"+"
Note : 17/20
Si vous aimez les bizarreries, la musique d'Öxxö Xööx a déjà dû parvenir à vos oreilles, dans le cas contraire la sortie du nouvel album "+ (The Opening Of The Hypercube)" sera l'occasion idéale de vous pencer sur la bête. Pour faire très simple le groupe mélange à peu près tout ce qui se fait en metal extrême, des influences plus gothiques ou orchestrales et une pointe de sonorités électroniques. Bref, un beau bordel qui arrive tout de même à faire entendre des mélodies poignantes et et à poser des ambiances travaillées et riches.
Comme d'habitude, les morceaux sont longs, donc l'album aussi avec quatre-vingt minutes au compteur, et il va donc falloir que vous donniez toute votre attention à ce nouvel album pour pouvoir profiter de tout ce qu'il a à offrir. Et vu la durée de l'engin et la densité de la musique proposée, je vous garantis qu'il y en a des choses à découvrir là-dedans ! "Cündü(-)" ouvre le bal et fait déjà entendre des structures qui se brisent très régulièrement, une ambiance déjà très sombre et des mélodies qui arrivent presque à se faire accrocheuses malgré tout ça. C'est déjà très dense dès l'ouverture et l'album démarre sur trois pavés de dix minutes, quand je vous disais qu'il allait falloir s'accrocher et être attentif, ce n'était pas exagéré. Si le précédent présentait une orientation plus dure, plus noire et même plus violente, ce nouveau pavé reprend une direction un peu plus aérée. Ce qui n'enlève rien à la complexité et à la profondeur de l'ensemble, car même si le tempo est plus contrôlé et que certaines mélodies s'impriment directement dans le crâne, il y a tellement de ruptures de ton et de changements d'ambiance que le tout reste assez éprouvant. En tout cas, la musique d'Öxxö Xööx est toujours aussi difficile à décrire et encore plus à ranger dans une case, ça les coche quasiment toutes et ça déborde de tous les moules dans lesquels vous pourriez essayer de les ranger. Il y a un côté presque cérémoniel, rituel, ou incantatoire dans ces paroles parfois scandées de manière hachée et naviguant entre l'anglais, le français et cette fameuse langue inventée spécialement pour le groupe et utilisée depuis le premier album.
Malgré les nombreux changements et le nombre de sonorités différentes utilisées, le groupe arrive paradoxalement à donner une unité et une certaine homogénéité à "+ (The Opening Of The Hypercube)". C'est la preuve du travail réalisé sur chaque album et de la cohérence de l'univers du groupe, ce qui n'était pas gagné à la base avec une musique aussi touffue et barrée. Il y a en tout cas une ambiance plus solennelle cette fois, presque funéraire comme sur "Füch(C)" sur lequel la musique de ces extraterrestres prend des airs plus contemplatifs et désabusés. Je ne vais pas m'aventurer sur le concept qui est assez complexe, mais les deux premiers albums forment un diptyque et celui-ci en forme un autre avec le précédent album "Y". Ce dernier était présenté comme l'album "feu" et ce nouveau méfait comme l'album "eau", pas étonnant donc qu'il présente une orientation plus aérée et moins frontale que son prédécesseur. Comme d'habitude, cela ne plaira probablement pas aux métalleux purs et durs et ce sont limite ceux qui sont proches des scènes gothiques ou electro en général qui entreront le plus facilement là-dedans, même si cela n'a pas grand-chose à voir sur la forme. Disons qu'il y a une sensibilité et un propos qui passera plus facilement chez les amateurs de ces scènes que chez le bourrin à poil long. En tout cas c'est toujours aussi particulier, hors de tout cadre et totalement personnel donc peut importe vos goûts il va falloir qu'ils soient relativement larges.
Öxxö Xööx continue donc sur sa voie avec ce nouvel album tout aussi barré, puissant émotionnellement et exigeant. "+ (The Opening Of The Hypercube)" est comme d'habitude très dense et très long et va nécessiter de multiples écoutes avant que vous puissiez vous y retrouver. Si vous connaissez déjà l'univers du groupe, vous allez reconnaître sa patte tout de suite, si vous découvrez préparez-vous à être quelque peu surpris !
"Ÿ"
Note : 18/20
C'est la période des OVNI musicaux puisque les barrés mais géniaux Öxxö Xööx sont de retour avec leur troisième album "Ÿ" et une fois de plus le voyage risque d'être mouvementé. Rappelons aux étourdis que l'ouverture d'esprit est plus que de rigueur ici et que le groupe pratique un mélange des genres aussi triste et beau qu'immersif et passionné.
Et comme d'habitude, l'album est une brique qui affiche quatre-vingt minutes au compteur avec des morceaux là encore très longs et dépassant souvent les dix minutes, donc accrochez vous on va bien vite sortir de l'atmosphère terrestre à ce train là ! "44³" ouvre l'album avec une sorte d'orgue qui plombe l'ambiance d'entrée de jeu avant que les guitares viennent apporter leur grain de sel à coup de riffs plus agressifs et que les voix masuclines, extrêmes et féminines s'entrechoquent dans des lignes de chant décalées et tordues aux allures de cérémonie dérangée. Pas de doute, Öxxö Xööx n'a rien perdu de sa singularité et sa personnalité atypique est toujours bien affirmée ! Ce nouvel album, comme ses prédécesseurs, n'a pas fini de vous retourner la tête par sa folie et sa beauté et il va falloir plusieurs écoutes attentives avant de saisir où le groupe veut vous emmener. Öxxö Xööx est une fois plus hors du temps en nous emmène dans un univers créé sur mesure dans lequel nous perdons tout contact avec la réalité. Les émotions se succèdent et ne se ressemblent pas, donnant à "Ÿ" des allures de montagnes russes qui vont vous retourner l'estomac à plus d'une reprise. On ne sait jamais sur quel pied danser avec ce groupe et il sait se montrer féérique à un moment et effrayant l'instant suivant. Concrètement, on retrouve toujours des racines gothic mélangées à du doom, des sonorités electro et du metal plus violent et extrême. Une mixture totalement personnelle qui fait que vous ne risquez pas d'avoir déjà entendu ça ailleurs que sur les deux premiers albums du groupe. Les paroles sont une fois de plus écrites et chantées dans un dialecte spécifiquement créé par le groupe et cela en dit long sur son implication ! Quoique, j'y ai aussi entendu de l'anglais donc peut-être que le groupe a opté cette fois pour un mélange des deux.
Par rapport à ses deux prédécesseurs, je trouve d'ailleurs que ce nouvel album montre un visage plus dur et inquiétant, plus sombre et fou aussi. "D" est assez malsain et décousu passant du coq à l'âne constamment et installant une ambiance aussi flippante que barrée. D'après la bio, la pochette de l'album (très belle au passage) symbolise le grand œuvre alchimique et ces neuf morceaux ont donc tout de l'introspection. Une preuve supplémentaire de l'authenticité de ce groupe et de l'implication dont font preuve ses membres quand il s'agit de créer une œuvre personnelle. "9C639" renoue d'ailleurs ne serait-ce que quelques temps avec ces pasages poignants auxquels le groupe nous avaient habitués par le passé avec des mélodies déchirantes et une tristesse palpable. "NS2", quant à lui, ramène les influences doom en nous balançant une ambiance des plus funèbres et là encore une beauté poignante dans les lignes de chant et les mélodies qui retournent l'estomac. Plus on s'approche de la fin de l'album, plus la tristesse et la dépression se font sentir, les mélodies deviennent de plus en plus belles et de plus en plus noires et les ambiances sont de plus en plus pesantes. Les derniers morceaux se font un peu moins fous et plus torturés et abattus, les structures se posent un peu plus et le groupe nous balade un peu moins d'une ambiance à l'autre pour nous écraser sous le poids de la folie et de la noirceur. Certains passages sont encore bien barrés mais l'ambiance prend vraiment du plomb dans l'aile et "3ën" en est le parfait exemple avec huit minutes aussi malsaines et folles que noires. Le côté féérique que l'on pouvait encore entendre sur "Nämïdäë" a quasiment disparu et Öxxö Xööx montre décidément une orientation plus dure, sombre, tordue et malsaine qu'auparavant.
"Ÿ" est donc un troisième album plus torturé, plus introspectif et globalement plus dur et noir que ses deux prédécesseurs. Comme d'habitude, voire même encore plus que d'habitude, il va falloir vous plonger corps et âme dans l'écoute d'un tel pavé et y revenir plus d'une fois avant d'en saisir les secrets les plus profonds. On ne peut que saluer la créativité et l'authenticité dont fait preuve Öxxö Xööx et appeler les esprits les plus ouverts à aller explorer ces terres désolées.
"Nämïdäë"
Note : 18/20
Déjà quatre ans depuis "Rëvëürt", premier album d'Öxxö Xööx qui, à l'époque, avait agréablement surpris pas mal de monde ! Il était donc temps que le groupe revienne, cette fois avec "Nämïdäë " qui ne bénéficie pas du même effet de surprise mais qui va permettre de confirmer la personnalité atypique de ce groupe et surtout la qualité de sa musique.
Ce dernier point est tellement partagé que ce nouvel album est d'ores et déjà épuisé, il va donc falloir attendre un probable repressage pour se procurer le CD. Pour l'aspect plus purement musical, on reste en terrain connu, avec toujours ce mélange de pur gothique, de sonorités baroques, d'un soupçon de théâtralité et d'ambiances funèbres. A noter tout de même que la production est plus propre et surtout plus puissante, avec cette fois un véritable batteur qui passe beaucoup mieux que la boîte à rythmes. Et dès le premier morceau de "Nämïdäë ", on comprend que le groupe n'a pas changé son fusil d'épaule et n'a cédé à aucun compromis, "Därkäë" nous attaquant d'entrée de jeu avec ses 11 minutes 44 histoire de montrer au malheureux qui se serait perdu ici chez qui il est tombé. Un départ de toute beauté d'ailleurs si je puis me permettre, entre les choeurs, le chant féminin discret et les orchestrations suivies de hurlements, on se retrouve de suite plongé dans un univers à la fois beau, troublant et terriblement sombre. Les influences et sonorités diverses continuent de s'entrechoquer dans un climat souvent proche de la pure folie. Rien que sur ce premier titre l'originalité du groupe est indéniable et son authenticité n'en est pas moins flagrante, et malgré la longueur des morceaux on se surprend à les trouver presque trop courts. La musique du groupe est tellement vivante et variée qu'on ne sait jamais par où la prochaine attaque va arriver. Une musique finalement atypique dans le paysage metal actuel et totalement imprévisible, donc un grand bol d'air frais. En un peu moins de 12 minutes, Öxxö Xööx arrive à nous clouer sur place par son audace et le travail apporté à la fois aux compositions et aux arrangements, proposant des morceaux à tiroirs totalement tarabiscotés sans jamais se perdre dans une sorte de cadavre exquis sans queue ni tête. Certes la musique du groupe est totalement folle et barrée mais elle ne se départit jamais de sa cohérence. Rien n'est laissé au hasard ici même si au premier contact tout ça doit donner l'impression d'un "joyeux bordel" aux non-initiés.
On retrouve quelques moments bien plus agressifs comme "Ländäë" qui tranche avec les deux premiers titres certes torturés mais bien plus posés. Là, entre les riffs brutaux, les gros coups de double et les quelques accélérations du batteur on se prend pas mal de coups dans la tronche et le groupe fait par conséquent ressortir ses influences extrêmes. Une façon de couvrir le spectre des émotions humaines, et sur un plan plus purement musical, un très bon moyen de varier les plaisirs et de rendre l'album vivant. Malgré cet apport de contrastes, il vaut tout de même mieux éviter d'écouter ça si votre moral est déjà plombé, parce que comme sur "Rëvëürt", ça reste quand même extrêmement sombre. Mais si un constat particulier doit être fait par rapport à "Rëvëürt", c'est que tout sur ce nouvel album est bien plus maîtrisé, plus inspiré et plus poignant, ce qui n'était pas une mince affaire ! Öxxö Xööx, malgré le climat bien plombé et limite funèbre dont il affuble ses albums, est capable d'apporter à sa musique une beauté quasiment féerique, quelques rares rayons de lumière qui permettent de créer un contraste intéressant et surtout de vous prendre par les tripes ! Encore une fois, cette musique est à réserver aux esprits les plus ouverts, sa versatilité et son caractère faussement décousu risquent d'en décourager plus d'un. Et pourtant derrière cette apparence foutraque se cache un univers original et poignant, il suffit de creuser un peu de vouloir s'y plonger pour le trouver. Précisons que les plus curieux pourront trouver l'alphabet complet de la langue, créée par ces joyeux lurons, sur le Bandcamp du groupe, de quoi s'amuser à traduire les paroles.
En deux albums, Öxxö Xööx impose son caractère bien trempé, son univers authentiquement torturé et sa personnalité décalée, et "Nämïdäë " est une fois de plus un excellent album se foutant totalement des barrières et des conventions. A ne pas mettre entre toutes les oreilles mais pour ceux qui se sentent l'envie de voyager dans ces contrées brumeuses pendant 75 minutes, n'hésitez pas. Ne reste plus qu'à surveiller un retour de la version CD et à aller les voir en live pour les plus chanceux, histoire de soutenir un groupe qui le mérite amplement.
"Rëvëürt"
Note : 17/20
Öxxö Xööx c'est assez étrange comme nom de groupe non ? Alors je vous rassure cet album nommé "Rëvëürt" n'est pas un réenregistrement de la bande originale de La Soupe Aux Choux, bah oui il y en a bien deux ou trois dans le fond qui vont se mettre à gueuler : "Allo oxo ? Ici la Terre !"
Et si le nom du groupe est étrange c'est tout simplement parce qu'il est écrit dans un dialecte qui a été conçu spécialement pour cet album, et si vous voulez tout savoir ça veut dire 69 (je ne vais pas vous faire un dessin). Vu le monde qu'il y a sur scène, la personnalité affirmée du groupe et le fait de créer un langage spécifique ne manquera pas de faire penser à Magma. Sauf qu'on n'est pas vraiment dans le même registre musical, Öxxö Xööx évoluant dans ce qu'on pourrait classer comme étant un mélange de gothic (tout court, pas le metal gothic), de doom et d'electro. Pour vous situer un peu la chose, dites vous que Laurent Lunoir, chanteur et multi instrumentiste est un ancien Whourkr.
Cette fois il officie dans un registre bien plus mélodique, pas de délire bruitiste ici. Tout l'album est porté par une ambiance on ne peut plus mélancolique, voire carrément dépressive et l'héritage goth se sent clairement rien qu'au niveau du chant plaintif typique du genre. On a bien quelques petites accélérations de la batterie, qui doit plutôt être une boîte à rythmes, mais globalement on nage dans une sorte de beauté désenchantée surmontée d'ambiances presque funèbres ou glauques. Le funeral doom n'est pas bien loin à certains moments, que ce soit musicalement ou sur la durée des morceaux. Jugez plutôt : 9 morceaux pour près de 80 minutes. Rien que le premier dure déjà 11 minutes, pari risqué d'ouvrir un album par un tel pavé. L'auditeur non averti risque de se décourager d'entrée de jeu, il aurait bien tord de ne pas persévérer tant le voyage est intéressant.
Pour un premier album et même si les membres ne sont visiblement pas des débutants, il n'empêche que c'est impressionnant de maîtrise. Malgré la durée assez maousse de "Rëvëürt" on ne lâche rien du début à la fin, l'album nous agrippe tout de suite et nous embarque avec lui dans je ne sais quel monde bizarre. Typiquement ce qu'on appelle un voyage auditif, Öxxö Xööx a réussi à créer tout un univers bien à lui dans lequel on va se perdre tout au long de l'album, visiter des décors tous plus étranges les uns que les autres et revenir à nous au bout de 80 minutes en se demandant ce qu'ils s'est passé. Alors bien entendu, vu que l'album est long et très riche il va sans dire qu'il va vous falloir une bonne paire d'écoutes avant de pouvoir assimiler tout ça. Mais si vous vous donnez la peine de vous pencher sérieusement sur son compte, ce "Rëvëürt" devrait vous emmener très loin sans aucun souci.
Ils reprennent des éléments de plusieurs styles qu'on connaît bien, et réussissent à en faire une mixture totalement personnelle sans qu'à aucun moment on se dise : "Tiens ce passage ça pourrait être du (insérez votre groupe préféré)". Pour une première galette aussi longue c'est quand même un tour de force, d'autant que le piège de la mixture indigeste a lui aussi été brillamment évité. C'est la richesse de l'album qui le rend relativement difficile à assimiler, et non pas un mélange approximatif des genres comme ça peut parfois être le cas chez d'autres groupes. On sent que tout est maîtrisé ici, le groupe sait parfaitement ce qu'il fait et la musique a dû prendre le temps de mûrir.
Bon par contre comme je le disais plus haut, il faut éviter de l'écouter en période de cafard. C'est vraiment plombé comme truc, entre la pure dépression, la colère et un zeste de folie carabinée. Là aussi d'ailleurs on ne tombe pas dans les clichés des plans doom ou goth mille fois rabâchés, même si on sent l'influence des ténors du doom Anglais par exemple de temps en temps, le groupe arrive à nous lâcher des passages de toute beauté assez bluffants. Sur un titre comme "Yüm" on peut même entendre un début très Elend dans l'esprit, preuve supplémentaire que ces gens ont bon goût. Le mélange d'influences et de sonorités différentes fonctionne parfaitement, et le tout est assez digéré pour qu'on ne ressente aucune impression de répétition, même quand les morceaux durent 13 minutes. Oui parce que je précise que pour bien s'immerger dans ce monde tordu, il vaut mieux écouter l'album d'une traite. Moi c'est ce que je fais avec tous les albums de toute façon, mais si ce n'est pas dans vos habitudes je vous invite à le faire dans ce cas précis. C'est seulement là qu'on se rend réellement compte du boulot qui a été abattu, et c'est le seul moyen de vraiment plonger dans ce trou noir musical.
Bref voilà un groupe sorti de nulle part qui m'a mis une bonne baffe dans les dents, si vous recherchez quelque chose qui sort des sentiers battus je vous conseille vivement d'aller écouter ce "Rëvëürt".
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