"The Duality Of Decapitation And Wisdom"
Note : 17/20
Veilburner revient fin 2024. En deux ans, le duo Mephisto Deleterio (instruments) et
Chrisom Infernium (chant, Pyrrhic Salvation, Torture Ascendancy 1307, Humanity
Decayed) a créé "The Duality Of Decapitation And Wisdom", son septième album, qui sort
chez Transcending Obscurity Records.
On débute sur "Tem Ohp Ab In Mysticum" qui ne met pas longtemps à nous enfermer dans
cette fosse ténébreuse d’où les harmoniques dissonantes puis les vociférations émergent en
quasi continue, accompagnant une rythmique féroce. Les soubresauts chaotiques donnent un
aspect oppressant à la déferlante tout comme ces cloches et choeurs étranges, mais le
groupe enchaîne avec "III Visions Of Hex-Shaped Hiss, Behead The Howling Spirit", une
composition tout aussi déroutante aux leads et effets hypnotiques dont la folie nous
semblera comme évidente, rien qu’à en juger les parties vocales. L’approche avant-gardiste
de l’instrumentale semble assez naturelle, tout comme celle de "The Duality Of Decapitation
And Wisdom Part I" qui emprunte la fureur du black / death et qui la transpose à des éléments
plus mélodieux inquiétants qui empruntent à la complexité du metal progressif et autres
étrangetés musicales. Le son devient menaçant, puis explose et s’apaise en rejoignant "The
Duality Of Decapitation And Wisdom Part II" qui démarre exactement là où la précédente
s’arrête et qui continue ce voyage mental improbable grâce à des leads planants, mais la
lourdeur n’est jamais loin, et elle n’hésitera pas à troubler la paisible balade, notamment
grâce à cette éruption soudaine.
Quelques murmures accompagnent le passage à "Shadows
Of A Shadow", composition suivante qui applique d’abord des couches plus traditionnelles de
noirceur, mais les ajouts intrigants refont vite surface avant les vagues de violence avant de
les intégrer à leur marche. Le groupe enchaîne avec "Woe Ye’ Who Build These
Crosses...Are Those Who Will Serve Us Death" et ses riffs vifs, mais également son
inattendue et surprenante pause apaisante qui ne dure qu’un court moment, laissant les
musiciens retourner à leur avancée morbide. Le son se brise, puis repart dans des tonalités
malsaines avec "V.I.I. (Voured Ichneumous Icon)", dernière des sept compositions qui se
trouve être la plus accessible de l’album, proposant des harmoniques éthérées pour créer
un contraste avec le blast plus brut qui nous précipitera vers les derniers instants.
Avec sept nouvelles chansons de sept minutes, Veilburner réussit à nous conforter et à
nous surprendre. "The Duality Of Decapitation And Wisdom" est un album unique, aussi riche
que dérangeant, et qui saura trouver son public en révélant toute sa noirceur étrange.
"VLBRNR"
Note : 17/20
Prenez garde à Veilburner. Créé en 2014 aux Etats-Unis, le duo composé de Mephisto
Deleterio (instruments) et Chrisom Infernium (chant, Pyrrhic Salvation, Torture
Ascendancy 1307, Humanity Decayed) annonce en 2022 la sortie de "VLBRNR", son
sixième album, chez Transcending Obscurity Records.
L’album suit la recette créée et cultivée par le groupe tout au long de sa discographie,
consistant en un son oppressant et sombre qui navigue chaotiquement entre death et black
metal pour nous écraser avec sa dissonance. On retrouve l’aspect mystérieux dès "VI
(Vulgar Incantations)", le premier titre, qui va dévoiler des harmoniques étranges avant que la
puissance brute ne démarre, contrôlée par le blast et les hurlements, mais également des
choeurs terrifiants couplés à des effets mystérieux alors qu’"Envexomous Hex" nous propose
également des tonalités plus épiques pour accompagner la rage massive déployée par le
groupe. "Interim Oblivion" nous laisse un court moment de répit avant de relancer
progressivement sa machine infernale avec des riffs lancinants qui nous conduisent à "Lo!
Heirs To The Serpent" et ses influences old school plus directes qui s'allient parfaitement
avec les patterns expérimentaux du groupe avant que "Burning The Veil" ne vienne nous
envelopper de sa noirceur mélancolique qui perdurera même lorsque l’instrumentale se
montre agressive.
La quasi-absence de chant rend le morceau assez accessible, mais les
cris impies reviendront hanter "Unorthodoxagon" et ses riffs accrocheurs infusés au
death’n’roll groovy et au black metal brut, puis "Repulsed By The Light" vient à nouveau nous
offrir un moment de flottement avec des mélodies planantes desquelles les parties vocales
émergent sans mal. L’alliance des éléments doux avec le chant rend le mélange assez
entêtant tout en conservant la part sombre alors que "None So Hideous" lâche les riffs les plus
directs et agressifs possibles tout en profitant d’un tempo élevé pour placer des patterns
saccadés. Des leads surprenants bourrés d’effets viennent également se glisser dans la
vague de puissance qui laissera place à "Exhibitionism In Limbo", une courte et apaisante
composition qui fait la part belle aux sonorités planantes, puis à "Ruin", le long et dévastateur
dernier morceau qui laisse un son écrasant et martial se mêler à des parties vocales vomies
et malsaines pour clore l’album.
"VLBRNR" est une réelle expérience du chaos. Si Veilburner est connu pour construire un
son chaotique et dissonant, ce nouvel album respecte à la lettre leurs principes, et nous
entraîne dans les profondeurs abyssales du black / death metal avant de nous autoriser à
respirer à nouveau.
"Lurkers In The Capsule Of Skull"
Note : 15/20
Déjà le cinquième album depuis 2014 pour les Américains de Veilburner, on peut dire que ça ne chôme pas ! "Lurkers In The Capsule Of Skull" est donc le nouveau méfait de ces fous furieux qui délivrent depuis leurs débuts une sorte de death / black malsain, dissonant et totalement possédé qui ne fait aucun compromis. La bête est à réserver aux plus ouverts d'esprits parce que même si les influences sont clairement orientées vers le metal extrême, c'est un tel bordel qu'il va falloir persévérer pour en saisir le propos.
Si vous connaissez déjà Veilburner, vous savez très bien à quoi vous attendre, ce nouvel album ne change pas la donne et continue dans la même voie. Pour les autres, dites-vous que la biographie conseille le groupe aux fans de Deathspell Omega, Esoctrilihum, Portal, Sigh, Imperial Triumphant, Norse (dont on va bientôt parler) ou encore Blut Aus Nord. Tout ça devrait vous permettre de situer vaguement la chose parce que comme ses prédécesseurs, "Lurkers In The Capsule Of Skull" est assez insaisissable et ne manque pas une occasion de vous filer entre les doigts pour passer dans votre dos et vous caler une bonne grosse mandale derrière la nuque. Le groupe s'amuse visiblement sur chaque album à dépeindre les mésaventures d'un homme possédé par une entité ressemblant à une goule et détaille donc son combat mental contre elle, ce qui colle évidemment très bien à cette musique chaotique qui donne l'impression d'avoir été composée et jouée par de multiples personnalités. "In The Tomb Of Dreaming Limbo" ouvre l'album et Veilburner arrive très vite à nous plonger dans son monde avec ce mélange entre blasts furieux, riffs dissonants et malsains soutenus par quelques orchestrations fantômatiques en fond. On retrouve instantanément la patte du groupe et cette alternance entre passages presque dramatiques et folie incontrôlée est toujours aussi bluffante et terrassante. "Nocturnal Gold" nous balance même certains passages très thrash dans l'esprit au milieu d'un morceau totalement possédé et barré comme d'habitude. Veilburner s'amuse d'ailleurs aussi à expérimenter avec les voix et n'hésite pas à utiliser toutes sortes d'effets pour amplifier l'impression de schizophrénie musicale. Les guitares pètent elles aussi un plomb régulièrement et ce morceau est un bon exemple de la façon dont ce duo s'amuse à les tordre dans tous les sens pour en obtenir des sons complètement malades et les plus dissonants possible.
Le morceau-titre, en plus d'être aussi taré que le reste, est en plus assez violent et les blasts occupent bien l'espace faisant pour le coup penser au Esoctrilihum des premiers albums, nul doute que ces deux-là doivent avoir quelques influences communes. On retrouve effectivement ce mélange de violence déchaînée, de dissonances complètement malsaines et un chaos organisé qui devrait cramer quelques neurones au passage. Pour autant, Veilburner a bien une patte particulière et si le metal extrême se fait de plus en plus souvent dissonant, ce duo américain a une folie qui lui est propre et ne se contente pas d'essayer de produire les morceaux les plus tordus possibles. Il y a suffisamment de cohérence là-dedans et des ambiances assez fortes pour que "Lurkers In The Capsule Of Skull" ne vire pas à l'exercice de style stérile. Si les mélodies ne sont pas ce qui frappe en premier, elles sont pourtant bien là et s'intégrent naturellement dans l'organisme de cette bête difforme au comportement étrange, lui donnant un peu d'humanité au milieu de ses crises de folie psychotique. On sent aussi par moments une proximité avace le Mayehm de "Ordo Ad Chao", notamment sur "An Odyssey Through Cataclysm" dans ses moments les plus tordus et chaotiques. En tout cas, ce nouvel album réussit son coup et le groupe se fait une fois de plus éprouvant, on se retrouve sur les rotules à la fin de ces cinquante-trois minutes et c'était clairement l'effet recherché. La production est à l'avenant et fournit un son assez sec qui colle bien au style pratiqué même s'il fait parfois sonner les guitares comme un essaim d'abeilles, ce qui est probablement volontaire d'ailleurs.
Au final, "Lurkers In The Capsule Of Skull" est assui dingue, malsain, dissonant et violent que ses prédécesseurs et Veilburner ne perd rien de sa folie avec ce nouvel album. Si vous êtes déjà familiers avec la musique du groupe, vous en serez ni dépaysés ni déçus, quant aux autres allez jeter une oreille là-dessus à vos risques et périls !
"A Sire To The Ghouls Of Lunacy"
Note : 17/20
Que signifie “prolifique” pour vous ? Sortir quatre albums en quatre années d'existence ?
C’est le profil de Veilburner. Créé en 2014 aux Etats-Unis par Mephisto Deleterio
(instruments) et Chrisom Inferium (chant, Torture Ascendency 1307), le premier album
sort la même année. Et c’est un enchaînement d’acharnement qui conduit les deux hommes
à aboutir au quatrième album, "A Sire To The Ghouls Of Lunacy", sur la toute fin de l’année
2018. Une expérience ? Oui. Êtes-vous prêts ? Non.
Le premier titre, "Introvertovoid", débute lentement, mais va frapper très fort. Ne vous fiez pas
à cette introduction atmosphérique, car c’est un black / death intense et puissant qui frappe
par la suite. Les riffs s’enchaînent à toute allure, mais laissent largement la place au
chanteur de placer ses hurlements. Les ambiances aussi se succèdent, puisque des
passages atmosphériques presque prog débouchent sur une violence incommensurable ou
des psalmodies. "Panoramic Phantoms" reprend avec une distorsion hors du commun et des
samples qui donnent aux rythmiques du groupe un goût d’inconnu, de saleté et surtout de
violence libérée. Le tout, en alternance avec des hurlements plaintifs sur des passages plus
doux mais tout aussi malsains. La rythmique devient plus complexe avec "Agony On Repeat",
et l’intensité retombe à peine lorsque la boucle se rompt, mais le chant de Chrisom est
toujours aussi violent et rageur. Même le solo, qui débouche sur la douce "Abattoir Noir", n’y
changera rien. Si dans un premier temps c’est une sorte de cabaret sinistre que nous
entendons, le son devient plus tranchant, et c’est en effet la rythmique malsaine du groupe
qui nous saute à la gorge.
Si vous n’avez pas peur des fantômes, vous pouvez passer à "A Sire To The Ghouls Of
Lunacy", car pour moi c’est le titre parfait pour une maison hantée. Des samples effrayants,
un blast furieux et surtout des riffs impitoyables. Alternant growls caverneux et screams
perçants, le chanteur se décarcasse pour donner vie au morceau. On continue avec le
sample introductif de "Glory Glory Grotesque" qui est plus que morbide, mais bien vite
rattrapé par les riffs sanglants du morceau. On conserve cette ambiance horrifique sur les
riffs, mais avec une distorsion grasse et sale, qui donne l’impression d’une tempête qui ne
se calme que temporairement. Le groupe continue sur sa lancée avec la mystique "Upstream
And Parallel", qui semble très technique, rapide et réfléchie. Chaque note est liée à la
suivante à une vitesse hallucinante, et même si le milieu du titre ralentit un peu, il est
impossible de vraiment prendre de pause sur ce titre, excepté sur la fin, qui est presque
ethnique. Le dernier morceau, "Where Torment Has Danced Before", est très énigmatique.
Presque encastré dans une brume éthérée sur le début, il devient ensuite très
atmosphérique et gagne de plus en plus cette ambiance pesante et malsaine du black
metal. Compliqué à saisir du premier coup, le titre avance en alignant des harmoniques qui
tournent d’elles-même, qui rebondissent et qui se muent en des riffs tranchants… Oui, ce
morceau a tout pour plaire, mais surtout à tout le monde.
Veilburner est un groupe contradictoire. A la fois très précis dans ses choix, exigeant dans
ses influences, mais également très accessible par moment, "A Sire To The Ghouls Of
Lunacy" est un album à la fois mature, réfléchi mais surtout puissant. Car c’est ce qui
caractérise la formation, la force des riffs, la véhémence des accords et la rage des notes.
Un live ? Non, je ne pense pas. Mais je peux me tromper, et j’en serais plus qu’heureux.
|