Le groupe
Biographie :

Wycca est un one-man band de black metal atmosphérique formé en 2022 dans lequel opère Robin Arkhen (chant, guitare, basse / ex-Days Of Crisis, ex-Forsaken World, ex-Heimsgard, ex-Obsidium, ex-Malevolentia, ex-Decencya, ex-Dog'N'Style). Wycca sort son premier album, "Lumière", en Juin 2023 chez Epictural Production.

Discographie :

2023 : "Lumière"


La chronique


Ne jamais se fier aux apparences, et ne jamais faire confiance aux sensations que l’on éprouve au premier abord, c’est une leçon de vie qui m’est revenue en pleine tronche à l’écoute de Wycca. Je reçois donc un petit paquet estampillé Epictural Production, et forcément, connaissant le label, je savais à quoi m’attendre, du black metal ! On le sait tous, le black, c’est un genre qui s’est développé et qui a favorisé le métissage, un genre qui n’a pas hésité à copuler avec l’indus, l’ambiant, qui a su préserver son côté sauvage, ou au contraire se montrer illustratif, avec son lot de synthés, d’éléments symphoniques, etc. Je ne vais pas refaire l’histoire mais aujourd’hui, nous avons suffisamment de recul pour comprendre, à première vue, si on a droit à du pagan, du trve, du shoegaze black, du sympho… Rien qu’en regardant la pochette et le logo, on a déjà de gros indices. Donc, en m’emparant de ce premier opus de Wycca, l’aspect runique du logo et du nom de l’album m’interpelle. Les tons violacés de la pochette, avec cette femme nue, prosternée dans une forme de recueillement chamanique, un crâne de cervidé, toutes cornes dressées vers les cieux, laisse imaginer une musique contemplative dénuée de violence. De plus, si comme moi vous êtes de grands curieux, vous allez ouvrir le digipack, lire les textes, vous imprégner de l’objet, et là pareil, tout porte à croire qu’on va se taper un black atmo des familles. Il faut dire qu’en même temps que j’observe avec attention chaque détail du livret, l’intro du disque "Equanimité" défile dans mon lecteur CD.

Guitare acoustique aux relents folk, percussions profondes et chant guttural mystique, clochettes brillantes dont le tintement perce un voile contemplatif, c’est bon, on est chez les hippies du black metal, et ce n’est pas le logo de Pranahala Productions présent au dos de la jaquette qui va me contredire ! Des chants féminins viennent apaiser avec légèreté une ambiance mystique de très bonne facture et je commence à m’habituer à ce climat doux et relaxant. Mais voilà, le deuxième track, "Saignée De Cendres", va catégoriquement me faire changer d’avis sur "Lumière". Après une intro pesante, Wycca balance un black nerveux, incisif, à la fois puissant et mélodique, dont les vociférations du chanteur laissent échapper une rage contrôlée qui ajoute de la détermination à l’ensemble. Pas de doute, nous sommes sur du pur black, certes ambiant, comme peut en attester le pont sur ce même morceau avec ses incursions dans le pagan, notamment grâce à des refrains doublés de chant clair, très heavy dans l’approche stylistique, mais celui-ci ne perd pas pour autant de sa hargne et son côté guerrier. Après chaque accalmie, le tumulte reprend, le metal noir de Wycca est interprété avec conviction et on se laisse aisément porter par ce déluge de décibels. D’un point de vue sonore, le mixage est plutôt réussi, l’ensemble est cohérent, on perçoit l’effet brouillard fidèle au black metal, mais chaque instrument reste bien à sa place et n’empiète pas sur les autres. Ainsi le drumming est clair, le couple grosse caisse / snare nous fait traverser des phases de rage intense lorsque la musique fait grimper les aiguilles dans le rouge, mais parvient à susciter le headbanging incontrôlable sur les passages plus lourds comme sur "Profondeurs Rampantes".

Que ce soit dans ses phases rapides, ses parties plus posées ou carrément ambiantes, Wycca présente une musique toujours cohérente et dont le storytelling, rodé, facilite l’accès à un metal mine de rien assez intimiste. La transition entre la fin de "Profondeurs Rampantes", douce et mélancolique, avec son inspiration très "Planet Caravan" et l’introduction de "Nébuleuse Des Âmes" qui transporte de manière irrévocable vers des univers sonores majestueux et épiques, en est un parfait exemple. Il y a toujours chez Wycca cette guitare aiguë qui dessine des mélodies envoûtantes, planantes au-dessus d’un maelstrom de fréquences métalliques assumées. "La Valse Du Chamane " installe un rythme ternaire envoûtant, dont les mélodies sensiblement orientales ajoutent vraiment du drama de manière subtile. Le drumming alterne entre cavalcades de double bombe et des passages réellement massifs, ce morceau c’est le pied, il dégage une énergie communicative. Nous sommes réellement embarqués au milieu d’un rituel chamanique nocturne, un peu à la manière de celui que la pochette du disque évoque. Ce titre est à la fois épique et grandiose, il y a une couleur scandinave sur les refrains, on ressent le froid de la neige et l’humidité des vieux rochers installés dans leur lit de mousse. "Le Grand Dragon Blanc" fait grimper le curseur de rage et de violence, sans doute le track le plus téméraire et tranchant de tout le disque, celui-ci ne néglige pas pour autant les passages plus lyriques avec des envolées de chant clair, superbes et jamais kitch. "Lumière", l’avant-dernière étape du voyage, nous repose un peu, la voix hurlée contraste avec des guitares plus douces, un morceau qui tire même sur le format pop, qui évoque de nombreuses choses, une véritable réussite très sensible, comme si Bathory et The Cure avaient fusionné pour jouer de la musique celtique inspirée par Mike Oldfield, je vais un peu loin là mais bon… c’est peut être la guitare omniprésente, qui oscille entre solo atmosphérique et envolées lyriques, qui fait penser à ça. En tous les cas, même si ce titre reste majoritairement instrumental, cela ne fait pas bailler pour autant, bien au contraire, on se laisse embarquer sans penser que le voyage peut s’arrêter. "Eclosion" conclut le périple sous forme d’outro très proche de l’intro, mais avec des tonalités un poil plus sinistres.

Eh bien, quelle excellente surprise ce Wycca ! Le black metal proposé ici est inspiré et inspirant, le moindre détail est pensé, pesé, millimétré, le groupe va même jusqu’à utiliser un diapason à 426 Hz, je ne sais pas si cette résonnance possède des vertus particulières, mais il est vrai que le ton général du disque possède un petit quelque chose délicat à définir. En tous les cas, "Lumière" porte une couleur, une teinte particulière, est-ce les tons employés sur les artworks qui nous influence ? Car on perçoit du bleu et du violet, on se retrouve transporté de nuit au milieu d’une plaine herbeuse baignée dans la clarté d’une lune intense et prisonnière de vastes forêts, où un rituel se prépare, ossements et apparats druidiques ornant le corps d’une femme, ses gestes lents et maîtrisés nous invitent à communier, recouverts de terre et de cendres… Et dire qu’à la base, je craignais être tombé sur un black metal de zadiste en sarouel… "Lumière" est un album extrêmement cohérent, visuellement et musicalement, celui-ci transporte au travers de son black metal acerbe un environnement sonore imprégné de magie et de nature, nous sommes en présence d’un disque à la fois envoûtant et enivrant, puissant et grandiose, merci pour la découverte Epictural !!!


Trrha'l
Juillet 2023


Conclusion
Note : 17,5/20

Le site officiel : www.facebook.com/wycca.music