"Moons And Hideaways"
Note : 16/20
Présenté comme un mélange entre post-rock et metal moderne atmosphérique, le groupe français Lòdz revient avec son troisième album "Moons And Hideaways". Les deux premiers albums du groupe déployaient effectivement une musique située entre ces deux univers avec de très belles mélodies, une grande place laissée aux émotions et une authenticité qui sautait aux oreilles. Nous n'allons donc pas nous faire prier pour replonger dans l'univers torturé du groupe !
"Pyramids" ouvre l'album avec une ambiance aérienne, cotonneuse même, qui nous fait déjà entendre une bonne dose de mélancolie malgré son rythme dynamique et les influences post ou plus généralement se font déjà entendre. Ce premier morceau de moins de trois minutes et totalement instrumental sert de grosse introduction avant l'arrivée de "You'll Become A Memory" qui va vraiment lancer les hostilités. Les riffs se font de suite plus durs, presque malsains par brefs moments et on sent cette proximité avec Ghost Brigade qui s'entendait déjà sur les deux premiers albums. C'est probablement dû au mélange du post-rock ou metal avec des sonorités plus gothic ou plus doom de temps en temps, une sorte d'équilibre entre puissance et énergie d'un côté et noirceur et mélancolie de l'autre. Le chant alterne donc lui aussi entre les voix criées et les voix claires qui, sur ce premier véritable morceau, peuvent rappeler le spleen de Katatonia. Malgré ces quelques références, on reconnaît tout de même un univers particulier propre à la musique de Lòdz, cette impression d'être à cheval entre le torturé et l'onirisme avec des ambiances qui évoquent autant la rêverie que le désespoir rageur. "Chimeras" renvoie plus au rock gothique sur ses couplets et crée là encore une ambiance presque cotonneuse. On se laisse presque anesthésier par le spleen de "Moons And Hideaways" qui en profite pour nous embarquer dans son monde sans rencontrer la moindre résistance de notre part. Pourtant ce nouvel n'a rien de monolithique et fait entendre des ambiances différentes d'un morceau à l'autre, certains étant plus énergiques ou plus lourds que d'autres.
Cela permet à Lòdz de varier son propos tout en gardant un fil rouge attaché à la mélancolie ambiante. "Ghosts Of Confusion" fait entendre cette fameuse rage du désespoir à la fois dans l'énergie qu'il déploie mais aussi dans les mélodies et les ambiances qui évoquent une sorte de résilience, l'impression d'une personne qui aurait décidé qu'elle allait foncer même si les conditions ne semblent pas être en sa faveur. Il y a cette viscéralité dans la musique de Lòdz qui prend à la gorge, on sent que la musique du groupe est faite avec les tripes et que le groupe n'est pas là pour prendre la pose ou se faire remarquer à tout prix. Il se contente de balancer ce qu'il a sur le cœur et vous laisse seul juge. Que sa musique vous touche ou non, le compromis n'est pas à l'ordre du jour, c'est à prendre ou à laisser. Malgré le spleen et la mélancolie qui suintent de chaque morceau, "Moons And Hideaways" arrive à se faire assez accrocheur, un morceau comme "Sorry For September" est d'ailleurs très efficace dans le genre. Pourtant, ce dernier se fait tout aussi triste et sombre que le reste de l'album, mais les mélodies et les lignes de chant s'infiltrent dans votre crâne en plus de toucher en plein cœur. Sur un plan plus technique, il y a cette production qui fait plaisir à entendre et qui donne à ce troisième album, comme à ses deux prédécesseurs d'ailleurs, un son clair et puissant qui sonne de façon organique et ne sombre pas dans certains artifices nous ayant souvent agressé les tympans ces dernières années.
Lòdz continue à évoluer lentement mais sûrement en développant un univers toujours un peu plus personnel et en intégrant toujours un peu plus de sonorités différentes. On reconnaît de suite la patte du groupe mais on sent que le spectre sonore s'élargit un peu plus. Les émotions sont toujours au premier plan et touchent toujours en plein cœur, le spleen ambiant se mêle toujours à une rage qui semble issue du désespoir et la puissance d'évocation de "Moons And Hideaways" n'a rien à envier à celle de ses deux prédécesseurs.
"Something In Us Died"
Note : 15/20
Le temps ne guérit pas les blessures. C'est ce qu'affirme Lòdz avec la sortie de leur deuxième album intitulé "Time Doesn't Heal Anything". Un postulat sombre et pessimiste qui trouvera cependant écho chez chacun d'entre nous. En effet, qu'on soit homme ou femme, qu'on soit fils de riche ou enfant de la rue, d'une façon ou d'une autre, on est tous passés par d'horribles moments qui laissent, encore aujourd'hui, des marques indélébiles. L'effet de ce titre est d'autant plus fort qu'il s'accompagne, sur la pochette de l'album, de la figure d'une enfant aux yeux clos, perdue dans une forêt intérieure aux arbres décharnés ; image sobre et symbolique d'une enfance dans laquelle se mêlent innocence, onirisme et traumatisme profond. La force de ce titre et de ce visuel se retrouve d'ailleurs de façon plus poussée dans le très beau clip sorti par le groupe pour le titre éponyme "Time Doesn't Heal Anything", dans lequel tout est très finement exprimé à travers le symbole et le non dit.
Mais que dire de la musique à proprement parler ? Personnellement, j'étais curieux de savoir ce que l'intégration d'Olivier Girard, guitariste et compositeur d'Aesmah, allait bien pouvoir apporter au groupe. Pour commencer, je dirais que l'essentiel de la musique de Lòdz est resté intact. On retrouve toujours ce mélange dépressif de post-rock et de post-hardcore porté par un voix tantôt chantée, tantôt hurlée. On relèvera cependant, malgré ce titre extrêmement sombre, que d'une manière générale, la musique du groupe se fait plus aérienne avec un son et un chant plus maîtrisés. Une couleur générale qui offre de très beaux passages et qui propose un contraste intéressant entre sons de guitare très lumineux et musique dépressive. Cependant, l'album y prend aussi un aspect plus lisse et plus pop qui nous fait un peu regretter l'aspect davantage sombre et déchiré des précédents opus. Un constat qui s'applique notamment au chant qui semble plus distant et moins chargé émotionnellement.
Cela dit, l'album reste très bien construit et forme un ensemble très cohérent. A tel point que plusieurs écoutes seront nécessaires pour bien cerner les petites spécificités de chacun des morceaux qui ont tous leur identité propre, pour peu qu'on prenne le temps de se pencher dessus attentivement. Un travail qu'il est intéressant de découvrir au fil des écoutes grâce à un mixage qui parvient à mettre chacun des instruments à l'honneur mais, qui est parfois peut-être trop subtil pour parvenir à vraiment surprendre l'auditeur aux premiers abords.
Au final, Lòdz nous offre avec ce "Time Doesn't Heal Anything" un bel album très soigné et travaillé mais dans lequel on perd légèrement le côté brut et déchiré qui m'attire particulièrement dans ce genre de musique. Reste à voir, maintenant, ce que rendront ces huit nouveaux morceaux sur scène avec l'énergie du live.
"Something In Us Died"
Note : 13,5/20
Très sombre dans sa construction et dans sa façon d’appréhender, l’univers musical de Lòdz prend aux tripes et ne les lâche plus du début à la fin. Se classant dans un domaine post-metal, post hardcore, Lòdz réussit le subtil alliage de parties puissantes pour les refrains, avec une voix puissante screamée, d'ensembles d’une violence rare, et de couplets mélancoliques laissant la part belle à une voix sombre et prenante débitant lentement ses paroles comme une sorte de litanie. Les alternances de ces deux styles s’emboîtent très bien, les rythmes lents de la partie rythmique formant une sorte de fil directeur pour guider l’auditeur dans l’univers de Lòdz. Puissant et prenant, celui-ci emporte tout sur son passage… notre esprit et nos convictions. L’univers développé par Lòdz pousse à un regard interne, une plongée au cœur de nous-même, comme si l’on déroulait le fil de notre vie avec comme bande son un Lòdz… telle une B.O.
Les 8 titres de cet album sont teintés d’une mélancolie ou encore d’un esprit ravagé. Les couplets sombres associant une batterie lointaine et une voix simplement accompagnée d’une mélodie de guitare, ou bien d'ambiances introduisant les morceaux. Les sons saturés post-metal et le chant hurlé sans autre forme de concession nous prennent et ne nous lâchent plus.
La voix mise en avant ainsi que les riffs des guitares nous permettent de nous immerger complétement dans les morceaux de ce "Something In Us Died". De très bonnes parties avec des passages saturés et d'autres plus ambiants qui assurent un intérêt sans faille pour les adeptes d’un post-métal saturé. Certaines parties chantées sont moins bien choisies et donnent un aspect plus mitigé à l’ensemble, du coup moins profond, moins puissant et moins prenant.
D’un point de vue global, cet album est bien mixé même si la production aurait mérité peut-être un peu plus de basse et de rondeur dans les guitares et / ou des synthétiseurs pour donner une vraie profondeur aux mélodies.
Cet album, puissant, évoluant entre plusieurs styles, a le mérite d’être à découvrir, il est sombre et rythmé, il propose 8 titres variés et cohérents, même si une évolution est encore envisageable pour le groupe…
"And The Emptiness"
Note : 16/20
Jeune groupe lyonnais aux dents longues, Lòdz, avec un nom aussi mystérieux qu’une pochette énigmatique, nous propose un cinq titres en forme de regard vers l’horizon. Autoproduit mais bénéficiant d’une production toutefois correcte, Lòdz nous propulse dans son monde. Un monde entre post-rock et ambiances sombres, nostalgiques. C’est lent, et l’ensemble global des morceaux sert d’écrin pour Eric qui nous transporte et qui change de tonalité, portant au rang d’instrument à part entière sa voix.
Comme visitant les zones malsaines de notre cerveau englué dans des certitudes, cet EP, rempli de nostalgie aux valeurs sombres, pousse au lâcher prise, à l’écoute, avec les subtilités des instruments en plus. Une basse apportant rondeur et noirceur, tandis que les guitares nous distillent des riffs d’une puissance profonde et d’une noirceur importante.
Les cinq titres s’enchaînent sans que l’on est rien à redire, une forte influence à la A Perfect Circle (ce qui n’est pas la plus mauvaise des influences me direz-vous).
C'est avec ce rythme lent et lancinant, dérangeant au départ, muni de quelques dissonances, qu'on se laisse vite porter comme une obsession de fond. Une basse omniprésente pour donner du corps à l’ensemble, une voix qui porte et transporte, des guitares pour faire le reste et des subtilités régulières, et une batterie sobre mais qui apporte véritablement sa touche… Pas de doute, Lòdz est à suivre avec intérêt. Cinq titres de pur bonheur musical.
|
|