cohésion et de liant là-dedans pour vraiment former un tout. Il y a cependant de bonnes idées et une volonté claire de défricher de nouvelles terres, la volonté d'expérimenter devra être tenue de manière un peu plus ferme à l'avenir mais Fleshvessel pose de bonnes bases avec ce premier album. "The Void Chamber" n'est pas en reste non plus et part dans tous les sens en prenant parfois des airs de jam et d'improvisation totale, pas le meilleur moyen pour accrocher l'auditeur là non plus. Mais bon, quelque chose me dit que ce n'était pas du tout le but et que Fleshvessel préfère nous perdre dans les méandres de sa folie, une folie qui s'exprime par un passage presque joyeux et dansant au bout d'un peu plus de cinq minutes de délires totalement dingues, dissonants et difficiles à suivre. Les dix-sept minutes de "Eyes Yet To Open" qui ferment l'album ne vous laisseront pas beaucoup plus d'air pour respirer, d'autant que le groupe y refait entendre des passages brutaux et death metal avec pas mal de blasts.
Au final, Fleshvessel nous amène une carte de visite intéressante avec "Yearning: Promethean Fates Sealed" qui se montre toutefois inégale, certains passages débarquent de nulle part et certaines transitions se font de manière trop brutale. Un peu plus de cohérence ferait du bien mais il y a déjà de quoi faire avec de bonnes idées et une volonté farouche de repousser les barrières. Les plus courageux peuvent aller s'y perdre mais gare aux plus frileux, vous risquez de ne jamais en revenir !
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