"Cutting The Throat Of God"
Note : 19/20
Un peu plus de quatre ans après l’excellent "Stare Into Death And Be Still", les Néo-Zélandais d’Ulcerate reviennent pour un nouvel album au sommet de la scène death metal dissonant. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’au sommet, ils le sont déjà depuis plusieurs albums, la discographie du groupe étant littéralement intouchable du premier album à cette dernière production. Cette nouvelle addition à leur discographie, si elle ne marque pas un retour aux sources à proprement parler, se veut un peu plus proche des premiers albums que le précédent qui se voulait moins direct et violent, sacrifiant une rapidité percutante au profit d’ambiances plus oppressantes mais néanmoins presque atmosphériques, si cela a plus ou moins toujours été le cas chez le groupe, c’était encore plus marquant sur cet album et on pourrait presque le qualifier de post-death metal, si tant est que ce genre puisse un jour exister.
Et c’est une fois de plus un immense album que nous propose la formation néo-zélandaise avec ce "Cutting The Throat Of God", arrivant à lier intensité avec passages atmosphériques, le tout dans un déferlement instrumental absolument génial et parfaitement mixé qui vient se placer immédiatement tout en haut du panier des sorties de cette année, sans pour autant modifier la recette, ni même apporter de nouvelles idées originales. Car le groupe n’en a tout simplement pas besoin et les compositions présentées suffisent grandement à présenter un album proche de la perfection sachant parfaitement alourdir des ambiances légères pour venir ensuite tout détruire dans un déluge de riffs dissonants et de blasts. On trouvera même un semblant de break dans "To See Death Just Once" qui va venir apporter un pic de violence plus que bienvenu juste avant de nous balancer un des passages de batterie des plus intenses qui vient donner des frissons d’excitation face à une telle prouesse technique.
Ce qui frappe le plus à chaque écoute d’un album d’Ulcerate, c’est cette faculté que le groupe a de poser ses ambiances avec des introductions lentes et atmosphériques, que l’on sent pourtant pesantes et au bord de la rupture, pour ensuite se lancer dans un chaos de voix et d’instruments dans lequel on s’y retrouve parfaitement tout en étant pourtant submergé d’informations mélodiques, c'est tout bonnement unique et ça ne se retrouve chez aucun autre groupe, ce qui va ainsi donner au death dissonant toute sa saveur. On remarquera cela dès le début de "To Flow Through Ashen Hearts" mais cela viendra prendre plus d’ampleur au cours du morceau suivant, "The Dawn Is Hollow" qui est indéniablement un des moments forts de l’album, qui n’a pourtant aucun moment faible. En effet, ce dernier cristallise parfaitement ce qu’est Ulcerate à travers des instants de véritable violence, des passages ambiants et une fin de morceau tout en dissonance dans le jeu de guitare qui vient rendre le tout parfaitement chaotique et pourtant diablement efficace et cohérent.
Comment parler d’Ulcerate sans mentionner la batterie qui vient littéralement repousser les limites humaines à chaque nouveau morceau. On en vient vraiment à se demander comment des telles prouesses sont possibles tant chaque morceau démontre la virtuosité absolue d’un batteur qui est sans nul doute le meilleur dans cette scène. Entre passages de blasts dévastateurs comme dans "Further Opening The Wounds" et démonstration technique, il est tout bonnement impossible de rester impassible face à un tel jeu alliant précision, rapidité et puissance. Mais ce jeu de batterie, si bon soit-il, ne serait pas aussi efficace s’il n’était pas accompagné par un chant simplement extraordinaire, semblant sorti du fond des entrailles de la Terre, ce chant guttural vient ajouter une épaisse couche de lourdeur lors des passages de déferlement instrumental. Il devient cependant encore plus lourd et étouffant lors de passages moins violents où il est largement mis en avant comme dans l’introduction de "Transfiguration In And Out Of Worlds" qui amène très progressivement l’instrumental à venir de plus en plus rapidement sur un chant constamment profond et lourd avant d’exploser dans un magnifique déluge de riffs et de blasts.
Après avoir parlé du chant et de la batterie, il serait tout de même injuste de pas parler de la guitare, absolument essentielle dans les dynamiques de composition du groupe, ne serait-ce que pour les passages atmosphériques qui sont largement portés par cette dernière, réalisant l’exploit de donner une dimension lourde à un riff semblant innocent et léger, on le constatera tout au long de l’album mais surtout dans le morceau "Undying As An Apparition".
La guitare est également parfaitement mixée au sein du groupe et vient apporter cette couche de dissonance propre à Ulcerate et si caractéristique, qui rend les compositions plus chaotiques, uniques, et tellement plus efficaces. On aura dans cet album de nombreux riffs mémorables comme celui du passage calme de "The Dawn Is Hollow" ou encore le riff de fin de "To See Death Just Once" qui allie rapidité et efficacité tout en restant en tête. Si certains riffs sont plus mémorables que d’autres, aucun n’est pour autant oubliable et c’est également grâce à un superbe travail au niveau de la production et du mixage que l’on parvient à distinguer tous les instruments les uns des autres sans jamais que rien ne mette le reste dans l’ombre. Dans un tel déluge de notes, c’est réellement une prouesse que de réussir un ensemble aussi équilibré en termes de son et cela fait partie des grandes qualités d'Ulcerate que de savoir rendre audibles tous leurs instruments.
Si les productions d’Ulcerate sont indéniablement un death metal brutal et sans concession, il est toujours étonnant de se rendre compte qu’elles ne dégagent pourtant pas une vraie brutalité pure et simple comme c’est le cas pour la plupart du death metal. On a ici plus l’impression d’assister à un cataclysme d’une ampleur largement supérieure à notre simple échelle humaine. Quelque chose d’une immense violence à laquelle on ne peut simplement pas prendre part mais seulement y assister, ainsi la musique n’induit pas une sensation de violence mais plutôt une pure fascination face à une destruction de grande ampleur. En ce sens, le morceau le plus efficace de l’album est le morceau éponyme qui vient clore la presque heure de chaos que nous a proposé Ulcerate, "Cutting The Throat Of God" nous plonge dans un chaos clair et sans concession, dans un déluge de blasts et de riffs dissonants qui finissent par revenir comme une boucle en fin de morceau et n’est pas sans rappeler la fin du morceau éponyme du précédent album, "Stare Into Death And Be Still", qui reste à ce jour un des meilleurs morceaux du groupe.
Une fois de plus au sommet de leur art, les Néo-Zélandais d'Ulcerate nous propose un des albums les plus importants de cette année 2024 en reprenant les mêmes ingrédients que pour leurs albums précédents, qui fonctionnent toujours aussi bien. Alliant efficacité, précision et virtuosité en tout point, allant de la maîtrise des instruments au mixage et à la production de l’album, ce "Cutting The Throat Of God" nous embarque pour presque une heure de pur death dissonant comme seul ce groupe sait le faire. Ce nouvel album, qui se veut un tout petit peu moins atmosphérique que le précédent, vient donc à nouveau positionner Ulcerate au sommet de la scène de death metal dissonant et nous laisse une fois de plus dans l’attente d’un nouveau chef d’œuvre de leur part dans les années à venir.
"Stare Into Death And Be Still"
Note : 17/20
Ulcerate est de retour avec son sixième album, "Stare Into Death And Be Still", donc si vous aviez prévu une petite sortie au soleil, sachez que le ciel va se couvrir. Rien que la pochette et le nom de l'album laissent deviner que le groupe n'est pas moins torturé qu'à l'accoutumée et qu'on va très vite suffoquer là-dedans.
Le groupe n'est plus à présenter et si vous n'avez pas vécu dans une grotte ces dernières années vous savez que vous allez tomber sur un death technique, malsain, dissonnant et destructuré qui a tout du magma sonore. Si on les surnomme parfois les Deathspell Omega du death, il ne faut pas oublier que c'est surtout le "Obscura" de Gorguts qui a pavé la route de tous ces groupes qui jouent avec les dissonances et la déstructuration dans le death. Bre,f c'est "The Lifeless Advance" qui ouvre l'album et si la patte Ulcerate est reconnaissable très vite, on ressent quand même un groupe un peu plus contrôlé qui donne moins l'impression d'être sujet à des spasmes sonores. Les structures se font un peu plus posées et reconnaissables, le rythme est moins épileptique même si les accélérations brutales sont toujours de la partie et on sent globalement un Ulcerate plus épuré, moins chaotique. Certains vont hurler à la trahison en lisant cela mais le groupe ne verse pas l'easy listening pour autant, loin de là, c'est toujours le même univers et les mêmes ambiances mais disons que le courant de cette rivière de magma n'est plus aussi agité que par le passé. Le groupe ne s'est pas vraiment adouci mais on distingue mieux ce qui se passe et sa musique a gagné en clarté et en nuances. Probablement une recherche d'impact et d'efficacité qui amène à moins d'esbrouffe technique et à ne pas surcharger l'espace sonore outre mesure. Par contre, on sent que la basse est très épaisse et ajoute une sacrée couche au son de l'album qui bénéficie d'une production parfaite pour ce style et assez proche de ce que le groupe a pu proposer jusqu'à maintenant.
Pour le reste, c'est du Ulcerate et l'ambiance générale est toujours aussi torturée, sombre et malsaine donc pas de panique, vous allez bien retrouver ce que vous venez y chercher. Cela reste un death metal très dense, épais, brumeux et relativement destructuré sans compter que les blasts sont bien là et que le rythme s'emballe encore plus d'une fois même si cela arrive moins souvent. Cela ne devrait pas poser problème puisque le point fort d'Ulcerate n'est pas forcément sa violence mais l'ambiance qu'il arrive à dégager et l'univers qu'il crée à chaque album avec cette force d'évocation et cette rage désespérée qui suinte par tous les pores. D'ailleurs, les morceaux sont toujours aussi longs et continuent à tourner autour de six ou sept minutes donc là encore on voit que le fond n'a pas changé. La mélodie se fait certes plus de place sur ce nouvel album mais Ulcerate ne renie jamais son passé et "Stare Into Death And Be Still" est une variation d'un même thème plus qu'un véritable changement. Je ne suis d'ailleurs pas certain que ceux qui étaient hermétiques à la musique d'Ulcerate jusqu'à maintenant trouvent une porte d'entrée avec ce nouvel album. Le groupe change juste ce qu'il faut pour éviter de se répéter et sortir le même album trois fois d'affilée mais on reconnaît tout ce qui constitue sa patte sans problème. L'album se fait plus atmosphérique, plus porté sur les ambiances et moins frénétique mais tout est là.
Un nouvel album sur lequel Ulcerate se fait plus posé, plus aéré et contrôlé mais qui ne renie absolument pas la personnalité du groupe. Par conséquent, si sa musique ne vous a jamais parlé plus que ça, il y a peu de chances que cette accalmie suffise à vous convaincre.
"Shrines Of Paralysis"
Note : 17/20
Si je pouvais résumer la discographie d’Ulcerate en seulement deux mots, ce serait tortueux et torturé. Ulcerate est un de ces groupes dans la scène metal actuelle qui ne peut être véritablement défini par certains codes du genre. Si on peut considérer leur musique comme du death metal typé technique, qualifier ce groupe ainsi serait quand même très réducteur.
En effet, ce "Shrines Of Paralysis" emmène l’auditeur dans un voyage d'une heure dans les profondeurs d’un enfer sonore distordu et brut mais aussi supplémenté de quelques temps morts atmosphériques qui ne gâchent en rien le rythme effréné et cru de l’album.
Jouant sur plusieurs plans rythmiques à la fois, les morceaux ont beau avoir une structure qui affiche des techniques musicales propres au groupe, on n'a en aucun cas une impression de répétitivité dans la lecture des titres, ni d'avoir une mauvaise sensation de déjà-vu par rapport aux albums précédents. Si "Vermis" dégageait une sensation de froideur et de saleté, "Shrines Of Paralysis", lui, montre un aspect pire que son prédécesseur avec une atmosphère de mal-être et de souffrance qui se manifeste sur la quasi-totalité des titres.
Dissonant, criard, agressif, dépressif... Il n’y a pas assez d’adjectifs pour définir tout le tourment que ce disque nous envoie en pleine figure. Afin d’apprécier cet album à sa juste valeur, le cinquième des Néo-Zélandais, vous devez l’écouter dans son entièreté sans coupure ni temps mort. Véritable monolithe créé par Ulcerate, cette production est sans conteste un immanquable du death technique de 2016.
"Vermis"
Note : 15/20
L'album "Vermis" compte huit chansons pour une durée de quasiment une heure, ce qui est vraiment bien car lorsque la musique est lancée, on ne veut plus qu'elle s'arrête.
En effet, après "Odium", l'introduction très atmoshpérique et sombre, on se lance dans le gras avec "Vermis", la musique est rapide et assez violente.
Les riffs de guitare sont vraiment recherchés et s'enchaînent très bien, il y a eu un très bon boulot de ce côté, de même pour la batterie qui envoie vraiment ce qu'il faut au gré des riffs, c'est très agréable.
La double pédale fond sur les morceaux toujours aussi durement, et le blast ne ralentit pas du tout les titres.
Au niveau du chant, on peut noter quelques passages où le timbre de voix fait beaucoup penser à celui de Joe de Gojira, même dans la prononciation.
Globalement, la voix se situe dans les médiums voire un peu les graves.
On trouve quelques moments, notamment avec les down-tempos, où le rythme est considérablement ralenti pour laisser place à des passages soit très lourds soit très dissonants et déstabilisants.
Néanmoins, on peut entendre des semblants de mélodie par-ci par-là lors de ces passages, où même dans les chansons en général, c'est assez feutré, il faut donc bien tendre l'oreille.
Au fil des titres, on s'aperçoit que l'album est bel et bien du death metal mais que les Néo-Zélandais ont trouvé un style propre à eux-mêmes, et cela ajoute énormément d'attrait à "Vermis".
On s'en rend compte en constatant le nombre impressionant de coupures pendant les compos, voire même certaines notes à la guitare que l'on a pas l'habitude d'entendre.
Rassurez-vous, cela reste bien du death metal dans l'âme ! C'est juste un peu différent.
En tout cas, c'est un bon album selon moi.
Le seul "problème" est qu'en live, je pense que le public ne bougera pas trop à cause de toutes ces coupures et tous ces contre-temps. Mais sur CD, l'ambiance est là en tout cas.
Pour finir, la pochette de l'album est plutôt sobre, mais sympa, elle est spéciale, tout comme la musique.
Pour les fans de Ethereal Omen, Necromation, Acheron, Malachite et Psicodeath.