"Under Sullen Skies"
Note : 16/20
A peine quelques mois après l'EP "Monarchy Of Shadows", Tombs remet le couvert avec cette fois un nouvel album "Under Sullen Skies" et l'accalmie n'est pas toujours pas au rendez-vous. Pour les retardataires, le groupe pratique une musique étiquetée post-black mais met bien plus l'accent sur la violence que ses collègues de la même scène. Ne vous attendez donc pas à des ambiances sylvestres ici puisque Tombs est du genre belliqueux et ce nouvel album ne vous veut pas du bien.
Sans intro ni fioritures, les riffs puissants et rouleaux compresseurs de "Bone Furnace" ouvrent le bal et les blasts s'invitent bien vite à la fête prouvant ce que je viens de dire sur l'envie que Tombs a de vous rouler dessus. Comme je le disais pour "Monarchy Of Shadows", l'étiquette post vient du fait que le groupe incorpore des sonorités assez modernes et extérieures dans son black metal mais sorti de là, cela reste relativement proche des racines du genre dans les passages black metal en tout cas. Cela suffit toutefois au groupe pour se faire une patte particulière et il n'hésite pas à user de ces sonorités inhabituelles pour le black pour poser des ambiances étranges ou casser le rythme sans prévénir. Toujours est-il que Tombs est du genre à faire mal et que ce nouvel album ne déroge pas à la règle. Ce premier morceau, s'il n'est pas le plus bourrin ou brutal du groupe, est tout de même tout en puissance et ne fait pas la dentelle pour autant avec un esprit quasiment old school par rapport à ce que produit le groupe d'habitude. Sachant que les morceaux n'hésitent à taper dans les six ou sept minutes, vous comprendrez que l'écoute d'un album de Tombs a tendance à laisser sur les rotules tant l'ensemble est intense. Il est rare que le groupe accepte de vous laisser respirer et vous soumet en général à un passage à tabac qui va durer une bonne heure sur "Under Sullen Skies". "Void Constellation" balance d'ailleurs de gros riffs assez modernes aussi dans l'esprit avec une basse qui claque bien derrière et des passages quasiment sludge parce que ça aussi c'est un truc que Tombs aime faire, glisser une bonne dose de boue dans son plomb en fusion.
A la limite, le groupe blaste un peu moins souvent cette fois mais l'agression s'exprime simplement d'une autre façon, n'allez donc pas vous imaginer qu'il a décidé de vous ménager pour une fois parce que ce n'est pas le cas. Il y a tout de même de la place de la mélodie et "Barren" profite d'un break assez mélancolique pour calmer un peu le jeu et balancer des mélodies efficaces avant de repartir en blast. Si Tombs pouvait faire preuve d'un certain monolithisme par le passé, ce n'est plus du tout le cas ici, il use habilement de ses différentes influences pour alterner le pilonnage brutal avec des passages plus lourds ou groovy à l'instar de "The Hunger" qui en plus nous fait entendre une imitation plus vraie que nature de Lemmy ! Le post-black de Tombs se fait peut-être moins frontal et ouvertement brutal sur "Under Sullen Skies" mais reste définitivement méchant et sale, bien loin des airs de gendre idéal qu'affiche cette scène en général. En témoigne "Secrets Of The Black Sun", morceau très lourd et malsain qui n'est pas sans évoquer Triptykon ou les moments les plus noirs et incantatoires de Secrets Of The Moon (un clin d'oeil dans le titre peut-être ?). On sent aussi un peu plus de death là-dedans cette fois avec un groupe qui met plus l'accent sur les passages lourds et puissants. Même le groove semble sortir du death old school avec ces fameux tapis de double grosse caisse à la Bolt Thrower. La production contribue aussi à donner un gros boost de puissance avec la musique de Tombs qui jouit cette fois d'un son très puissant justement mais chaleureux et loin des albums surproduits et synthétiques que l'on attend malheureusement souvent ces dernières années.
Un nouvel album plus varié pour Tombs mais tout aussi dur et méchant, peut-être encore plus noir et pesant que d'habitude. Le groupe suit sa voie et se renouvèle suffisamment sur "Under Sullen Skies" pour balancer une nouvelle série de mandales dans la mâchoire. Comme d'habitude, ne vous laissez pas avoir par l'étiquette post-black qui laisse penser à quelque chose de plus doux, Tombs vous veut du mal et va vous le faire savoir !
"Monarchy Of Shadows"
Note : 15/20
Après "The Grand Annihilation" dont je vous avais parlé en 2017, Tombs est de retour mais cette fois avec un EP, "Monarchy Of Shadows". Rappelons que le groupe évolue dans un mélange assez particulier du post et de black qui, contrairement à ses confrères de la même scène, ne lésine pas sur la violence et les blasts. Attendez-vous donc à un pilonnage en règle pendant ces trente-cinq minutes.
Le titre éponyme ouvre cet EP sur des ambiances glauques et presque noisy à coup de claviers et d'arrangements limite indus avant que les guitares ne reprennent leurs droits et balancent des riffs assassins avant de repartir en bons blasts des familles. Pas de doute, Tombs est toujours aussi singulier et son penchant pour la violence ne s'est pas tari non plus. Son post-black est comme d'habitude plus black que post et là où la plupart des groupes du genre mettent l'accent sur des mélodies aériennes et des ambiances mélancoliques, Tombs préfère le bourrinage et la violence frontale. Si "Once Falls The Guillotine" laisse plus de place à la mélodie et à des ambiances assez épiques, il n'en garde pas moins des blasts encore plus sauvages, le contrastes est d'autant plus marqué et l'effet encore plus efficace. Sachant que la plupart des morceaux durent entre six et sept minutes, vous vous doutez bien que le groupe s'amuse à varier les ambiances et à jouer sur les contrastes justement. "Necro Alchemy" se rapproche du black metal pur et dur à la norvégienne avec des riffs tranchants et assez froids, là encore soutenus par des blasts quasiment constants. Le breakdown très moderne et brise-nuque qui arrive en plein milieu du morceau n'en est que plus saisissant et prouve s'il en était besoin que Tombs ne se refuse rien.
Le pire c'est que ça fonctionne parfaitement bien et que l'arrivée de ce passage au milieu d'un morceau très black ne choque pas. Le groupe sait ce qu'il fait et si des sonorités antinomiques se croisent dans sa musique, le tout s'accorde paradoxalement bien. L'étiquette post est en tout cas trompeuse, Tombs joue un black atypique certes mais cette claissification a tendance à nous faire imaginer quelque chose de plus soft. Ceux qui s'attendent à un voyage auditif, à des ambiances aériennes, mélancoliques bref à quelque chose de feutré avec quelques pointes de black metal, vont en être pour leurs frais. Ceux qui suivent déjà Tombs savent à quoi s'attendre mais les autres vont tomber sur le cul en entendant la violence de l'ensemble. On sent effectivement des sonorités plus modernes et extérieures au black metal, d'où l'appelation post, mais c'est quand même plus guerrier que la moyenne du genre. En tout cas, comme je le disais, cette approche permet au groupe d'avoir une personnalité bien particulière et de se démarquer d'une scène bien encombrée ces dernières années. Le revers de la médaille étant que cela risque d'en laisser quelques uns sur le bord de la route tant le mélange peut parfois être déroutant, du moins pour les plus sectaires.
Un EP qui continue sur la lancée de "The Grand Annihilation" et qui risque une fois de plus de déstabiliser pas mal monde avec son mélange post-black moderne et une brutalité assez inhabituelle dans le genre. L'intensité est de sortie et malgré trente-cinq minutes au compteur, l'écoute est éprouvante, dans le bon sens du terme.
"The Grand Annihilation"
Note : 15/20
Les barrés de Tombs sont de retour avec "The Grand Annihilation", leur quatrième album et si vous aviez aimé le précédent effort des Américains vous devriez vous y retrouver avec ce nouvel album.
Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore Tombs, le groupe s'amuse à mélanger du black metal avec du sludge et des sonorités très "post-ce que vous voulez". "Black Sun Horizon" ouvre l'album de la même façon que "Thanatos" sur "Savage Gold" à savoir avec un morceau très black metal et assez virulent. Une entrée en matière efficace une fois de plus et qui permet justement d'afficher d'entrée de jeu que Tombs n'a pas retourné sa veste et continue son chemin tranquillement, à son rythme. On retrouve toujours les mêmes éléments, parfois agencés différemment certes mais la patte du groupe est toujours là et on se sent d'emblée à la maison. En tout cas, le groupe en a encore gros sur la patate car même quand le rythme ne s'emballe pas on sent une colère contenue, une violence qui s'insinue jusque dans les riffs les plus pesants. une rage qui suinte de tous les recoins. Même si les racines black old school peuvent discrètement se faire sentir, nous sommes loin des origines sur "The Grand Annihilation", trop d'influences se mélangent pour que l'étiquette black puisse résumer à elle seule de quoi il est question ici. Le chant primitif à la Celtic Frost rappelle les origines en question mais les riffs et les mélodies traînent leurs guêtres dans une mélasse typiquement sludge, un bain de goudron et de metal en fusion qui sied plutôt bien à Tombs. C'est d'ailleurs ce qui pourra en freiner certains car même si le groupe essaie de varier les plaisirs, sa musique sur ce nouvel album se retrouve assez souvent à égrener des rythmiques monolithiques.
Par contre, quand le groupe décide de s'énerver, il ne fait pas de quartier, même si les blasts ne sont pas les plus rapides de la scène il se dégage de morceaux comme "Way Of The Storm" une envie de tout exploser, une soif de sang typiquement black metal. D'autres morceaux sont bien plus rustres tels "Shadows At The End Of The World" qui croise le trémolo habituel du black avec des riffs écrasants tout droit sortis du death le plus primitif avec ses gros tapis de double façon Bolt Thrower. Certains morceaux sont par contre plus faibles que le reste, "Saturnalian" par exemple que je trouve très basique, voire même limite plat, ou encore "Underneath" qui, sans être mauvais, crée une petite baisse de régime après un début d'album nerveux et dynamique. Par contre, "Temple Of Mars" qui ferme l'album arrive à tirer son épingle du jeu par son côté très rampant et froid, donnant l'impression d'un char d'assaut avançant droit vers vous sans que vous puissiez faire quoi que ce soit pour l'arrêter. Toujours est-il que le groupe a définitivement sa patte et que rien que ça mérite le respect, le fait que sa façon de s'exprimer ne convienne pas à tout le monde prouve au moins l'honnêteté de la démarche. Niveau production, le groupe a une fois de plus fait appel à Eirk Rutan et si je n'apprécie pas toutes les prods du bonhomme, celle-ci convient parfaitement à Tombs. Le son est gros, gras, puissant et se trouve être un écrin taillé sur mesure pour "The Grand Annihilation".
Nouvel album dans la droite lignée de son prédécesseur et de qualité égale, Tombs propose toujours sa propre sauce en mélangeant des éléments de plusieurs scènes extrêmes. Son approche assez primitive et monolithique risque de ne pas convenir à certains mais pour ceux qui suivent le groupe depuis un moment il n'y aura aucune mauvaise surprise.
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