Oes Galliath est un cas particulier puisque le groupe nous sort son premier album de manière posthume ayant splitté depuis. "Sous L'Oeil Fermé Des Paradis" sera donc le début et la fin du groupe qui a tout de même sorti trois démos et un split avant ça. Le groupe a donc juste eu le temps de nous lâcher une bonne heure de black metal au sens large puisque le groupe ne se privait pas d'aller chercher des influences extérieures.

"Que Brûle Thulée" ouvre l'album en acoustique avant de balancer des riffs black à grands coups de guitares tranchantes comme des rasoirs le tout sur un mid-tempo une certaine froideur et d'appuyer les ambiances. L'accélération et les blasts typiques du black viennent bien vite et les mélodies que le groupe déploie gardent une mélancolie constante qui n'est pas sans rappeler "La Sanie Des Siècles" de Peste noire. Tous les morceaux prennent d'ailleurs le temps de poser leurs ambiances et sont assez longs, entre six et dix minutes en gros. "Autrefois" nous fait même entendre du violon et confirme qu'Oes Galliath se foutait des limites ou des carcans dans lesquels le black metal est censé rester enfermés à en entendre certains. Vous vous en doutez, la violence brute n'est pas du tout le propos de "Sous L'Oeil Fermé Des Paradis" et si les blasts se font entendre plus d'une fois, ce n'est pas sur cet aspect du black metal que misait Oes Galliath. C'est plutôt sa puissance évocatrice et la force de ses ambiances que le groupe cherchait à développer et ce premier et unique album y arrive d'ailleurs très bien. "Des Meurtrissures Pour Héritage" balance des riffs quasiment punk / hardcore au milieu de black froid et mélancolique qui créent un contraste intéressant et confirment que ce groupe avait une personnalité affirmée. Un mélange singulier qui ne plaira pas à tout le monde, c'est sûr, mais le but du black metal n'a jamais été de plaire à tout le monde et quand un groupe de cette scène cherche à se démarquer et à créer son univers au lieu de singer les classiques de la seconde vague norvégienne, on soutient la démarche.

Malgré la longueur des morceaux, le groupe a réussi à ne pas se répéter justement grâce à toutes ces influences différentes et à des morceaux intelligemment construits qui alternent violence, lourdeur et mélodie de façon suffisamment naturelle pour que "Sous L'Oeil Fermé Des Paradis" paraisse homogène. Ce qui n'est pas rien quand on entend le nombre de monde différents qui se croisent ici, tout ça aurait pu rapidement n'avoir ni queue ni tête. Autre preuve des influences atypiques d'Oes Galliath, pour un groupe de black metal en tout cas, la présence d'une reprise de "Les Dingues Et Les Paumés" de Hubert Félix Thiéfaine mis à la sauce black metal et qui sonne plutôt bien comme ça d'ailleurs. Ce qui n'est finalement pas si étonnant considérant la noirceur de la musique de Thiéfaine même si à la base la forme est évidemment très loin du black metal. "Gosse De Vide" qui a été mis en avant pour la sortie de l'album est quant à lui probablement le morceau le plus brutal et frontal de l'album, le plus proche du black metal des origines du coup. On note aussi que le chant a été travaillé sur tout l'album et que les paroles sont assez facilement discernables sur la plupart des morceaux. Là encore, du chant black ou hurlé intelligible, ce n'est pas ce qui court les rues et cela montre encore les efforts qui ont été faits sur l'élaboration de cet album. Peut-être entendrons-nous les membres dans d'autres projets ou groupes mais pour l'instant nous n'aurons que cet unique album à nous mettre dans les oreilles. Mais bon, vu la qualité de la bête on ne va pas se plaindre, c'est toujours mieux que rien.

Un premier et dernier album à la fois pour Oes Galliath qui se saborde après avoir accouché d'un album intéressant, relativement original et qui repousse les limites du black metal pour en faire quelque chose de personnel. "Sous L'Oeil Fermé Des Paradis" mérite que vous y jetiez une oreille, de préférence avec l'esprit ouvert.