"Hortus Venenum"
Note : 18/20
Réouverture d’Officium Triste. En 2024, Pim Blankenstein (chant, Extreme Cold Winter),
Gerard de Jong (guitare), Martin Kwakernaak (claviers), Niels Jordaan (batterie), William
van Dijk (guitare) et Theo Plaisier (basse) célèbrent les trente ans de la formation avec
"Hortus Venenum", leur septième album, qui sort chez Transcending Obscurity.
"Behind Closed Doors" ouvre l’album avec des sonorités entêtantes, auxquelles se joignent
les rugissements de Pim et la rythmique massive, mais également les mélodies apaisantes
des guitares. Les vagues lancinantes nous envoûtent sans mal en rejoignant "My Poison
Garden", la plus courte des compositions de cet album, qui semble plus brute et plus sombre
malgré des leads aériens travaillés et une rythmique relativement saccadée. Le break
donnera au morceau un second souffle, proposant alors des mélodies plus vives pour
atteindre "Anna's Woe" et sa douceur hypnotique qui se charge de mélancolie lorsque les
parties vocales apparaissent, portées par des claviers apaisants.
Le son s’assombrit à
nouveau vers la fin avant de s’éteindre, puis "Walk In Shadows" débute lentement, permettant
aux instruments de s’installer calmement pour développer des passages intenses, mais
également des rideaux de quiétude où seuls quelques mots et quelques notes s’emmêlent.
"Forcefield" prend la suite avec un son plus oppressant mené par une batterie plus énergique
qui initie quelques accélérations pour nous mener à "Angels With Broken Wings" qui
progresse d’abord grâce à la berceuse du violon et du piano, mais qui va ensuite se parer
d’un voile épique grâce aux guitares qui deviendront dissonantes sur le final, refermant le
carcan de peine.
Même après trente années, Officium Triste conserve sa mélancolie hypnotique et nous la
délivre par vagues de tristesse pure. Les morceaux d’"Hortus Venenum" hantent déjà l’esprit
des fans, et ne tarderont pas à se répandre aux quatre coins de la scène.
"The Death Of Gaia"
Note : 17,5/20
Bienvenue, bienvenue dans un univers désespéré, où la mélancolie et la tristesse balaient tous sentiments positifs. Bercé par de sombres mélodies, l’auditeur qui croise l’univers sonore d’Officium Triste s’engage dans une voie sans issue, dans laquelle tout retour à la réalité est un choc tellement le voyage est immersif. Vétéran de la scène doom / death atmo’, le groupe hollandais possède un savoir-faire incontestable dans l’art de manipuler le désespoir pour en faire un paysage sonore intense et prenant. Au travers de 8 titres qui s’étalent sur 56 minutes, "The Death Of Gaia" propose un panel de mélodies et de rythmes lourds qui stimulent l’imagination, permettent à l’auditeur de s’échapper un instant pour rejoindre des multivers fascinants. En effet, Officium Triste développe une musique assez stellaire, éthérée. Proche de My Dying Bride, Tristitia, Paradise Lost ou des premiers The Gathering, hollandais eux aussi, le sextet manie à la perfection l’art sombre pour le sublimer.
Dès les premières notes, on sait pertinemment que l’on va se manger un album dans lequel la lenteur et la lourdeur côtoient le sublime, par le biais de mélodies de guitares enrobées de sons de violons, d’orgues d’église ou de piano scintillants. La voix death, typiquement doom, grave, grommeleuse, partage tout le désespoir du monde. Ici, pas de groove, pas de joie, l’antithèse du funky est clairement assumée, et "The Death Of Gaia" retranscrit à la perfection l’agonie et la douce progression vers la mort. Quelques moments réellement ambiants ajoutent encore plus de noirceur au tableau, comme la pré-fin du titre "Schackles" et sa guitare en son clair, pendant laquelle, si vous penchez l’oreille, des murmures et des bruits de nature se font entendre, magnifiant l’ensemble d’une subtile manière. Il y a un peu de The Cure dans l’agencement de certains morceaux, on sent que ces musiciens ont beaucoup écouté l’album "Disintegration" de la formation précitée, comme peut en attester un titre tel que "A House In A Field In The Eye Of A Storm", prélude au titre qui bat des records de lenteur, "The Guilt", et son chant féminin surprenant de lyrisme, qui propose une facette jusque là inédite puisque à partir de ce titre, le chant féminin se retrouve sur le reste de l’album. Il se dégage tout au long de l’écoute une dimension sublime et magique. On se voit traverser des contrées lointaines, des collines qui se jettent dans la mer où une nature sauvage mais maitrisée par les éléments à toujours régnée en maître, et au sein de laquelle l’humain n’a aucun contrôle, un juste retour aux fondamentaux, à Gaia elle-même.
Si vous êtes gothiques, comme la bande macabre des épisodes de South Park, qui refusent catégoriquement d’être comparés aux "émos", et qui se complaisent dans une vie de stagnation, dans l’attente d’une mort salvatrice, alors ce disque est ce qu’il vous faut. Certes il faut aimer le doom / death atmo' pour rentrer dans le délire d’Officium Triste, mais je suis intimement convaincu que le groupe peut plaire à tout autre type de public. Chaque riff, chaque élément est interprété avec sincérité et dévotion. Le disque fourmille d’arrangements subtils, de variations qui arrivent à dynamiser une musique pourtant lente et pesante sans dénaturer le feeling général. Un excellent voyage musical à découvrir.
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